Devenue une star de la série Z horrifique via une émission télé, Elvira voudrait monter un grand spectacle à Las Vegas, mais il lui manque cinquante mille dollars. C’est à ce moment qu’elle apprend la mort de sa riche grand-tante, Morgana. Avec ce décès renaît l’espoir. Elvira débarque alors dans la petite ville ultra conservatrice de Fallwell dans le Massachusetts. La grand-tante décédée ne lègue à Elvira que sa maison et un mystérieux livre de cuisine pour lequel un vieil oncle, Vincent, paraît prêt à toutes les folies. Elvira se heurte aussi à Chastity Pariah, une mégère représentant un club de défense de la moralité.
Avis de Cherycok :
Bien que peu connue par chez nous, le personnage d’Elvira est une icône du cinéma horrifique américain qui a fêté ses 40 ans d’existence et à laquelle bon nombre d’américains vouent un culte. Elle fait pleinement partie de la culture pop américaine, apparaissant par exemple dans Les Simpsons ou Scooby-Doo. Tout comme Pee Wee Herman, star du petit écran, et est passé sur grand écran grâce à Tim Burton avec le film Pee-Wee’s Big Adventure. Le personnage d’Elvira a lui aussi pris la direction des salles obscures dès 1988 avec le film Elvira, Maitresse des Ténèbres. Mais là où Pee-Wee’s Big Adventure avait été un succès, les résultats d’Elvira sont bien plus mitigés puisqu’avec son budget de 7.5M$US, il n’en rapporta que 5.6 aux États-Unis, freinant ainsi les ardeurs des distributeurs qui décidèrent de ne le sortir qu’en direct to vidéo un peu partout dans le reste du monde. Mais au fait, c’est qui / quoi Elvira ?
Elvira, c’est un personnage créé de toutes pièces par Cassandra Peterson, jeune demoiselle qui rêvait de gloire à Los Angeles mais qui va finalement se retrouver à la présentation d’une émission de télévision dans laquelle on va présenter, puis diffuser un film d’horreur /fantastique sur une chaine locale du Nevada de 1981 à 1986. Pour cela, Peterson va créer le personnage d’Elvira, sorte de pin-up gothique hyper sexualisée, amatrice de cinéma horrifique à tendance B voire Z, portant une robe noire moulante, un décolleté assez plongeant pour réveiller les morts, et une coupe de cheveux assez improbable. De 1981 à 1986, elle va animer Movie Macabre, une émission diffusant donc un film d’horreur souvent de « seconde zone » comme aiment les appeler certains cinéphiles, qu’elle ne va pas hésiter à interrompre pour faire des commentaires et même des blagues. La popularité de l’émission est telle qu’elle sera reprise par d’autres chaines (dont MTV), et son personnage aura droit en vrac à des jeux vidéo, des figurines, une marque de bière, des maquillages, des comics, des pin’s et bien d’autres jolies choses. En parallèle, Cassandra Peterson s’offre des rôles au cinéma comme dans les films Le Roi de la Montagne, Pee-Wee Big Adventure, ou encore Allan Quatermain. Mais un long métrage sur Elvira est rapidement né. Cassandra Peterson aimerait Tim Burton pour le réaliser, mais ce dernier est déjà occupé sur Beetlejuice. C’est finalement James Signerelli qui hérite du bébé, spécialiste du Saturday Night Live qui avait réalisé jusque-là Hold-Up en Jupons (1983) et une partie de Police Academy 2 (1985). Elvira, Maitresse des Ténèbres voit le jour en 1988, c’est un bide, mais cela n’écornera pas réellement l’image du personnage d’Elvira bien que Peterson ait été nominé pour le Razzie Award de la pire actrice en 1989 pour sa performance dans le film.
Clairement, c’est Elvira qui fait tout le film, avec son exubérance, ses punchlines bien senties, son côté sexy et provocateur. Le jeu de Cassandra Peterson est assez particulier, au point que certains risquent d’être rapidement irrités, mais c’est pourtant ça qui va faire le sel de nombreuses scènes. Le film va beaucoup jouer sur le physique très généreux (surtout en termes de poitrine) de son actrice principale, avec pas mal de blagues tournant autour de ça. Les jeunes personnages du film vont tout faire pour « voir ses roploplos » ; elle va se faire emmerder par les vieux réacs, par les mecs un peu bourrins, par les gros cochons qui vont tenter de prendre ses seins à pleines mains. Les blagues sur les boobs, sur les fesses, sur l’entrejambe vont être légion et même Elvira jouera la carte des allusions sexuelles dès qu’elle verra un homme à son goût. Oui, Elvira Maitresse des Ténèbres est souvent vulgaire, mais c’est surtout pour appuyer son propos. Le film se moque clairement de la bien-pensance, du machisme, en jouant avec le côté ultra sexualisé de son héroïne qui va disposer de son corps comme elle le souhaite. L’humour du métrage va beaucoup jouer sur le contraste entre l’exubérance à tous les niveaux d’Elvira et le côté très conservateur et coincé du cul de la ville dans laquelle elle vient chercher l’héritage de sa tante décédée. Le film tire à boulets rouges sur cette Amérique puritaine ultra catho qui s’offusque de tout, qui est un peu trop arriérée sur par exemple la place de la femme dans la société, et bien que cela ne soit que rarement fait avec finesse, on se bidonne parfois en écoutant les punchlines bien senties de cette brune fatale.
