C’est l’histoire de trois enfants, trois amis, qui, pour pouvoir jouer à leur jeu vidéo, vont devoir partir à la recherche d’une recette de tarte aux myrtilles et trouver tous les ingrédients pour la préparer. Malheureusement, ils vont être emportés dans une aventure grisante où ils vont se faire une nouvelle amie et rencontrer sa famille peu commode.
Avis de Cherycok :
Il y a des films qui, comme ça, sans vous avertir, vous replongent en quelques secondes dans votre tendre jeunesse, lorsque vous aviez 8 ans, 10 ans, et que vous découvriez ces films qui allaient vous mettre des étoiles plein les yeux. Les quarantenaires voient de quels films je parle, ces petits bonbons comme Willow, L’Histoire Sans Fin ou encore Les Goonies. Des films pleins d’aventures magiques qui ont fait rêver des millions d’enfants à travers le monde. Des films comme on n’en fait plus diront les plus nostalgiques et, quelque part, ce n’est pas faux. Et pourtant, si, on en fait encore, ou plutôt on fait des films qui leur rendent hommage. Non, pas ces (très) nombreux films qui cherchent à surfer sur cette nouvelle mode des années 80 lancée par la série à succès Stranger Things et qui croient que parce qu’ils mettent une bande originale façon bontempi et qu’ils font des références à ces films d’antan ou à la pop culture de cette époque, ils seront de bons films. Non, je parle de vrais bons films qui ont tout compris à leur sujet, qui ne se contentent pas de singer bêtement, qui sont sincères dans leur démarche, qui offrent un spectacle enchanteur. Riddle of Fire de Weston Razooli est de ceux-là, et pour un premier film, c’est une réussite (quasi) totale.
Weston Razooli est un cinéaste américain qui avant Riddle of Fire n’avait à son actif que quelques courts métrages ainsi que des clips musicaux, mais déjà se dessinait un univers singulier dans lequel se mixaient un style familier et quelque chose de jamais vu, un univers très ancré dans les années 70/80/90. Présenté à la Quinzaine des cinéastes au Festival de Cannes 2023, Riddle of Fire est donc son premier long métrage, un film à mi-chemin entre le conte et une partie de jeu de rôle, filmé à hauteur d’enfant, narré par une enfant, dans un univers enfantin mêlant magie et réalisme, mais surtout un film extrêmement ludique et mignon. L’introduction sous forme de poème énigmatique, récité par une petite fille, nous plante clairement le décor, nous serons ici dans une sorte de quête et les trois protagonistes nous sont présentés, de preux chevaliers en armure, casqués, sur leur fidèle destrier. En réalité trois enfants sur leurs petites motos, cagoule en guise de casque, des pistolets de paintball faisant office d’armes. Très vite, le parallèle avec le conte ou le jeu de rôle se fait, le film ne s’en cachant jamais et utilisant, voire détournant, tous les codes que l’on connait. Il y a d’abord le but ultime des enfants, jouer à cette nouvelle console, mais pour cela, ils auront une quête, ici donnée par la mère de deux des héros (chercher une tarte aux myrtilles), clouée au lit à cause d’une grippe. Cette quête sera au final une succession de plus petites quêtes (voler dans un centre commercial, récupérer un œuf, …), ponctuée de quêtes secondaires, un peu comme des niveaux dans un jeu vidéo, et de rencontres parfois mystérieuses. Tous les personnages sont des métaphores de personnages de conte ou de jeu de rôle, le titre du 3ème chapitre (Les 3 Gobelins, 2 fantômes, une fée, un troll, un chasseur et une sorcière) y fait d’ailleurs référence, et même les noms de certains de ses personnages (Anna Freya, Hazel, Petal), de gangs (Le Gang de la Lame Ensorcelée, Les 3 Reptiles Immortels) ou simplement de certains lieux font écho à certains contes ou certaines histoire d’heroic fantasy.
