[Film] Prey, de Dan Trachtenberg (2022)

En 1719, dans une tribu de Comanches, la jeune Naru veut à tout prix devenir une guerrière. Mais les traditions ancestrales de son peuple l’en empêchent. La jeune femme est malgré tout très proche de son jeune frère, Taabe, qui est amené un jour à diriger la tribu. Naru se sent aussi forte qu’un homme et va pouvoir le prouver quand un grand danger, le Predator, menace la tribu


Avis de John Roch :
A son annonce, Prey avait de quoi faire peur tant la saga Predator a été malmenée par la Fox. En dehors du classique de John Mac Tiernan et, bien qu’elle divise, de sa suite qui envoyait le Predator traquer des gangs de Colombien, de rastas adeptes du Vaudou, et Danny Glover dans un environnement urbain, ça s’est plutôt bien planté par la suite. Il y a eu Predators, métrage tout sauf mémorable à mi-chemin entre le remake et des idées qui frôlaient le ridicule (les chiens Predator, le combat avec le yakuza). Puis il y a eu The Predator, film super généreux en action mais catastrophique au point d’en devenir énervant. Passons sous silence le cross over avec le Xenomorphe dans deux Aliens vs. Predator qui ne méritent aucune considération tant ces deux films ont été un crachat sur la gueule des deux icones de la pop culture. Après ces quatre métrages, difficile d’attendre quoi que ce soit de la saga, de plus Prey faisait également peur pour d’autres raisons : exit les salles de cinéma pour une diffusion exclusive sur Disney+, peur que le studio aux grandes oreilles ne viennent mettre son grain de sel dans la production ( ce qui pour le moment semble ne pas être le cas d’ordre général, Disney ayant visiblement fait la part des choses entre son empire et Hulu, la branche « adulte » de la firme), et la présence à la mise en scène de Dan Trachtenberg qui signe son second long métrage après le très moyen 10 Cloverfield Lane. Et pourtant, Prey est une très grande surprise qui aurait mérité une sortie en salle, une réussite inattendue qui redore le blason du chasseur extra-terrestre.

La première qualité de Prey, c’est de ne rien vouloir amener à Predator en terme d’idées censé renouveler la saga ou exploiter l’univers de celle-ci. Ici, point de nouvelle idées tel qu’une planète Predator, un super Predator, ou d’une alliance avec des humains car l’ennemie de son ennemie est son ami. Non, Prey amorce un retour aux sources en dégraissant la mythologie Predator afin de se rapprocher de ce que proposait le premier opus qui fête cette année ses 35 ans. Prey se déroule en 1719 et à pour héroïne Naru, jeune femme guerrière qui veut rejoindre les chasseurs de sa tribu Commanche à condition de prouver sa valeur en passant un rituel. L’occasion, elle va l’avoir quand un Predator arrive sur terre pour chasser ce qu’il considère comme des prédateurs jusqu’à trouver un gibier à sa mesure. Avec un Personnage principal féminin face à un être d’un autre monde venu chasser sa tribu, il y avait de quoi craindre un piège dans lequel fort heureusement Prey ne tombe pas : l’actualité. Il aurait été facile de faire de Natu une figure du féminisme post-#metoo et du Predator une figure de l’oppression sur les minorités. Un piège grand ouvert que Dan Trachtenberg et son scénariste Patrick Aison ont su éviter en caractérisant son héroïne et son antagoniste de manière simple mais efficace. Non, Natu ne peut pas rejoindre les chasseurs parce qu’elle est une femme, elle doit prouver sa valeur et en ce sens Prey est autant un survival qu’un récit initiatique. Quant au Predator, qui a subi un Leger lifting cependant loin d’être dégueulasse, est à l’image des Européens qui ont découvert l’Amérique, il se retrouve en terre inconnu et apprend à connaitre son environnement. L’autre piège dans lequel Prey n’est pas tombé, c’est le fan service. Il y a bien un plan ainsi qu’une phrase culte qui renvoient à Predator premier du nom, et un easter egg final pas nécessaire mais en dehors de ça, Prey ne cherche jamais à taper du coude le spectateur ou à jouer sur un quelconque effet de nostalgie. En ce sens Prey est un film qui fait plaisir, il a bien été produit pour capitaliser sur une figure majeure de la pop culture, mais Dan Trachtenberg ne cède jamais (du moins quasiment jamais) aux facilités inhérentes à ce genre de retour de saga qui plombent Hollywood depuis trop longtemps.

