[Film] My Broken Mariko, de Tanada Yuki (2022)

Quand Tomoyo apprend aux informations la mort de son amie Mariko, elle n’en croit pas ses oreilles. Elles s’étaient pourtant vues la semaine précédente, sans que rien ne laisse présager un tel drame. Mariko, à la jeunesse brisée, qui lui vouait une admiration sans bornes et qui s’est vraisemblablement suicidée… Tomoyo ne contient pas sa rage : elle doit trouver un moyen de rendre un dernier hommage digne de ce nom à sa seule confidente.


Avis de Rick :
Sorti en Septembre 2022 au Japon et présenté en France au Kinotayo festival en Décembre de la même année, My Broken Mariko est l’adaptation d’un manga, par ailleurs paru en France, ce qui, de base, ne mettait pas forcément en confiance. Une adaptation qui arrive entre les mains de la réalisatrice et scénariste Tanada Yuki, qui a déjà brillée par le passé avec des films comme Romance Doll en 2020, ou plus éloigné, avec One Million Yen Girl en 2008. Un choix mettant immédiatement bien plus en confiance, surtout que les sujets abordés par le métrage sont loin d’être simple, puisque l’on y parle d’abus familiaux, de suicide, le tout alternant un ton dramatique très prononcé, et à quelques reprises, des petites notes d’humour qui sont loin de faire tâche en réalité, s’inscrivant parfaitement dans le parcours de notre héroïne, non pas Mariko, mais Tomoyo, meilleure amie depuis l’enfance de Mariko, et qui apprend durant la scène d’ouverture, alors qu’elle prend sa pause dans un restaurant, que Mariko s’est suicidée. Débute alors, entre les mains de la réalisatrice, un parcours pour Tomoyo, entre ses souvenirs pour nous apprendre plus sur Mariko, et sa quête, après avoir volé les cendres de son amie, pour enfin remplir sa promesse faite des années plus tôt, de l’emmener à la plage. D’entrée de jeu, My Broken Mariko met en avant ses thématiques sans détours, le voyage ne sera pas forcément de tout repos. Le suicide avec Mariko donc, mais également les violences familiales via les nombreux flashbacks de la jeunesse des deux jeunes femmes, sans oublier d’autres sujets toujours d’actualité, comme la pression dans le monde du travail, via l’entreprise dans laquelle Tomoyo travaille, où son patron la pousse toujours à de meilleurs résultats, l’appelle même pendant ses vacances, et n’a que faire de sa vie à côté.

Pourquoi pas, c’est ambitieux mais pourquoi pas. Ce qui est encore plus ambitieux, c’est de faire le choix de traiter de tous ces sujets via Tomoyo, et via donc le suicide de Mariko, sur une durée ultra concise de 1h25 générique inclus. Les pièges sont donc nombreux. Il y a le piège de passer à côté de son sujet, de rester à la surface des choses pour aller vite. Il y a le piège de se laisser aller à la facilité et de livrer donc une œuvre traitant maladroitement de sujets graves. Mais finalement, le film retombe presque miraculeusement sur ses pattes en faisant le choix de la simplicité, en collant au plus près de son personnage principal pour ne jamais la lâcher. C’est bien simple d’ailleurs, si Mariko est l’élément déclencheur, chaque flashback et fragment de vie de la jeune femme que le film nous offrira sera toujours accompagné de la présence de Tomoyo. Logique dans un sens, ce sont ses propres souvenirs de sa défunte amie, mais cela démontre surtout au final la direction du métrage. Cette logique et cette simplicité dans le propos sont déjà la première force du métrage. Tomoyo, interprétée par Nagano Mei (que l’on avait connu bien jeune dans Hard Revenge Milly Bloody Battle, Zebraman 2 ou encore le premier Kenshin), porte le film sur ses épaules, et va devoir véhiculer un certain nombre d’émotions au fur et à mesure de son périple. La tristesse bien évidemment, le choc lors de l’annonce du décès de Mariko. La nostalgie lorsqu’elle se remémore des moments de joie semblant bien futiles et anodins, la colère face à sa propre impuissance, puisqu’elle aura tenté à de maintes reprises de relever son amie. La colère face aux autres également, notamment le père de Mariko, qui abusait d’elle, et chez qui elle se rendra pour voler les cendres de son amie et entreprendre son voyage avec. Voyage finalement autant là pour remplir une vieille promesse donc, mais également un voyage initiatique pour elle-même, pour apprendre à avancer.

Fait plutôt intéressant, le film parvient à garder une tonalité plutôt légère de manière générale et ce malgré les sujets abordés. Cela se fait parfois avec des petits riens, comme la trouvaille des vieilles chaussures sentant le moisi. Et parfois avec même des personnages prenant de l’importance dans le récit, comme ce pêcheur que Tomoto rencontrera à maintes reprises, et qui l’aidera à se relever, quoi qu’il arrive. Ce qui paraitra plus étonnant, c’est que le film semble vouloir rester neutre vis-à-vis d’énormément de sujets abordés au fur et à mesure de la courte aventure. Un peu comme s’il préférait tout simplement nous livrer des petits moments simples, des petits doutes face à de grands bouleversements, mais préférait jouer sur la simplicité plutôt que de nous donner une réponse claire et nette, qui satisferait, ou non d’ailleurs, le spectateur. Un choix qui pourra surprendre, mais qui pourtant donne un petit cachet au métrage, et qui permet de passer 1h25 en compagnie de Tomoyo, et accessoirement de Mariko, de comprendre les peines et doutes des personnages, et d’en sortir satisfait, satisfait du voyage proposé qui interroge sans vouloir nous enfoncer des idées à coups de marteau. C’est simple, c’est beau, les moments dramatiques fonctionnent, et on n’en demandait pas vraiment plus en réalité. Il ne marquera peut-être pas, de par son absence de solution, de point de vue marqué, mais sur le moment, ça fonctionne, en plus de faire voyager vers de beaux paysages.

LE MEILLEUR LE PIRE
♥ Très bon casting
♥ On croit à l’amitié entre Tomoyo et Mariko
♥ Mise en scène simple et posée
♥ Des thématiques variées
♥ Un film court
⊗ Le côté simpliste ne plaira pas à tous
note7
My Broken Mariko est un film simple, traitant de sujets graves avec une certaine légèreté qui fait passer 1h25 agréable, en nous questionnant sur de nombreux sujets, et en faisant voyager.


Titre : My Broken Mariko / Mai Burôkun Mariko / マイ・ブロークン・マリコ
Année : 2022
Durée :
1h25
Origine :
Japon
Genre :
Drame
Réalisation :
Tanada Yuki
Scénario :
Tanada Yuki et Mukai Kôsuke
Avec :
Nagano Mei, Honda Nao, Kubota Masataka, Omi Toshinori, Yoshida Yô et Jun’ya
My Broken Mariko (2022) on IMDb


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Auteur : Rick

Grand fan de cinéma depuis son plus jeune âge et également réalisateur à ses heures perdues, Rick aime particulièrement le cinéma qui ose des choses, sort des sentiers battus, et se refuse la facilité. Gros fan de David Lynch, John Carpenter, David Cronenberg, Tsukamoto Shinya, Sono Sion, Lucio Fulci, Nicolas Winding Refn, Denis Villeneuve, Shiraishi Kôji et tant d'autres. Est toujours hanté par la fin de Twin Peaks The Return.
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