[Film] Torrente, le Bras Gauche de la Loi, de Santiago Segura (1998)


Torrente, ex-policier madrilène, cynique, poivrot et supporter invétéré de l’Atletico, deuxième équipe de football de la capitale, va tenter de rétablir l’ordre et de faire respecter sa loi dans un quartier des bas-fonds.


Avis de Cherycok :
Découvert fin 90’s en VHS VOSTFR un peu au hasard à sa sortie en vidéo club, attiré par la tête en gros plan sur la jaquette de cet acteur que j’avais vu et apprécié dans Le Jour de la Bête de Alex de la Iglesia, Torrente le Bras Gauche de la Loi a immédiatement été un gros coup de cœur, en grande partie grâce à son personnage principal complètement improbable. Après l’avoir conseillé à moult amis, en leur expliquant que jamais ils n’avaient vu un film comme ça, j’ai rapidement constaté que le film divisait. Certains (comme moi) adoraient, d’autres détestaient littéralement, ne comprenant ce qu’il y avait d’amusant à voir un être abject se prendre pour un flic dans les bas-fonds d’un quartier de Madrid. Aujourd’hui encore, au bout de cinq films, la saga Torrente divise les foules et c’est compréhensible tant l’humour qui s’en dégage, à l’instar de l’humour cantonais par exemple, peut laisser complètement de marbre, même l’amateur de comédies lourdingues. Alors embarquons aujourd’hui dans el maravilloso mundo de Torrente !

Torrente est un personnage créé par Santiago Segura lui-même qui, en plus de jouer le personnage principal, a écrit le scénario et réalisé le film. Alcoolique, misogyne, raciste, cynique, fouille-merde, vulgaire, amoral, moche, … Bref, Torrente est un personnage politiquement incorrect et tout est fait pour le rendre repoussant. Il est sale, transpirant, arbore une calvitie qu’il masque tant bien que mal par ses cheveux très gras, … On a rarement vu ça au cinéma, surtout pour ce qui va devenir à la longue le héros de 5 films. Car oui, ce premier Torrente est un énorme succès en Espagne, engendrant donc quatre suites entre 2001 et 2014, moult produits dérivés, et une série a même été envisagée à un moment (bien que n’ayant jamais vu le jour). Torrente a remporté deux Goya et est devenu le film le plus rentable de l’histoire du cinéma espagnol, dépassé plus tard par sa suite, Torrente 2. Torrente et ses sketchs sont devenus partie intégrante de l’imaginaire populaire de son pays et le film est considéré par certains espagnols comme la meilleure comédie jamais produite dans leur pays. Un projet de remake américain a été envisagé, avec un Robert De Niro favorable pour reprendre le rôle de Torrente, mais n’a finalement jamais vu le jour. Puis un autre projet de remake américain refait surface, avec Jack Black, Will Ferrel ou Vince Vaughn dans le rôle-titre. Thomas Langman, à travers sa société La Petite Reine, était également intéressé par la production d’un remake français, bien que ça semble être tombé à l’eau. Tout ça pour dire que ce premier Torrente a fait parler de lui au final un peu partout dans le monde, bien que le public (autre qu’espagnol) n’ait souvent jamais entendu parler de cette comédie policière dont le titre complet « Torrente, El Brazo Tonto de la Ley » s’inspire du Cobra avec Sylvester Stallone sorti dans la péninsule ibérique sous le titre « Cobra, el Brazo Fuerte de la Ley ». Et, qu’on aime ou pas au final, il faut que tout le monde voie un jour ce film car, comme le dit Santiago Segura lui-même : « On a tous un Torrente enfoui quelque part en nous ».

Torrente est une comédie policière où l’humour noir côtoie l’humour vulgaire et souvent complètement con. Un humour con, mais assumé de bout en bout afin de servir la caricature d’un film qui joue avec les codes du buddy movie à sa façon. Rien que son héros immonde est une caricature poussée à l’extrême du machisme ibérique. Les vices de la société espagnole sont gentiment titillés bien qu’il y ait de grandes chances que ceux n’y connaissant rien à la culture espagnole passent à côté de bon nombre de choses. Étant moi-même d’origine espagnole et ayant été des centaines de fois au pays du chorizo et de la paella, force est de constater que c’est un plus non négligeable pour que le film de Santiago Segura nous parle. La mise en scène est absolument passe-partout et surtout reléguée au second plan car on sent que ce n’est pas ce qui intéresse son réalisateur dans cette première réalisation (ça viendra avec les opus suivants). Ce qui intéresse Segura, ce sont ses personnages, et ils jouent un rôle fondamental tant leurs personnalités sont l’essence même de la franchise dès ce premier opus. Torrente a beau être quelqu’un d’abjecte et de répugnant, on ne sait par quel procédé miraculeux on ne peut s’empêcher de le trouver attachant et extrêmement fun. Son duo avec le personnage de Rafi (l’excellent Javier Camara) fonctionne très bien. Les codes du buddy movie sont là, avec deux personnages que tout oppose. A vrai dire, c’est tout le casting qui est absolument parfait et on sent que chaque acteur s’implique dans son rôle, aussi couillon ou décadent soit-il. Certains font aussi bien pitié que rire (le père de Torrente) et ils sont réellement au centre d’un film au scénario plein de situations ridicules, exagérées ou non. Certaines scènes sont mémorables, d’autres sont carrément devenues un running gag dans la saga (la branlette dans la voiture). C’est clair, ça ne vole pas haut mais, sincèrement, qu’est-ce qu’on se marre !

LES PLUS LES MOINS
♥ Le personnage de Torrente
♥ Le casting
♥ Des scènes mémorables
♥ Le scénario bien ficelé
⊗ La mise en scène en demi-teinte

Film clairement à prendre au dixième degré, Torrente premier du nom est une comédie policière décomplexée, vulgaire, crado, politiquement incorrecte, mais surtout sacrément fun malgré une réalisation assez plate.

LE SAVIEZ VOUS ?
• De nombreux produits dérivés ont vu le jour après le succès du premier film. Santiago Segura et le dessinateur José Antonio Calvo ont publié une adaptation du film dans le magazine El Vibora en 1998. En 2001, Virtual Toys produit un jeu video basé sur les deux premiers volets de la saga (un autre jeu verra le jour en 2005, inspiré de Torrente 3). En 2009, la société de jeux Ludicus lance une machine à sous sur le thème de Torrente et en 2013, Enric Rebollo adapte le personnage en bande dessinée (plusieurs tomes).

• Le film a marqué le retour au cinéma de Tony Leblanc et Espartaco Santoni après plus de 20 ans. Leblanc s’était retiré du cinéma en 1975 pour se consacrer au théâtre, mais un accident de voiture en 1983 a mis fin à sa carrière théâtrale. Le dernier film de Leblanc avant celui-ci était Tres suecas para tres Rodríguez (1975), et le dernier film de Santoni avant celui-ci était Pena de muerte (1974).



Titre : Torrente, le Bras Gauche de la Loi / Torrente, el Brazo Tonto de la Ley
Année : 1998
Durée : 1h37
Origine : Espagne
Genre : Affreux, sale et méchant
Réalisateur : Santiago Segura
Scénario : Santiago Segura

Acteurs : Santiago Segura, Javier Camara, Neus Asensi, Chus Lampreave, Tony Leblanc, Julio Sanjuan, Jimmy Barnatan, Dario Paso, Carlos Parea, Manuel Manquiña

 Torrente, le bras gauche de la loi (1998) on IMDb


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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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