[Film] Deadstream, de Joseph et Vanessa Winter (2022)

UAprès avoir été discrédité et ruiné à la suite d’une polémique sur Internet, un streamer tente de regagner son public en se mettant en scène, seul et en live, dans une maison hantée abandonnée. Mais c’était sans compter la colère de l’esprit vengeur qui habite les lieux.


Avis de John Roch :
La mode du found footage est révolue, il n’empêche que le genre refait surface de temps à autre pour nous livrer des pets ou des perles. Mais on n’est pas à l’abri d’une renaissance du genre à l’heure des nouvelles méthodes de communications et de diffusions de vidéos. Sorte de sous-genre du found footage, le screen reality a su pleinement tirer profit desdites nouvelles méthodes de communications avec Unfriended et sa suite, Searching : Portée Disparue ou encore l’excellent Profile. Deadstream est un peu entre les deux dans le sens où, non seulement le métrage utilise les nouvelles technologies pour mettre en scène son histoire, mais ne se limite pas à un écran figé, mais envoie son héros filmer en direct ses péripéties dans une maison hantée (une vraie selon les réalisateurs de la chose). Il s’agit d’un found footage, quelques interrogations demeurent donc avant de lancer Deadstream car le genre, on le connait que trop bien. Le found footage, c’est une porte ouverte à qui ne sait pas tenir une caméra et fait n’importe quoi avec sous prétexte que c’est le genre qui veut ça, d’autant plus que c’est un premier film. Et ce premier film fait fureur en festival, avec les critiques élogieuses qui vont avec et ça à force, on commence aussi à connaitre (voir PussyCake récemment, dont je me demande encore si j’ai bien vu le même film que celui que les critiques US encensent plus que de raison). Et pourtant, Deadstream est une bonne surprise mis en scène par un couple de réalisateurs, Joseph et Vanessa Winter, amoureux du cinéma horrifique.

Deadstream a pour héros Shawn, rôle principal que Joseph Winter joue avec brio, un youtubeur héritier de Jackass dont la spécialité est de se mettre en scène dans des situations qu’il redoute, comme traverser illégalement la frontière Mexicaine ou se faire poursuivre par des flics qu’il a insultés. Seulement ses vidéos déclenchent une série de polémiques qui ont pour effet de se mettre à dos ses followers et ses sponsors. Six mois après s’être fait démonétisé ses vidéos, Shawn est de retour sur youtube, et pour reconquérir son public, il lance un direct dans lequel il part explorer une maison hantée. Bien qu’en surface Deadstream reprennent les obsessions des influenceurs tels que la course au followers et aux sponsors pour lesquelles ils n’hésitent pas à faire tout et n’importe quoi pour un buzz quitte à provoquer une polémique, ou simplement passer pour un débile profond, qui amène un semblant de notoriété, le métrage n’est jamais une satire de ce monde. Au contraire, les Winter n’en extirpent que le coté pathétique et s’en servent pour créer un personnage non pas détestable mais attachant, à la fois débile mais triste pour lequel on ne peut s’empêcher d’avoir de l’empathie au fil des minutes qui défilent. Shawn est de prime abord un abruti fini mais est au final un personnage assez bien écrit, tiraillé entre sa propre survie et les conditions qu’il s’est imposé pour son live (voir le pourquoi du comment il ne peut pas s’échapper de la maison, à la fois débile mais bien vu). Personnage qui détonne dans le found footage car, c’est rare pour ne pas être signalé, le héros a des réactions logiques. Ici, le personnage court en hurlant se cacher dès que la présence démoniaque qui hante les lieux se manifeste, et s’arme en pleine panique de ce qui lui passe sous la main dès que l’occasion se présente.

