[Film] Le Mercenaire, de Sergio Corbucci (1968)


À la veille de la Révolution mexicaine, dans une mine victime d’une mutinerie conduite par Paco Roman, un employé qui a fait exécuter les contremaîtres et humilier le responsable Alfonso Garcia, les propriétaires souhaitent cacher sept tonnes d’argent. Ils embauchent un mercenaire, le Polak, réputé pour ses qualités de tireur et pour avoir humilié un employé du casino tenu par Curly, lequel se lance à sa poursuite


Avis de Cherycok :
J’adore depuis très longtemps les western spaghettis, bien plus que les westerns américains. Mais comme beaucoup, je me suis essentiellement contenté des classiques qui ont maintes fois été diffusés à la télévision tels que la trilogie du dollar de Sergio Leone. Il y a quelques années, je me suis donc intéressé dans la découverte d’autres classiques du genre, me lançant dans des Django, Le Grand Silence, Colorado et autres Sabata, afin d’avoir toutes les bases avant de pousser dans des titres plus confidentiels, plus bis parfois. Mais il m’en manque encore beaucoup car les réalisateurs italiens ont été très prolifiques dans les années 60 et 70 en matière de western et donc je continue à mon rythme mon exploration des filmographies de Sergio Sollima, Enzo G. Castellari, Antonio Margheriti, Tonino Valerii, et bien entendu, celle de Sergio Corbucci, le papa de Django. Alors nous allons parler aujourd’hui de Il Mercenario (1968), sorti chez nous sous le titre Le Mercenaire, un film à la très bonne réputation, bien méritée.

Le Mercenaire est un western qui va prendre pour toile de fond le Mexique du début du 20ème siècle et ses révolutions comme ont pu le faire bien d’autres films à la même période. On pourrait par exemple citer Il Était une Fois la Révolution, Les 100 Fusils ou encore El Chuncho. Ils font d’ailleurs partie d’un sous genre bien précis du western appelé le « western Zapata », en référence à Emiliano Zapata Salazar, un des principaux acteurs de la révolution mexicaine de 1910. Le Mercenaire est d’ailleurs le premier opus d’une trilogie mexicaine axée sur la révolution, avec Compañeros (1970) et Mais Qu’est-ce que je Viens Foutre au Milieu de cette Révolution ? (1972), eux-aussi réalisés par Sergio Corbucci. On va sortir ici un peu de l’univers classique du western spaghetti, bien qu’on y reste malgré tout grâce à tous les codes habituels qui y sont présents. Je veux dire par là que, étant donné que l’action se situe au début du 20ème siècle, il y a un peu plus d’avancée technologique qu’à l’accoutumée puisque ce sont les débuts des voitures mais aussi de l’aviation. Ce qui change aussi, c’est le contexte social dans lequel le film évolue. Outre le fond donc, la révolution mexicaine, il va être ici question d’un brave ouvrier qui sait à peine compter sur ses dix doigts qui va croiser la route et faire équipe avec un étranger (un polonais), représentant l’individualisme absolu, qui va le manipuler pour l’argent, mais qui vont malgré tout lutter contre les pouvoirs en place bien établis qui mènent la vie dure à la population locale. Un schéma somme toute assez classique pour le genre, mais qui va être magnifié par Sergio Corbucci tant tout est ici vraiment réjouissant, de la mise en scène au jeu d’acteur, en passant par les scènes d’action, la musique ou encore ce léger humour qui ne quitte pas le film. Oui, clairement, Le Mercenaire est une grande réussite.

Le scénario file à cent à l’heure et les péripéties de notre improbable duo vont s’enchainer, d’attaque de banque en carnaval qui dégénère. Tout est bon pour notre groupe de chicanos, menés par ce « polack », pour aller dégommer du soldat de l’oppresseur au nom de la révolution et de la liberté. Les rebondissements sont légion, les morts nombreux, ça dézingue dans tous les sens, et l’ensemble est réellement réjouissant tant la bonne humeur qui se dégage du film est communicative. Corbucci s’éclate avec sa caméra qui virevolte de partout lorsque l’action est présente, toujours de manière maitrisée. Lors des moments plus calmes, il arrive à immédiatement mettre en valeur les décors désertiques du sud de l’Espagne et certains plans sont tout bonnement superbes. Certaines scènes sont d’une poésie macabre et gothique à l’instar de celle de l’arrivée dans la mine. Même chose lorsqu’il s’agit de magnifier les personnages, avec ces gros plans sur les visages ou les regards des acteurs qui se donnent à fond et qui signent ici de très belles performances. Bien que le rôle de Franco Nero soit moins marquant que celui de Django, il reste néanmoins très charismatique et assez fascinant. Dommage que certains seconds rôles, tel que celui de Jack Palance, soient un peu mis en retrait et, du coup, manquent un peu de profondeur. Néanmoins, Le Mercenaire va nous donner son lot de scènes réellement marquantes, que ce soit dans l’action avec ces différents carnages à la mitrailleuse lourde, ou d’autres moments plus posés comme cette discussion matinale sur le parallèle entre les riches / les pauvres et la tête / les fesses. Et puis comment ne pas parler du premier final dans l’arène, sublimé par le thème du film, L’Arena, composé par Ennio Morricone, qui semble faire écho à celui de Et Pour Quelques Dollars de Plus. Non, vraiment, Le Mercenaire est un très bon western spaghetti.

LES PLUS LES MOINS
♥ Bien mis en scène
♥ Très bien rythmé
♥ Franco Nero
♥ La bande son
♥ Le sous-texte
⊗ Certains personnages pas assez développés
Bien ficelé, interprété, rythmé, mis en scène, le tout avec une superbe photographie et une musique envoutante d’Ennio Morricone, Le Mercenaire fait partie du haut du panier de la filmographie de Sergio Corbucci. A n’en pas douter, un des meilleurs western zapata.

LE SAVIEZ VOUS ?
• Le thème du film, L’Arena, composé par Ennio Morricone, a ensuite été réutilisé par Quentin Tarantino dans Kill Bill : Volume 2 (2004).

• La version originale du scénario a été écrite par Franco Solinas et Giorgio Arlorio, et s’inspire largement de « L’exception et la règle » de Bertolt Brecht. Gillo Pontecorvo était le réalisateur prévu. Le scénario a cependant été largement réécrit par Luciano Vincenzoni et plusieurs autres personnes, qui ont reconçu le film comme un western spaghetti basé sur la révolution mexicaine. Solinas et Arlorio ont désavoué le nouveau scénario et Pontecorvo s’est retiré de la réalisation, estimant qu’il n’avait pas assez d’expérience des westerns. Il réalise alors Queimada (1969), un film au concept similaire. Alberto Grimaldi engage alors Sergio Corbucci comme réalisateur en raison de son expérience des westerns spaghetti.

• Pendant le tournage, l’équipe a aperçu ce qui semblait être un OVNI. Ils l’ont filmé et ont envoyé des photos à la NASA, qui a été impressionnée par les résultats, mais cette découverte n’a pas eu de suite.



Titre : Le Mercenaire / El Mercenario / Il Mercenario
Année : 1968
Durée : 1h50
Origine : Italie / Espagne
Genre : Viva la revolucion !
Réalisateur : Sergio Corbucci
Scénario : Franco Solinas, Giorgio Arlorio, Luciano Vincenzoni

Acteurs : Franco Nero, Tony Musante, Franco Giacobini, Eduardo Fajardo, Franco Ressels, Giovanna Ralli, Jack Palance, Alvaro de Luna, Raf Baldassarre, Joe Kamel

 Le mercenaire (1968) on IMDb


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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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