[Film] The Crow : La Cité des Anges, de Tim Pope (1996)

Los Angeles est devenue une annexe de l’enfer, le royaume de Judah Earl. Le bras droit de celui-ci, Curve, assassine un homme dénommé Ashe, et son petit garçon. Comme le fit jadis Eric Draven, Ashe reviendra d’entre les morts aux yeux de la jeune Sarah, accompagné du funeste Corbeau, afin d’assouvir son implacable vengeance.


Avis de Rick :
Je vais vous surprendre, mais pour une fois, je vais dire du bien de Miramax et Dimension Films. Et donc par extension des frères Weinstein. Espérons que cela n’entraine pas la fin du monde. Mais si The Crow a pu sortir en 1994, c’est en partie grâce à eux, qui, après le triste décès de Brandon Lee, ont financé la fin du tournage pour compléter le film, avant de la distribuer avec, grande surprise de leur part, une promotion honnête ne cherchant pas du tout à capitaliser sur la mort de l’acteur. Une promotion respectueuse donc. Sauf que, Wesintein oblige, dés que le film devient un succès et rapporte de l’argent, le naturel revient au galop, et voilà, une suite est sur les rails. Et le souci principal des frères Weinstein revient lui aussi au galop, si bien que comme pour de très nombreux films, comme Halloween 6, Hellraiser Bloodline ou encore Cursed (dont Wes Craven est le seul d’ailleurs à être resté malgré tout jusqu’à la fin, admirons son courage), les voilà à valider un scénario, à laisser un réalisateur faire le film qu’il veut, mais une fois le montage devant les yeux, non ça ne plait pas, faut tout changer. Qu’une idée semble bien sur papier mais au final rende mal à l’écran, ça arrive, très souvent, et il n’est pas rare de devoir effectuer quelques changements, mais quand c’est tout le film qui change, on se dit juste que les producteurs ne lisent pas le scénario en début de production mais valident tout de même, ou bien qu’au départ, ils se sont levés du pied gauche en début de production, mais qu’arrivé au montage, mince, ils se sont levé du pied droit, et donc rien ne va plus. Car The Crow : La Cité des Anges, première suite du grand film d’Alex Proyas, partait avec les meilleures intentions du monde. David S. Goyer est au scénario (en écrivant durant la production un certain Dark City, pour Alex Proyas), Tim Pope est embauché comme réalisateur, Marco Beltrami revient à la musique, tout le monde est d’accord pour s’éloigner le plus possible du film original par respect pour l’acteur, et tout simplement pour ne pas refaire la même chose et étendre l’univers.

Sauf que quand Tim Pope livre son montage aux frères Weinstein, déjà le métrage dure près de 3h, et il est trop éloigné du premier film. Du coup, le duo de frangins ordonne un remontage intégral, des coupes drastiques et le retournage de quelques séquences. Le réalisateur, ainsi que le scénariste d’ailleurs, claquent la porte, et voilà comment The Crow 2 se retrouve à passer de 3h à 1h25. Voilà comment stylistiquement, le film tente de ressembler au premier. Voilà comment on se retrouve avec un film qui des fois, prouve qu’il a quelques idées, les dévoile, puis les oublie, sans doute car le développement des dites idées est coupé au montage… Car dans les faits, le résultat final de The Crow 2 est bancal, pas totalement mauvais car cela reste un film de cinéma fait par une équipe compétente, mais insignifiant, car tentant beaucoup trop de refaire The Crow, au point d’accumuler les similitudes, et donc d’avoir parfois l’air d’être un remake avec moins d’argent et de savoir-faire. C’est d’ailleurs le constat principal après vision du métrage. Vincent Perez n’est pas Brandon Lee, la musique de Marco Beltrami n’est pas mauvaise mais n’égale pas son travail sur le premier film, la mise en scène a quelques idées mais celles-ci sont parfois saccagées par le montage qui accumule les effets de styles pour se donner un air cool, et le scénario a parfois des éclairs de génie, quelques pistes intéressantes, dans sa rapport à la mort, en mettant tout cela en parallèle avec la fête des morts, et en délocalisant l’aventure dans un Los Angeles limite post apocalyptique qui nous ferait presque croire que Snake Plissken va débarquer au détour d’une sombre ruelle, mais non, en coupant allégrement dans le lard, le scénario ne reste alors qu’une simple copie du film original. Le principal reproche que l’on pourra faire au métrage, outre son final raté abusant de CGI tout aussi ratés (1996 oblige), c’est que le film tel qu’il a débarqué sur nos écrans à l’époque n’est pas déshonorant en soit, mais totalement inutile.

