[Film] Carter, de Jung Byung-gil (2022)

Un homme se réveille amnésique. Dirigé par une voix mystérieuse provenant d’un dispositif implanté dans son oreille, il se lance dans une périlleuse mission de sauvetage.


Avis de Rick :
Indirectement, le grand public connait le réalisateur Jung Byung-gil, puisque son précédent film, The Villainess, avait eu droit à une ovation à Cannes, une sortie en France, et donc, à une certaine visibilité en plus de faire parler de lui. Bon, c’était un bien beau bousin, un film d’action où malheureusement pour lui, le pire dans le métrage, c’était l’action, rendue illisible par cette envie de plans séquences où la caméra se mettait dans des endroits improbables, comme pour nous taper sur l’épaule et nous dire « t’as vu, ma caméra elle fait ça ». Alors oui, mais sans l’utilisation de coupes et de morceaux de plans en CGI, tes plans séquences, ils sont impossibles, et donc la prouesse même du plan tombe à l’eau, puisqu’il n’y a derrière aucune prouesse à la caméra, aucune prouesse des acteurs faisant un combat ou une poursuite de cinq minutes, puisque tout est faux, et que l’improbabilité de l’ensemble nous crie constamment à la gueule que c’est faux. Mais il faut croire que le réalisateur n’a pas retenu la leçon, n’ayant retenu de The Villainess que son ovation étrange à Cannes (les cocktails avant de la projection devaient être corsés), puisqu’avec son nouveau métrage débarquant sur Netflix, Carter, il a décidé de faire la même chose, puissance 1000. En gros donc, étendre ce qui était raté dans son précédent métrage à l’intégralité du film, un faux plan séquence de 2h10 qui se prend constamment les pieds dans le tapis, en plus d’être d’une laideur monstre, des effets totalement foirés et donc une illusion de plan séquence absente, puisque brisée toutes les 45 secondes en moyenne, et qui prouve une fois de plus que Netflix achète tout et n’importe quoi. Eux dont les abonnements sont en train de chuter à vitesse folle, ce n’est pas en achetant des films comme Carter qu’ils vont ramener du public. Si ils pouvaient couler et ainsi permettre aux quelques bons films de leur catalogue de sortir au format physique, ce ne serait pas plus mal après tout, et leurs choix vont finir par les amener droit dans le mur.

Mais revenons à Carter, un film dont je n’ai rien de positif à dire dessus. Ou à Jason Bourne, puisque basiquement, nous avons là un agent amnésique traqué par la CIA, pendant 2h10, et puis voilà c’est tout. Mais là où Jason Bourne, malgré quelques passages illisibles avec la mise en scène de Paul Greengrass savait malgré tout rester efficace et faire monter une certaine tension par moment, avec Carter, rien. On a juste un film purement visuel qui ne raconte rien, ne tente pas de faire stresser, qui n’intéresse pas dés que les personnages se posent pour parler, et anéantit le concept même de cinéma, de montage. Là où un réalisateur choisit ses plans pour une certaine raison, pour faire passer son message, pour mettre des éléments en avant, la mise en scène ici est intégralement vide, se contentant de tourner, suivre l’acteur constamment traqué, à passer d’un acteur à un autre dés que ça devient bavard. Visuellement donc, c’est mauvais, vide, sans âme. Et pour enterrer tout ça, bien entendu, il y a l’action, et la durée conséquente du métrage, 2h10, qui vient retirer le peu de fun que le métrage aurait pu contenir. Car plus qu’un Jason Bourne plus long et en faux plan séquence (on insistera sur le faux), on a l’impression d’être devant un Hardcore Henry encore plus pénible, et affreusement trop long. L’esbrouffe visuelle, pour fonctionner, doit au moins être utile au récit ou à une quelconque supercherie, comme les plans séquences ou les split screens chez De Palma, ou savoir se modérer sur la durée pour devenir digeste. Carter lui voit les choses en grand, et se plante, devenant simplement inintéressant passé 15 minutes. Et sans jamais oser poser sa caméra, comme pour justifier ses raccords désastreux. Car il va bien falloir parler du pire du pire, à savoir, l’action et sa mise en scène. Dés l’ouverture, tout paraît faux, et dés que l’action débarque, c’est pire. Car nous n’avons pas là un vrai plan séquence comme dans un The Raid 2 qui s’amusait avec des plans longs pour impressionner, ou le plan séquence certes pas fou mais au moins réel et stable de No Time to Die pour rester dans les films récents.

Dans Carter, non, la caméra est en mouvement perpétuel, ce qui révèle très vite la supercherie. Une caméra qui zoome un peu trop durant l’action et on remarque immédiatement qu’un acteur ne se déplace plus à la même vitesse, ou qu’il ne se déplace plus exactement dans le même axe. Un figurant passant devant la caméra et on remarque les mêmes éléments qui trahissent la technique. De même lorsque la caméra veut que l’objectif soit recouvert de sang, qui part comme par magie après quelques secondes, juste le temps de camoufler un raccord entre deux plans. Sans forcément avoir un œil averti, on remarque immédiatement les coupes, parfois abusives tous les deux ou trois coups. Et le réalisateur, comme pour camoufler ça, inflige donc au spectateur une mise en scène intégralement en faux plan séquence, et où la caméra est sans cesse en mouvement, lors d’un dialogue, lors d’une action banale. Un peu comme si, pour filmer quelqu’un ouvrant une canette de coca, la caméra avait besoin de tourner autour de la canette en accéléré avant de cadrer l’acteur puis de passer derrière sa tête lorsqu’il boit… Et ça, sur 2h10, c’est juste imbuvable (le film, pas le coca), inintéressant, jamais impressionnant, jamais techniquement pertinent, et jamais bon. Car si l’on doit ajouter la petite cerise sur le gâteau de ses faux plans séquences raccordés avec le cul, on pourrait parler des CGI, et des plans où les personnages sont remplacés par des marionnettes en CGI (la chute libre après l’explosion de l’avion)… Non, tout est catastrophique !

LES PLUS LES MOINS
♥ Il y a une équipe qui a été payé pour faire ça ⊗ Une mise en scène insupportable
⊗ Hideux visuellement
⊗ Les faux plans séquences, raccordés n’importe comment
⊗ Un scénario jamais intéressant
⊗ Des enjeux dont on se contrefiche vu que le film ne se pose jamais
note75
Comment résumer Carter en un mot ? En étant mauvaise langue, on pourrait dire « Netflix ». En étant plus réaliste, le mot « catastrophe » correspond tout aussi bien. En étant cynique, je dirais que le plat surgelé Picard Japonais fut fort bon pendant la vision.


Titre : Carter – Kateo – 카터
Année : 2022
Durée :
2h12
Origine :
Corée du Sud
Genre :
Action
Réalisation :
Jung Byung-gil
Scénario :
Jung Byung-gil et Jung Byeong-sik
Avec :
Joo Won, Lee Sung-jae, Jeong So-ri, Byeon Seo-yun, Jung Jae-young, Kim Bo-min, Jung Hae-kyun, Camilla Belle et Mike Colter

 Carter (2022) on IMDb


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Auteur : Rick

Grand fan de cinéma depuis son plus jeune âge et également réalisateur à ses heures perdues, Rick aime particulièrement le cinéma qui ose des choses, sort des sentiers battus, et se refuse la facilité. Gros fan de David Lynch, John Carpenter, David Cronenberg, Tsukamoto Shinya, Sono Sion, Nicolas Winding Refn, Denis Villeneuve, Shiraishi Kôji et tant d'autres. Est toujours hanté par la fin de Twin Peaks The Return.
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