On nous parle de personnages qui ont des pouvoirs magiques, de disciples de ces personnages, de lieu fabuleux aux créatures uniques, mais il ne faut pas ici chercher de cohérence ni même à démêler le vrai du faux, car il faut prendre en compte que ce sont des enfants qui nous racontent cette histoire, avec des yeux d’enfants de 6 / 10 ans, et l’imaginaire des enfants se mêle à la réalité. Il faut revenir au même âge qu’eux et simplement se laisser porter. Mais Riddle of Fire n’est pas juste un film tout bête avec des enfants, Riddle of Fire est un film très réfléchi, très intelligent, et dans lequel rien n’est laissé au hasard. Ça fourmille de détails nous renvoyant aux contes / jeux de rôle, d’une mère allongée à l’étage qui pourrait faire écho à une reine malade en haut d’une tour, au simple design d’une maison, en passant par la musique qui accompagne parfaitement bien le film tout du long, à mi-chemin entre sonorités des années 80 et l’ambiance heroic fantasy avec des instruments comme la harpe ou la flûte. Visuellement, tout est également parfaitement calculé, avec par exemple un tournage en 16mm qui, couplé à des vêtements intemporels, donne un côté vieux à l’image, avec son grain épais typique, ses couleurs douces semblant parfois un peu délavées, au point qu’on demande réellement si le film n’a pas en fait 30 ou 40 ans. On notera également un très bon travail sur les couleurs, avec parfois une dominante de bleu qui représente souvent le bien, sur des détails comme des champignons extrêmement rouges parsemés ci et là dans cette forêt du Wyoming qui semble sans fin, mais également sur la luminosité, comme lorsqu’on découvre pour la première fois le groupe des méchants dans leur maison calfeutrée.
Riddle of Fire est très malin sur certains aspects, à commencer par les personnages des enfants. Alors certes, à l’instar de beaucoup de films les mettant en scène, c’est souvent surjoué, ça semble même ici presque volontaire pour faire référence à des films tels que Les Goonies ou L’Histoire sans Fin, mais aussi des contes Disney où les voix des personnages sont souvent très exagérées. Mais comme le réalisateur s’amuse avec les codes du conte, cela n’importe que peu au final. La princesse (le personnage de la jeune Petal) n’est clairement pas ici en détresse. Au contraire même, elle est rapidement un moteur pour le petit groupe lorsque celui-ci ne sait plus quoi faire. Le personnage fort et courageux est ici clairement féminin ; le rôle de l’amoureux transi et maladroit qui va devoir être sauvé est ici le jeune garçon Hazel ; le ton est clairement volontairement enfantin et pourtant les enfants se mettent sans cesse en grand danger et certaines scènes sont même assez violentes, aussi bien psychologiquement (les jeunes enfants qui se font mettre en joue) que physiquement (l’un des héros prend un gros coup de poing d’un adulte) … Parce que n’oublions pas que les contes, bien qu’ils aient tous été extrêmement édulcorés par les nombreuses adaptations de Disney, sont souvent violents à la base, parfois sadiques, avec même de temps en temps une fin aux antipodes du happy end, Mais ici, on sent que tout va bien se terminer car, pour rappel, cette histoire nous est racontée par des enfants, et c’est ce qu’on veut car ces enfants sont très rapidement devenus attachants. Gardons en tête qu’ils ont fait tout ça pour jouer à leur nouvelle console alors, oui, on est content quand ils y arrivent. On regrettera seulement que par chez nous, le film n’ait eu droit qu’à une sortie cinéma extrêmement réduite, et une sortie en format physique qui se limite au DVD. Alors certes, bien qu’il rende hommage à ces films de bande aimés de tous comme Les Goonies, Riddle of Fire reste un film malgré tout assez particulier. Pourtant, il est réellement enchanteur et aurait mérité clairement une sortie blu-ray voire 4K.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ La mise en scène ♥ Les personnages ♥ Les références assumées et digérées ♥ La bande son ♥ Très malin |
⊗ Le surjeu des enfants pourra énerver |
Vibrant hommage aux contes, au jeu de rôle, aux années 80, Riddle of Fire est une excellente surprise, un film d’aventure intelligent pour toute la famille qui mêle fiction et réalité. Pour un premier film, le pari est hautement réussi ! |
LE SAVIEZ VOUS ?
• Lors d’une interview, le réalisateur avoue avoir été influencé par des films tels que Les 400 Coups (1959), La Forteresse Cachée (1958), Jumanji (1995), Les Goonies (1985), mais aussi du mythe de Robin des Bois, des contes des frères Grimm, ou encore de l’esthétique des films Disney des années 1970.
• C’est l’éditeur Blaq Out qui s’est occupé de la sortie ciné et DVD du film chez nous.
Titre : Riddle of Fire
Année : 2023
Durée : 1h55
Origine : U.S.A / France
Genre : Il était une fois…
Réalisateur : Weston Razooli
Scénario : Weston Razooli
Acteurs : Charlie Stover, Skyler Peters, Phoebe Ferron Lorelei Olivia Mote, Lio Tipton, Charles Halford, Andrea Browne, Weston Razooli, Rachel Browne, Austin Archer