[Film] Strange Door and Dark Blade, de Chris Huo (2022)


Pendant la période de paix des Song et des Liao, Tang Ziyan, un agent formé à l’origine par l’organisation secrète « Phoenix Fire Army », est affecté au département de la ville impériale à Pékin. Alors que Tang Ziyan souhaitait quitter tranquillement son poste et passer le reste de sa vie avec son mari Zhou Qian, ce dernier est enlevé par l’Armée du Feu du Phénix pour menacer Tang Ziyan. Cette dernière se voit maintenant confier une nouvelle mission par l’armée : Assassiner l’envoyé en visite de la dynastie du Nord.


Avis de Cherycok :
On le dit à chaque fois mais Chris Huo est un réalisateur de DTV chinois qui à chaque film confirme qu’il est au-dessus de la masse. C’est très simple, demandez à n’importe quel amateur de la chose de faire son top 10 des DTV chinois, et vous êtes sûrs d’y retrouver des films de sa filmographie. Des films tels que Blind War (2021), The Sniper (2021) ou King of Snipers (2023) sont réellement bons et n’ont pas à rougir de la comparaison avec leurs homologues hongkongais de la période de l’âge d’or. Jusqu’à présent, je ne m’étais intéressé qu’aux films contemporains de sa filmographie, mais Chris Huo a bien plus œuvré dans le genre du wu xia pian avec les sagas Demon Department (4 films) et Martial Universe (2 films), ainsi que d’autres films one shot tels que The Last Wulin 2 (2018) ou le Strange Door and Dark Blade (2022) qui nous intéresse ici. Nous sommes ici dans du wu xia pian fantasy, avec une enquête lorgnant vers le fantastique comme la célèbre série des Detective Dee, et le résultat, bien qu’imparfait, est sincèrement des plus plaisants et prouve que, oui, si on lui donner un gros budget et qu’on le sortait des contraintes du DTV pour ls streaming, Chris Huo pourrait vraiment se lâcher et nous pondre de bons gros divertissements réussis.

Dès les premières images, on constate que Huo a toujours un aussi grand sens de l’esthétique, aussi bien au niveau des couleurs que de la composition des plans, souvent superbes. On sent un réalisateur impliqué qui a envie que la reproduction d’époque soit la plus juste esthétiquement parlant. Les costumes sont beaux, les décors sont beaux, et à part quelques CGI en deçà, dont certains fonds verts assez moches (on y reviendra plus bas), et quelques effets parfois un peu clipesques s’inspirant du cinéma de Wong Kar-Wai, il n’y a pas grand-chose à redire. Il en résulte des affrontements souvent de grande qualité visuellement parlant, avec des ralentis stylisés quand ille faut pour accentuer certains mouvements / coups, une caméra énergique et un résultat toujours lisible et du plus bel effet. Les chorégraphies sont travaillées. Chris Huo est un artiste martial (il a longtemps pratiqué plusieurs disciplines) et il s’entoure toujours d’une équipe qui sait de quoi elle parle lorsqu’il faut mettre en scène de l’action. C’est beau, c’est rapide, c’est intense, et certains combats sont parmi les meilleurs qu’on ait pu voir dans un DTV chinois (même si je suis loin d’avoir tout vu), rivalisant presque avec les wu xia pian hongkongais des années 90. Difficile de dire si les acteurs principaux sont de véritables artistes martiaux (c’est parfois compliqué de chercher des informations sur tous ces acteurs chinois) mais une chose est sûre, c’est que Huo a fait du bon boulot avec eux. Liu Yong-Xi (Hua Mulan, Legend of Magic Jade), qui incarne le personnage principal, est une actrice plutôt talentueuse et elle est entourée d’une foule d’acteurs-trices assez charismatiques qu’on arrive à reconnaitre de plus en plus dans la masse d’acteurs chinois souvent lisses et interchangeables. On est content de retrouver Yang Xing, une habituée du réalisateur puisqu’elle est récemment apparue dans Blind War et The King of Snipers de Huo.

