[Avis] Glory to the Filmmaker ! de Kitano Takeshi

Titre : Glory to the Filmmaker ! / Kantoku Banzai / 監督・ばんざい
Année : 2007
Durée : 1h44
Origine : Japon
Genre : Comédie
Réalisateur : Kitano Takeshi

Acteurs : Kitano Takeshi, Osugi Ren, Terajima Susumu, Watanabe Tetsu, Morooka Moro, Sugata Shun, Ishibashi Tamotsu, Chono Masahiro, Tenzan Hiroyoshi, Ibu Masato, Fujita Yumiko, Kishimoto Kayoko, Matsuzaka Keiko, Yoshiyuki Kazuko, Takarada Akira, Suzuki Ann, Uchida Yuki, Emori Toru, Zinedine Zidane

Synopsis : Le célèbre cinéaste Kitano Takeshi se met en quête de réaliser le film ultime pour les amateurs de cinéma du monde entier. Il imagine tous les genres possibles pour ce projet. Suit à l’écran et hors-cadre une série d’événements imprévisibles liés à une catastrophe prête à changer la face du monde. Dès lors, Kitano se doit de non seulement finir son film, mais aussi de sauver l’humanité !

Avis de Laurent : Kitano Takeshi est un cinéaste insaisissable. Non pas que son cinéma soit difficile d’accès, mais tout simplement parce qu’il ne colle pas avec le personnage de spectacle et de télé qui a fait sa réputation au Japon. D’ailleurs, Kitano Takeshi a eu toutes les peines du monde à s‘imposer dans son propre pays. Remarquez, essayez d’imaginer notre Vincent Lagaf national réaliser un film comme Sonatine … Difficile à appréhender ! Après une série de films remarquables et remarqués (de Violent Cop en 1989 à Zaitochi en 2003), Kitano Takeshi marque une fin de cycle. On sent le réalisateur conscient que l’état de grâce est terminé et qu’il est grand temps de changer de registre. Place à la comédie, genre qu’il affectionne tout particulièrement. En effet, malgré la gravité et la violence de la plupart de ses films, le cinéaste n’hésite jamais à y insérer un humour cocasse et rafraîchissant.

Glory to the Filmmaker ! fonctionne comme une psychothérapie. D’ailleurs, le film commence à l’hôpital par une analyse au scanner du cerveau du réalisateur afin de voir ce qu’il y a dedans. Le résultat est sans appel : c’est le bordel à l’intérieur ! Et quoi de plus normal alors à ce que Glory to the Filmmaker ! soit un film foutraque et bordélique au possible. Le film dans le film : Kitano Takeshi revient à la réalisation afin de renouer avec le succès auquel il était habitué. Il va alors s’essayer à tous les styles et tous les genres en parodiant, entre autre, le cinéma d’Ozu, le yakuza eiga qui a fait son succès, le film d’horreur, le film de ninjas ou encore le cinéma de science fiction foireux mais attachant. Mis en scène via une succession de sketchs globalement hilarants mais quelques peu décousus, Glory to the Filmmaker ! ose absolument tout. Entre humour nonsensique, gags grossiers et finesse témoignant de l’extrême lucidité du réalisateur, ce sympathique exercice de style amuse le spectateur à condition qu’il soit prêt à accepter l’autre facette du cinéaste … celle de Takeshi’s Castle. Son célèbre show télévisuel (un mix entre Interville pour la connerie et Violent Cop pour les hématomes comptabilisés sur les candidats) est lui aussi un bon exemple de l’imagination et l’humour sans limites de Beat Takeshi.

Déstabilisant et bourré de doubles sens, ce nouvel ovni de Kitano intègre une fois de plus quelques éléments autobiographiques. Il ne s’agit pas d’une première, rappelons que Kids Return (1996) s’inspirait largement de la carrière « manzai » du réalisateur (sketches satiriques basés sur une improvisation verbale). Glory to the Filmmaker ! évoque donc la peine de Kitano à se renouveler et à surprendre le spectateur. Cette fois-ci, la surprise est de taille et les habitués du réalisateur vont avoir du mal à voir où il veut en venir. Pourtant c’est simple : Kitano veut s’amuser et coucher sur pellicule tout ce qui lui passe par la tête. Quoi de plus normal alors que de voir se juxtaposer dans un même film un combat de catch bouffonesque et une parodie du cinéma réaliste et « ennuyeux » (dixit dans le film) d’Ozu. Tout un art que lui seul peut se permettre. A noter l’idée géniale de la marionnette de Kitano qui remplace le réalisateur à chaque fois qu’il ne peut faire face à une situation qu’il ne contrôle plus. Voir Kitano transporter son clone en dit long sur sa difficulté à assumer le personnage touche à tout qu’il a créé tout le long de sa carrière.

Fun mais finalement assez anecdotique, Glory to the Filmmaker ! est une œuvre inclassable qui met en lumière un réalisateur à la dérive. Mais une dérive contrôlée et assumée.

Note : 6/10


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Auteur : Laurent

Un des membres les plus anciens de HKmania. N'hésite pas à se délecter aussi bien devant un polar HK nerveux, un film dansant de Bollywood, qu'un vieux bis indonésien des années 80. Aime le cinéma sous toutes ses formes.
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