[Film] Trop Belge pour toi, de Ann Sirot, Raphaël Balboni, Pablo Muñoz Gomez, Méryl Fortunat-Rossi, Xavier Seron (2019)


Un poulailler qui provoque un incident diplomatique, une enfant qui tombe du ciel, un père noël capitaliste, un plombier déluré à l’accent flamand et un ours tueur : Le meilleur de la Comédie belge. Cinq courts métrages multi-primés dans le monde.


Avis de Cherycok :
Une fois n’est pas coutume en ce qui me concerne, nous allons nous intéresser non pas à un film, mais à une sorte d’anthologie qui n’en est pas réellement une. Trop Belge pour toi est en fait un « programme » composé de cinq courts métrages ayant été plusieurs fois primés dans les divers festivals par lesquels ils sont passés. A la différence d’une anthologie, aucun fil conducteur ici, pas même une thématique commune entre eux, juste cinq courts d’humour belges. 1h17 au compteur, moins si on passe les génériques de chacun, donc même si ce genre d’exercice n’est habituellement pas mon truc, c’est vite vu. Grand bien m’en a pris car j’ai totalement adhéré à cet humour belge souvent improbable qui, à n’en pas douter, risque clairement de diviser.

Le premier de ces courts métrages s’appelle Welkom. Il est ici question d’un jeune homme qui s’occupe de son vieux père qui est persuadé que la petite poule blanche à la maison est sa femme. Son fils décide de lui construire un poulailler mais il faut, semble-t-il un permis. Alors qu’il se rend dans une administration afin de l’obtenir, on lui fait comprendre que, comme son jardin se trouve dans les Flandres, il n’a d’autre choix que d’apprendre à parler le flamand, lui qui galère déjà avec son père qui ne parle qu’espagnol. Welkom questionne sur les fractures administratives et culturelles qui divisent la Belgique (avec d’un côté les Flamands et de l’autre les Wallons). Il traite également des maladies du genre Alzheimer, mais l’ensemble sera évoqué avec un humour complètement absurde, voire improbable, et ce que cela peut amener comme moment de gêne. Une poule qui se retrouve à avoir besoin d’un permis de séjour, il fallait oser. Les acteurs sont absolument géniaux, et l’humour complètement décalé colle parfaitement à la thématique.

Thelma, le deuxième court métrage du programme, va mettre en scène un couple d’homosexuels qui va devoir s’occuper d’une petite fillette de deux ans et demi. En effet, le frère de l’un d’eux se retrouve bloqué en vacances et n’est pas en mesure de la récupérer. Ils se retrouvent donc confrontés avec les problèmes habituels des couples qui ont un enfant en bas âge alors qu’ils n’ont pas du tout l’habitude de tout ça. Thelma est le court le plus minimaliste du lot, mais c’est aussi le plus attendrissant, avec cette petite fillette toute mignonne qui va faire naitre chez ce couple une envie de paternité. Le tournage avec la petite fille de deux ans et demi semble avoir été souvent en totale improvisation et, du coup, le rendu à l’écran semble plus vrai que nature. Un petit court léger, frais, tout mignon et plein de tendresse, mais qui n’oublie pas un humour très léger qui ne le quittera jamais, jusque dans son générique de fin.

Le troisième court, Kapitalisis, est sans doute le plus « acide » dans le sens où il critique le capitalisme et la stupidité du matérialisme. On y suit un immigré grec qui, pour faire plaisir à son fils à Noël, cherche à lui acheter un superbe sac à dos. Prix de la chose, 180€. Sauf que quand on a un emploi de livreur de pizza à mi-temps, difficile de réunir une telle somme. Il se met donc à enchainer les petits boulots, comme promeneur de chiens pour personnes âgées, plateau humain pour amuse-bouche pour des soirées de la haute, … A nouveau ici, le casting est tout bonnement excellent, avec entre autres un pétage de plomb improbable qui pourrait bien rester dans les annales. C’est à nouveau bien décalé en termes d’humour, un humour qui vire au cynique lors de son final mais qui nous montre l’imbécilité et l’absurdité du monde dans lequel nous vivons. C’est en tout cas très réussi bien que le message soit un peu facile.

Le quatrième court de cette sélection, Le Plombier, est sans doute le plus improbable et se définit lui-même dans son écran titre comme une comédie « érotico-acoustique ». Tourné en noir et blanc, on suit Tom, un comédien flamand, spécialiste des doublages de dessin-animé, qui se retrouve dans un studio de doublage de film pornographique. Le réalisateur va prendre un malin plaisir à faire des gros plans sur les bouches des doubleurs, en jouant beaucoup avec les bruitages buccaux, les cris. Il va s’amuser des clichés des scénarios des films de cul. Le Plombier a un côté complètement improbable et décalé dans lequel les acteurs vont plonger sans sourciller. On retrouve l’excellent Tom Audenaert (Yummy, Hasta la Vista) et une fois de plus, il est parfait avec sa tête de simplet. C’est un peu trash, à fond dans l’autodérision, mais toujours très amusant dans la manière dont c’est amené. L’extrait du résultat final est absolument parfait et bien représentatif des doublages souvent foireux des films pornographiques. Peut-être le plus faible du lot mais néanmoins un très bon moment.

Enfin, L’Ours Noir, cinquième et dernier court métrage de Trop Belge pour toi, verse, lui, dans le non-sens total. On suit un groupe de campeurs qui se promène dans une forêt québécoise. Mais ils n’ont pas lu les règles élémentaires en matière d’ours et vont se retrouver rapidement confronté à un bien étrange spécimen d’ursidé. L’Ours Noir est le court métrage le plus absurde du lot. On y retrouve certains acteurs des précédents courts et ça va aller à fond dans le n’importe quoi. Ça verse sans vergogne dans l’ultra gore exagéré façon Le Chevalier Noir du sacré Graal des Monty Python et cette « fantaisie bucolique » est tout bonnement à mourir de rire pour qui sait apprécier ce genre de spectacle où l’hémoglobine coule à flot mais de façon grotesque. Rien que son ours en peluche géant et sa voix-off aux forts relents du Québec profond valent leur pesant de cacahuètes. A n’en pas douter, certains n’adhèreront pas au délire, mais c’est tellement con que ça en devient génial.

LES PLUS LES MOINS
♥ Très bon casting sur l’ensemble
♥ Court et rythmé
♥ Très drôle si on adhère
♥ Le délire assumé
⊗ Il faut adhérer à l’humour…
Trop Belge pour Toi divisera clairement son public tant les cinq courts métrages qui le composent vont à fond dans cet humour belge très particulier. A la fois décalé, absurde, grinçant et non-sensique, mais surtout très drôle, il n’aura en tout cas pas été trop belge pour moi.

LE SAVIEZ VOUS ?
• Quatre des courts métrages eux ont reçu un Magritte, l’équivalent belge des César. Tous ont collectionné les prix dans les divers festivals par lesquels ils sont passés.


Titre : Trop Belge pour Toi
Année : 2019
Durée : 1h17
Origine : Belgique
Genre : Une fois n’est pas coutume
Réalisateur : Ann Sirot, Raphaël Balboni, Pablo Muñoz Gomez, Méryl Fortunat-Rossi, Xavier Seron
Scénario : Ann Sirot, Raphaël Balboni, Pablo Muñoz Gomez, Méryl Fortunat-Rossi, Xavier Seron

Acteurs : Jean-Benoit Ugueux, Catherine Salée, Wim Wallaert, Jean-Jacques Rausin, Georges Siatidis, Jean Le Peltier, Vincent Lecuyer, Tom Audenaert

 Trop Belge pour toi (2019) on IMDb


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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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