Dans le fond, Prey n’est certes pas révolutionnaire mais semble avoir été tourner à une époque où les producteurs laissaient les mains libres aux réalisateurs. Dans la forme, le métrage est classique, mais d’une excellente efficacité. Classique dans son déroulement, on suit en parallèle Natu dans sa quête initiatique et le Predator dans sa chasse de la faune locale jusqu’à l’inévitable rencontre ou les rôles de chasseur et de chassé vont s’inverser. Dans sa structure, Prey ressemble à Predator ainsi que dans son rythme : une première heure qui prend son temps sans pour autant être chiante (c’est même tout le contraire) et un dernier tier qui passe dans l’action, ici dès l’introduction de colons Français (visiblement joué par des Québécois) qui vont se faire massacrer par paquet de 12. Un classicisme partagé avec le premier opus de la saga, mais bien que Prey dans le fond ressemble à Predator, il s’en affranchit suffisamment pour ne pas être une pâle copie, en plus d’être techniquement solide. La photographie de jeff Cuter, déjà au poste avec Dan Trachtenberg sur 10 Cloverfield Lane, est superbe. Des décors naturels sublime aux scènes nocturnes qui le sont tout autant, en passant par une scène plongée en pleine brume, Prey est un spectacle qui régale les yeux. La mise en scène est également superbe, Dan Trachtenberg alterne des plans iconisant le Predator comme il ne l’a jamais été depuis le second volet, d’autres un peu plus contemplatifs de toute beauté et livre des scènes d’action toujours lisibles, qu’elles soient tournées en séquences dont le montage est tout aussi réussi que le reste de l’aspect technique, ou en plans séquence. Si Prey est une réussite il n’est pas sans défauts, mineures au final car il s’agit des CGI. La faune locale que chasse le Predator : loup, lapin, serpent, ours et autres membres du casting qui volent sous les coups du Predator manquent la plupart du temps de finition. On pourra aussi reprocher, indépendamment de la qualité du métrage, que Prey ne sorte pas dans les salles de cinéma. Car voir ce qui est avec Predator 2 ce que la saga a fait de mieux, après avoir été trainée dans la boue à plusieurs reprises, uniquement sur la petite lucarne ne rend pas justice à ce Prey qui redore le blason du Predator. Et vu la qualité du métrage, ne serait-ce que plastique, il y a une certaine frustration qui émerge, tant Dan Trachtenberg a tout fait pour que Prey soi un retour au source qui sauve la saga Predator non seulement en signant ce qui est ce qu’il s’est fait de mieux dans la saga avec les deux premiers métrages, mais aussi en remettant avec respect le Predator sur le devant de la scène.

LES PLUS LES MOINS
♥ La mise en scène
♥ La photographie
♥ Un film qui évite de tomber dans les pièges Hollywoodiens actuels
♥ Des décors naturels superbes
♥ Des scènes d’action bien foutues et gore
♥ Un scénario qui évite de basculer dans l’actualité et dans le fan service à outrance…
♥ Amber Midthunder, charmante et appliquée dans son rôle
⊗ Les animaux en CGI
⊗ Le gore en CGI
⊗ … sans toutefois échapper à un easter egg trop forcé
Prey ne sera peut-être pas le film de l’année, mais il sera sans soute la surprise de l’année. Dan Trachtenberg réussi non seulement ce qui s’est fait de mieux dans l’univers de Predator depuis les deux premiers films, mais réussi également à faire oublier toutes les suites d’une saga dont la renaissance de ses cendres était loin d’être gagnée. Coup de cœur, vraiment.



Titre : Prey
Année : 2022
Durée : 1h39
Origine : U.S.A
Genre : Predator, dans un bon film!
Réalisateur : Dan Trachtenberg
Scénario : Patrick Aison

Acteurs : Amber Midthunder, Dakota Beavers, Dane DiLiegro, Stormee Kipp, Michelle Thrush, Julian Black Anterlope, Stefany Mathias, Bennett Taylor

 Prey (2022) on IMDb


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Auteur : John Roch

Amateur de cinéma de tous les horizons, de l'Asie aux États-Unis, du plus bourrin au plus intimiste. N'ayant appris de l'alphabet que les lettres B et Z, il a une nette préférence pour l'horreur, le trash et le gore, mais également la baston, les explosions, les monstres géants et les action heroes.
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