« Parfois » seulement car l’avalanche de conneries que le film nous propose va souffler le chaud et le froid car tous les gags ne sont pas réussis. Néanmoins, Elvira, Maitresse des Ténèbres est rythmé, court, sans réel temps mort, et un mauvais gag est vite remplacé par un bon avec par exemple des scènes improbables. Ce pique-nique de vieux virant à l’orgie suite à l’ingurgitation d’un ragout un peu spécial, ce caniche punk ou lorsqu’elle fait exploser une chaine en fer à la puissance de ses boobs, si ça ne vous fait pas éclater de rire, ça vous fera au moins sourire. Entre son émission sur le cinéma bis et ce film, on sent l’amour du personnage d’Elvira, et donc de Cassandra Peterson, pour ce cinéma de série B voire Z. Ici, ça cite Roger Corman le temps d’une ligne de dialogue, on y voit un extrait d’une de ses productions, on y voit même des images du Retour des Tomates Tueuses, et on sent clairement l’envie de rendre hommage aux Universal Monsters avec laquelle la belle a dû grandir. Mais ce n’est pas ici de la nostalgie pour ce cinéma, juste une lettre d’amour, car le personnage d’Elvira refuse cette nostalgie et veut aller de l’avant comme en témoigne le final où elle décide de laisser derrière elle tout cet héritage qui lui tombe dans les bras. Il en résulte un film pas exceptionnel, à cause entre autres d’un manque évident de fond, de gags pas toujours très heureux, d’un manque de finesse et d’une mise en scène passe-partout (mais qui fait malgré tout le job), mais néanmoins très attachant, symbole d’une époque, avec une héroïne tout simplement mémorable.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Le personnage d’Elvira ♥ Certains gags et punchlines ♥ La bande son rock ♥ Les références au cinéma bis |
⊗ Manque souvent de finesse ⊗ Certains gags tombent à plat ⊗ Un fond pas assez travaillé |
Critique d’une société américaine parfois trop puritaine, ode au cinéma bis, on peut voir beaucoup de choses derrière Elvira Maitresse des Ténèbres. C’est quoi qu’il en soit une très sympathique comédie certes bourrée de défauts mais ô combien attachante. |
LE SAVIEZ VOUS ?
• L’émission qu’Elvira a présentée au début des années 80 est souvent revenue à l’antenne. On a pu la voir en 2001 sous le nom d’Elvira’s Haunted Hills, en 2010 sous le titre Elvira’s Movie Macabre. On a également vu Elvira en tant qu’hôtesse d’horreur en 2014 dans 13 Nights of Elvira (série en 13 épisodes sur Hulu), et même tout récemment en 2021 le temps d’une émission marathon spéciale sur Shudder.
• La robe d’Elvira (Cassandra Peterson) est coupée d’une manière particulière et ses cheveux sont longs dans le dos pour cacher les cicatrices de brûlures que Peterson a sur le cou et les épaules à la suite d’un accident dans sa jeunesse. Cassandra Peterson a dit en plaisantant que son costume d’Elvira ne montrait que “les bons côtés”.
• La peinture de Morganna Talbot, la grand-tante d’Elvira, est en fait une peinture de Cassandra Peterson, sans maquillage ni perruque noire. Le portrait a été peint par Robert Redding, qui a participé à la création du look d’Elvira et à qui Peterson a dédié le film.
• Le personnage de Vincent Talbot (William Morgan Sheppard) a été appelé ainsi en hommage aux acteurs Vincent Price et Lyle Talbot.
Titre : Elvira, Maitresse des Ténèbres / Elvira, Mistress of the Dark
Année : 1988
Durée : 1h33
Origine : U.S.A
Genre : Un décolleté d’enfer !
Réalisateur : James Signorelli
Scénario : Sam Egan, John Paragon, Cassandra Peterson
Acteurs : Cassandra Peterson, William Morgan Sheppard, Daniel Greene, Edie McClurg, Kris Kamm, Scott Morris, Ira Heiden, Ellen Dunning, Susan Kellerman