Pas déshonorant pour toutes les raisons évoquées, mais pas que. Le scénario oui, en l’état, c’est quasi un remake du premier film, Vincent Perez remplaçant Brandon Lee, la vengeance pour la femme de sa vie étant remplacée par une vengeance pour son enfant. Mais par endroits, quelques idées pointent le bout de leur nez, comme lorsque notre héros rentrera dans une église et qu’on lui expliquera le concept de la fête des morts, pour renvoyer les esprits chez eux, avant que tous les occupants ne se tournent vers lui, conscients qu’il n’est pas dans son monde. Même chose lorsqu’après un dialogue avec Sarah (personnage issu donc du premier film, sorte de lien), notre héros s’interroge sur l’après vengeance, s’il doit retourner de là où il vient, et nous lancera subtilement qu’il aimerait peut-être rester dans le monde des vivants. Le conflit n’est pas inintéressant, mais ne mène à rien, et à force de coupes dans le montage, arrive un peu sans prévenir, sans justifications. Si la mise en scène émule parfois le premier film, avec des plans aériens simulant le vol du corbeau, une violence assez poussée, le fait de délocaliser le tout à Los Angeles change un peu l’identité graphique du métrage, avec des tons orangés, et des rues qui semblent issues d’un post apo. Même constat finalement pour le casting. Si le métrage ne fera jamais oublier le casting du premier film (pas que Brandon, mais aussi tous les autres, jusqu’à Tony Todd dans un minuscule rôle), il n’a pas à rougir, et quelques acteurs viennent cabotiner et se faire plaisir, comme Thomas Jane affublé d’une perruque et Iggy Pop souvent en roue libre. Pas mal d’éléments parfois sympathiques, et laissant parfois entrevoir le film que The Crow City of Angels aurait dû être. En l’état, ce n’est pas vraiment bon, mais pas honteux pour autant. Mais la saga ne s’arrête pas là…

LES PLUS LES MOINS
♥ Pas un film désagréable en soit
♥ On perçoit quelques idées ci et là
♥ Le casting semble s’amuser (Thomas Jane et Iggy Pop)
⊗ Un film charcuté
⊗ Beaucoup trop proche de l’original
⊗ Vincent Perez n’est pas Brandon Lee
note6
The Crow City of Angels, comme énormément de productions Miramax des années 90, a souffert d’une post production compliquée, réduisant le métrage de la moitié de sa durée et le changeant stylistiquement et thématiquement. On peut toujours percevoir des restes de ce qu’il aurait dû être, ainsi que quelques trouvailles intéressantes, mais du coup, la comparaison avec le film original est forcément présente, et ça ne joue pas en sa faveur.


Titre : The Crow : La Cité des Anges – The Crow City of Angels
Année : 1996
Durée :
1h24
Origine :
Etats Unis
Genre :
Fantastique
Réalisation :
Tim Pope
Scénario :
David S. Goyer d’après le comic de James O’Barr
Avec :
Vincent Perez, Mia Kirshner, Richard Brooks, Iggy Pop, Thomas Jane, Vincent Castellanos, Thuy Trang, Eric Acosta, Ian Dury et Tracey Ellis

The Crow: City of Angels (1996) on IMDb


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Auteur : Rick

Grand fan de cinéma depuis son plus jeune âge et également réalisateur à ses heures perdues, Rick aime particulièrement le cinéma qui ose des choses, sort des sentiers battus, et se refuse la facilité. Gros fan de David Lynch, John Carpenter, David Cronenberg, Tsukamoto Shinya, Sono Sion, Nicolas Winding Refn, Denis Villeneuve, Shiraishi Kôji et tant d'autres. Est toujours hanté par la fin de Twin Peaks The Return.
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