Le schéma scénaristique de Strange Door and Dark Blade est assez classiques, avec son lot de machinations, de retournements de situation, de la politique (légère), de la traitrise, de la vengeance, du mystère, … La formule pourrait paraitre aujourd’hui démodée sur le papier car déjà vue et revue maintes fois, mais cela fonctionne malgré tout encore très bien car le film maintient son intrigue jusqu’à la fin (qui se cache derrière ce mystère). Les personnages sont suffisamment caractérisés pour qu’on s’y attache rapidement et, une fois la bobine finie, on se dit qu’on verrait bien une suite avec les mêmes personnages (du moins ceux qui survivent). Strange Door and Dark Blade vire au fantastique (même si en fait non) dans sa toute dernière partie, avec toutes les problématiques de CGI que cela va impliquer. On grince parfois des dents car ce cinéma chinois de DTV a malgré tout encore pas mal de progrès à faire à ce niveau (ou alors il leur faut plus d’argent) et pour une scène aux bons CGI, on en a une autre assez dégueulasse. Si on arrive à outrepasser l’aspect parfois un peu cinématique de jeu vidéo de cette dernière partie car niveau imagination, c’est plutôt efficace avec son système d’illusions créées par des miroirs. On finit rapidement par s’y habituer et il faut avouer que l’ensemble demeure assez rafraichissant dans la façon dont le film contourne la censure chinoise sur le fantastique. Chris Huo nous pond un film sincère, qui cherche à divertir le spectateur et qui y arrive haut la main. Dommage que certaines questions restent sans réelle réponse. Par exemple, cette armée de feu du Phoenix est l’élément central du film, mais elle est un peu floue. Qu’est-ce que réellement cette armée, quelles sont ses réelles motivations ou les réelles raisons de leur vengeance ? C’est parfois assez confus. Il est à noter que Chris Huo semble s’être pas mal inspiré du cinéma d’action japonais en costumes, ne serait-ce que justement par certains costumes très japonais de son film (l’impératrice, certains chapeaux, certains symboles) ou la façon dont certains combattants manient leur sabre à la façon de samouraïs (bien que je ne sois pas spécialiste du genre). Même le look de la créature à multiples bras pourrait renvoyer à un boss vu dans la série de jeux vidéo Samurai Shodown. Chris Huo n’a jamais caché avoir diverses inspirations pour ses films, un peu partout à travers le monde, et il y a de grandes chances que le Japon ait joué un rôle dans celui-ci.

LES PLUS LES MOINS
♥ Un scénario simple et efficace…
♥ Visuellement réussi
♥ De très bonnes scènes d’action
♥ Un casting charismatique
⊗ … mais pas assez développé
⊗ Des CGI pas toujours au top

Bien qu’il soit en deçà d’un Blind Sword, Strange Door and Dark Blade est un wu xia pian honnête, efficace et rafraichissant. Chris Huo est un bon artisan, ses films se détachent de la masse et il le prouve une fois de plus ici.



Titre : Strange Door and Dark Blade / Qimen Dark Blade / 奇门暗刃
Année : 2022
Durée : 1h35
Origine : Chine
Genre : Wu xia pian fantasy
Réalisateur : Chris Huo
Scénario : Tao Lei, Ma Guang, Xin Zhuan Gu Shi

Acteurs : Liu Yong-Xi, Hank Qi Sheng-Han, Henry Zhao Ren, Yumiko Cheng, Du Yu-Ming, Zhang Chun-Zhong, Xu Ning, Yang Xing, Sun Zi-Jun, Cheng Tao, Zhao Wen-Qi

Qimen Dark Blade (2022) on IMDb


5 1 vote
Article Rating

Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
S’abonner
Notifier de
guest

0 Commentaires
Inline Feedbacks
View all comments