[Film] Les sorcières de Zugarramurdi, de Alex de la Iglesia (2013)

En plein jour, un groupe d’hommes braque un magasin d’or de la Puerta del Sol à Madrid. José, père divorcé en plein conflit avec son ex-femme, Tony, son complice, sex-symbol malgré lui, Manuel, chauffeur de taxi embarqué contre son gré dans l’aventure, et Sergio, le fils de José, partent en cavale. Objectif : atteindre la France en échappant à la police… Mais arrivé près de la frontière française, dans le village millénaire de Zugarramurdi, le groupe va faire la rencontre d’une famille de sorcières, bien décidées à user de leurs pouvoirs maléfiques pour se venger des hommes…


Avis de Cherycok :
Zugarramurdi est un tout petit village de 200 habitants au nord de l’Espagne, proche de la frontière française, à 30km de Bayonne, célèbre pour avoir abrité de nombreuses sorcières et avoir été victime au 17ème siècle de l’inquisition durant laquelle une douzaine de personnes accusées de sorcellerie furent brulées vives sur un bûcher. C’est aussi le lieu qu’a choisi Alex de la Iglesia (Le Jour de la Bête, Balade Triste, Le Crime Farpait) pour tourner son film sur le sujet, qu’il a tout simplement appelé Les Sorcières de Zugarramurdi (Las Brujas de Zugarramurdi en VO). Et un film avec pour thème « les sorcières », ça ne court pas les rues, là où les vampires, les loups garous et surtout les zombies ont droit de manière régulière à un représentant du genre. Raison de plus de s’intéresser au nouveau délire du réalisateur espagnol. Un film comme lui seul en a le secret. Un film complètement fou. Un film tout bonnement excellent.

Alex de la Iglesia s’accompagne une fois de plus de Jorge Guerricaechevarría, son scénariste attitré depuis ses débuts, mais il semble également être très fidèle à ses acteurs puisqu’une fois de plus, c’est toute une tripotée de têtes vues dans ses films précédents. Le casting est d’ailleurs tout bonnement génial, aussi bien du côté des braqueurs en fuite que des sorcières, avec des cabines pas possibles comme le toujours excellent Enrique Villen (Le Crime Farpait, Balade Triste) et son œil qui dit merde à l’autre, le rondouillard Carlos Aceres (Lobos de Argas, Torrente 5, Balada Triste) et l’ex-rondouillard Santiago Segura (Les 5 Torrente, Le Jour de la Bête), tous deux affublés dans un petit rôle de sorcières, ou encore la méconnaissable Terele Pavez (Mes Chers Voisins, Le Jour de la Bête, Balada Triste) et son regard froid de tueuse, excellente en grand-mère sorcière qui perd la boule. Mais celle qui une fois de plus crève l’écran, c’est Carmen Maura (Mes Chers Voisins, Femmes au Bord de la Crise de Nerfs, 800 Balles) semblant complètement habitée par son rôle de sorcière en chef préparant le rituel en l’honneur de celle qu’elles appellent « La Mère », la créatrice. Mais de manière générale, c’est un sans-faute. Alex de la Iglesia a toujours su choisir ses acteurs, et l’alchimie fonctionne à tous les coups, même lorsqu’ils sont, comme ici pour certains, dans des rôles à contre-emploi complètement hystériques.
La folie est vraiment le mot qui caractérise le plus Les Sorcières de Zugarramurdi. Le rythme ne faiblit jamais, les idées fusent dans tous les sens et tout cela va crescendo au risque d’en fatiguer certain devant tant d’hystérie à la seconde. De la première (le braquage de la boutique de rachat d’or en pleine Puerta del Sol à Madrid) à la dernière minute (le rituel qui part en cacahuète), ça n’arrête pas une seconde et Alex de la Iglesia nous gratifie de scènes qui restent dans les mémoires par leur côté barré et les personnages qui vont avec.

Le film se divise en deux parties clairement distinctes, un peu à la manière du Une Nuit en Enfer de Robert Rodriguez. La première, après un braquage explosif et avec tout ce que cela comporte de gunfight et de froissage de tôle, entre des braqueurs déguisés (Jésus, Bob l’Eponge, un soldat de plomb,…) et la Police, file tout droit sur le terrain du road movie. Le côté déjanté et très burlesque est déjà là, avec des personnages complètement pittoresques, des dialogues qui font mouche à chaque fois et des situations abracadabrantes. Mais c’est sur sa deuxième moitié que le film pète littéralement les plombs, un peu trop sans doute même, lorsque les sorcières et leurs intentions sont dévoilées aux malheureuses victimes. A partir de là, Alex de la Iglesia passe en mode no limit, balançant de la référence à tout va (à l’Exorciste, Réservoir Dogs, Indiana Jones, Les Sorcières d’Eastwick, Leatherface,…), donnant même à sa dernière demi-heure un côté extrêmement cartoon (on pense à Dragon Ball Z lors du combat aérien des sorcières).
On a l’impression que tout le monde est en mode lâchage total, sorte de grosse cour de récréation où ça court, ça crie, ça chante, ça se fout joyeusement sur la gueule, avec pour chef d’orchestre un Alex de la Iglesia qu’on imagine facilement le sourire aux lèvres devant le nawak qu’il est en train d’immortaliser, avec pour toile de fond et fil conducteur l’idée de bousculer les inégalités qui persistent entre les hommes et les femmes en vouant un culte à ces dernières. Les sorcières veulent le retour de leur « Mère » (en opposition avec le « Père », Dieu), les hommes sont cantonnés au rang de serviteurs dans leur micro société, tous les personnages masculins du film ont des soucis divers et variés avec leur femmes / ex-femmes (l’ex-femme du héros est enregistrée dans son téléphone sous le nom « Armageddon », le beau gosse qui explique qu’il bande mou devant sa femme qu’il trouve sublime, …). De là à dire que son divorce difficile avec sa femme de l’époque lors de l’écriture du scénario y est pour quelque chose, il n’y a qu’un pas…

LES PLUS LES MOINS
♥ La folie ambiante
♥ Le casting 100% génial
♥ La touche De La Iglesia
♥ Les nombreuses références
⊗ Juste un tout petit ventre mou
⊗ Quelques SFX ratés
Les sorcières de Zugarramurdi est le film le plus fou de Alex de la Iglesia. Superbement mis en scène, à la fois référentiel, jubilatoire, délirant, intelligent, sans complexe, intriguant, burlesque, tout en restant captivant, un film joyeusement bordélique qui casse les codes du cinéma et qui fait franchement du bien pour peu qu’on se laisse gagner par son ambiance complètement hystérique.



Titre : Les sorcières de Zugarramurdi / Las Brujas de Zugarramurdi / Witching & Bitching
Année : 2013
Durée : 1h52
Origine : Espagne / France
Genre : It’s a witch !
Réalisateur : Alex de la Iglesia
Scénario : Alex de la Iglesia, Jorge Guerricaechevarría

Acteurs : Hugo Silva, Mario Casas, Pepon Nieto, Carolina Bang, Carmen Maura, Terele Pavez, Gabriel Delgado, Macarena Gomez, Santiago Segura, Enrique Villen

 Les sorcières de Zugarramurdi (2013) on IMDb
















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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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