Deadstream ne s’arrête pas à ce personnage qui se trouve être très drôle par moments, le métrage à bien d’autres atouts dans sa manche. A commencer par la mise en scène qui est bien plus maitrisée qu’il n’y parait. Niveau caméra, deux sont sur le youtuber : une à l’épaule et l’autre vissée sur sa tête. Shawn place également des caméras dans diverses pièces pour qu’il, et par extension ses viewers, puisse avoir un œil sur les manifestations surnaturelles. Alors on a déjà vu ça ailleurs, dans l’incompréhensible succès qu’est Paranormal Activity par exemple, où l’on alternait entre scènes filmées par le protagoniste et vues sur des caméras de surveillances. Ici le concept fonctionne car il est parfaitement exploité. La mise en scène de Deadstream est impeccable. Jamais la réalisation n’est bordélique, et pourtant entre les deux caméras sur Shawn, et les multiples angles de vues sur les pièces de la maison hanté, tout est cohérent et donc maitrisé même lorsque l’action se fait plus intense. Reste que l’écran est parfois trop chargé. La faute aux commentaires qui popent de temps à autres en live. Non pas que ça rende le film imbuvable, mais lesdits commentaires sont parfois de trop et il va falloir choisir où vos yeux vont se concentrer : Shawn ou les commentaires qui en rajoutent dans le coté comédie, et pas que ceux qui sont lus par le héros, de ce fait Deadstream mérite deux visions pour en saisir tout l’humour présent.

Car oui Deadstream est une pure comédie horrifique, et une bonne en plus ! Pour le coté horreur, il va falloir s’armer d’une légère patience puisque Joseph et Vanessa Winter prennent leur temps pour installer la tension. Mais une fois celle-ci arrivée à son paroxysme, le film décolle enfin et ne s’arrête plus. Pour résumer sans trop en dévoiler, en plus de l’humour référentiel, Deastream est un hommage à Evil Dead en mode internet 2.0, si ce n’est un remake à peine déguisé. Tout y est, l’invocation accidentelle des démons, le héros qui va se faire torturer physiquement et moralement avant de prendre les armes pour tenter de passer la nuit sans mourir, l’entité démoniaque qui possède les protagonistes… Le métrage est un pur condensé d’horreur et de comédie. On sursaute, on rigole, parfois le deux en même temps. Le tout se refuse des CGI pour des effets pratiques de partout. Certains manquent de finition, mais la plupart du temps les démons qui se manifestent ont clairement de la gueule et un design qui renvoie directement aux années 80. Dans le panier du found footage, Deadstream est dans le haut. Malgré une première partie qui prend trop son temps, sans pour autant être chiante, son ambiance, son coté hommage aux 80’s et à Evil Dead, son duo d’acteurs à l’alchimie qui fonctionne (Joseph Winter et la mimi Melanie Stone), la comédie et l’horreur qui sont très bien dosées font mouche. Le film n’est certes pas une claque mais remplit amplement son contrat, à savoir faire frissonner et rire pendant 1h27. De quoi attendre avec impatience le nouveau long métrage de Joseph et Vanessa Winter, qui ont déjà récidivé en livrant To Hell and Back, le meilleur et seul sketch intéressant de VHS 99 qui a les mêmes qualités que Deadstream. De quoi attendre doublement leur nouvelle réalisation.

LES PLUS LES MOINS
♥ On rigole
♥ On sursaute
♥ La mise en scène bien plus maitrisée que la plupart des found footage
♥ Un héros attachant
♥ Pas de CGI, que des effets pratiques
♥ L’humour référentiel et plus globalement un évident hommage à Evil Dead
⊗ Jamais chiant, mais ça met son temps avant de vraiment démarrer
⊗ Ça devient légèrement dur de se concentrer sur tout ce qui se passe à l’écran dès lors que les commentaires en direct arrivent.

Deadstream est une belle surprise et est le genre de film qui remplit son contrat : faire tour à tour rire et frissonner, parfois les deux en même temps. Le métrage est également bourré de qualités qui en font un film qui est dans le haut du panier du found footage, et qui font de Joseph et Vanessa Winter un couple de réalisateurs à suivre.


 Deadstream est disponible en VOSTFR sur la plateforme de SVOD française SHADOWZ.



Titre : Deadstream
Année : 2022
Durée : 1h27
Origine : USA
Genre : Evil Dead 2.0
Réalisateur : Joseph Winter et Vanessa Winter
Scénario : Joseph Winter et Vanessa Winter

Acteurs : Joseph Winter, Melanie Stone, Jason K. Wixom, Pat Barnett, Marty Collins, Perla Lacayo, Cylia Austin-Lacayo, Hayden Gariety
 Deadstream (2022) on IMDb


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Auteur : John Roch

Amateur de cinéma de tous les horizons, de l'Asie aux États-Unis, du plus bourrin au plus intimiste. N'ayant appris de l'alphabet que les lettres B et Z, il a une nette préférence pour l'horreur, le trash et le gore, mais également la baston, les explosions, les monstres géants et les action heroes.
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