[Film] All About Lily Chou-Chou, de Shunji Iwai (2001)


Hasumi est un jeune trop calme pour son âge. Sa faculté à demeurer impassible devant les difficultés et à ne pas répondre aux coups et aux provocations va vite faire de lui un souffre-douleur pour les élèves au sang plus chaud et à la tête moins pleine que la sienne. Il tient le coup grâce à sa passion pour la pop star Lily Chou-Chou, dont les chansons lui permettent de s’évader, de vivre, d’espérer. Cette passion il la partage avec son camarade Hoshino, et avec des millions d’autres fans, qui se retrouvent anonymement sur internet pour discuter de leur amour pour la mystérieuse chanteuse.


Avis de Yume :
La genèse d’All About Lily Chou-Chou a été hasardeuse. La petite histoire raconte que Iwai décida tout d’abord de se lancer dans un projet commun avec Edward Yang, après un concert de la Pop star Faye Wong. L’histoire serait celle d’une star de la musique à HK, originaire de Taiwan. Mais les aléas firent que le projet ne put aboutir. Iwai décida alors de conter sur son site web l’histoire d’une chanteuse nommée Lily. Nourri des commentaires des internautes, il en tira le scénario d’All About Lily Chou-Chou.

Shunji Iwai l’a toujours dit clairement : il voit Tokyo comme un Hôpital. Alors que Swallowtail Butterfly, auquel All About Lily Chou-Chou pourrait de prime abord être comparé, nous parle de comment échapper à cet hôpital, All About Lily Chou-Chou nous emmène sur les pas des patients, des jeunes patients qui s’inventent un monde imaginaire pour oublier la peur qu’ils ont du monde réel. En effet le héros Yuichi vit dans deux mondes parallèles. Le monde réel, où il est timide, réservé, et brimé. Et celui qu’il se construit sur le net autour de son idole Lily Chou-Chou sous le pseudo de Philia, dans lequel il est sûr de lui et entreprenant. La méthode pour se protéger du premier, et rentrer dans le second : l’Ether, notion discutée tout au long du film, notion qu’emploie Lily Chou-Chou pour expliquer sa musique, mais surtout finalement une bulle de protection. Mais cette bulle va s’étioler au fur et à mesure du film, à cause de la violence de la réalité. Violence crue de l’école, admirablement décrite par Iwai avec une finesse et une retenue exemplaire. Pas de plans provocateurs, pas de plans explicites, mais une dureté crue cachée sous la photographie et le cadrage parfait. Comme pour la société japonaise, qui cache cette réalité scolaire sous une apparence propre et parfaite (la scène des cerfs-volants résume toute cette philosophie à elle seule. J’en ai eu les larmes aux yeux). Dans le film, la violence va crescendo, donnant une dernière demi-heure psychologiquement dure, jusqu’à la scène finale qui propose juste une alternative à ce qu’a vécu le Yuichi, une alternative en un seul personnage campé par la formidable mais trop peu présente Ayumi Ito, seule véritable actrice professionnelle et reconnue du film. En effet, la majorité des autres acteurs sont des débutants, qui arrivent malgré tout à endosser convenablement leurs rôles.

Une autre part importante et surtout indissociable du film est la musique. Encore une fois, Iwai a fait appel à Takashi Kobayashi et ensemble ils ont créé une idole crédible et des musiques et chansons proches du style de Bjork, de toute beauté. En fait, la BO mérite à elle seule la vision du film, avec quelques passages au piano de partitions de Debussy qui contrebalancent la musique de Lily Chou-Chou. Coté réalisation, Iwai fait comme à son habitude avec de grand plans d’ensemble où ne se trouve qu’un personnage isolé, et au contrario des plans serrés remplis de personnages. Avec comme grande nouveauté, l’utilisation de la caméra numérique. La mise en scène quant à elle est claire, et inventive grâce à la double narration des messages du forum sur Lilly Chou qui rejoint la narration principale à la fin.

LES PLUS LES MOINS
♥ Écrit avec finesse
♥ Superbe mise en scène
♥ Intensité qui va crescendo
♥ La musique
⊗ …
Au final, Iwai réussi un film toute en finesse sur la violence de l’école japonaise, et surtout sur ceux qui la subissent. Mais aussi tout simplement un film sur la fin de l’innocence de la jeunesse. Un film tour à tour drôle, cruel, émouvant, mais toujours sensible et humain. Un film qui confirme que Iwai est maintenant un grand réalisateur japonais. Il ne lui manque plus, à l’instar de son collègue Masato Harada, qu’une reconnaissance internationale amplement méritée. Un beau film tout simplement.



Titre : All About Lily Chou-Chou
Année : 2001
Durée : 2h26
Origine : Japon
Genre : Drame
Réalisateur : Shunji Iwai
Scénario : Shunji Iwai

Acteurs : Ichihara Hayato, Oshinari Shûgo, Ito Ayumi, Osawa Takao, Ichikawa Miyako, Inamori Izumi, Aoi Yû

 Riri Shushu no subete (2001) on IMDb


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Auteur : yume

Un bon film doit comporter : sailor fuku, frange, grosses joues, tentacules, latex, culotte humide, et dépression. A partir de là, il n'hésite pas à mettre un 10/10. Membre fondateurs de deux clubs majeurs de la blogosphere fandom cinema asitique : « Le cinema coréen c’est nul » World Wide Association Corp (loi 1901) et le CADY (Club Anti Donnie Yen).
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