Tai Hang Shan Shang raconte trois années de combats violents dans les montagnes de Tai Hang.
Avis de Laurent :
Enfin une grosse production ambitieuse made in China qui impressionne au niveau du spectacle, des décibels et de la pyrotechnie. On the Mountain of Tai Hang (ou Tai Hang Shan Shang) raconte trois années de combats dans les montagnes de Tai Hang entre 1937 et 1940 où l’armée chinoise terrassa enfin le terrible envahisseur japonais. La sortie de ce blockbuster militaire coïncide avec le 60ème anniversaire de la fin de la guerre sino-japonaise (1938-1945), de ce fait on peut déjà prendre cette réalisation avec des pincettes tant ça pue le révisionnisme et la propagande progouvernementale (l’analyse d’un spécialiste géopolitique de la région serait la bienvenue). La sortie de Tai Hang Shan Shang en a surpris plus d’un puisque personne ne l’avait vu venir. Produit essentiellement formaté pour le spectateur mainland et un cast encore obscur en dehors de Chine, la seule présence du très bon Tony Leung Ka-fai (Prison On Fire, L’amant et bientôt dans The Myth et Election) suffit déjà à attirer notre curiosité.
En prenant un peu de recul on pourra déjà s’attarder sur la qualité première de Tai Hang Shan Shang, à savoir sa facette actionner guerrier et bourrin. De ce point de vue-là, le spectateur en a pour son argent tant les scènes de combats (si l’on fait abstraction des nombreux effets spéciaux numériques approximatifs) sont monstrueuses et techniquement ambitieuses (à défaut d’être réussies). Pas qu’elles soient bien filmées (c’est souvent confus) mais elles impressionnent de par la figuration bien chargée (on appréciera les plans aériens sur les batailles en pleine montagne). Il est question de 100 tonnes d’explosifs, 8 000 armes et 100 000 figurants. Les techniciens chargés de la pyrotechnie ont vraiment fait du bon travail avec une énorme synchronisation sur un espace très vaste à gérer. Il est dommage que cette prouesse soit en partie gâchée par des ajouts numériques vraiment moyens surtout lorsque l’on voit le niveau actuel dans le domaine. Lors de ces scènes sanglantes, aucun personnage n’est réellement mis en valeur à l’écran car le véritable personnage central de ces scènes de batailles est la marée humaine chinoise. C’est le collectif qui fait la force. Ce parti pris est gênant pour s’identifier à la situation et s’impliquer davantage. On n’apercevra que trop furtivement (même pas 20 secondes) le trop attendu Tony Leung Ka-fai en sabreur manchot découpant du japonais à la baïonnette. Dommage.
Ce qui contraste avec les impressionnantes reconstitutions guerrières, c’est le rendu des scènes de remplissage entre deux batailles. On passe d’un projet ambitieux et soigné à la pellicule irréprochable à des scènes qui semblent venir directement de l’univers télévisuel. C’est vraiment étrange et vu l’ampleur de la production ce n’est pas par manque de moyen mais par choix artistique. Et c’est justement ces passages qui viennent plomber ce Tai Hang Shan Shang puisqu’elles vont appuyer son message douteux. En effet, alors que nombre de soldats lambda meurent anonymement au combat, le seul personnage développé sera le commandant en chef Zhu De (Wang Wu Fu, plein de bonnes intentions, mais au discours complètement foireux. Avec son air jovial, ses joues bien roses et sa morale à deux yuans, il est limite petit père du peuple. Ce contraste est en quelque sorte un message subliminal peu subtil du discours propagandiste gouvernemental. Rien n’empêche d’apprécier le spectacle à un degré décalé de lecture … le reste s’appréciera avec la touche accélérée de la télécommande. Concernant la représentation japonaise, on aurait pu s’attendre à pire même si l’aspect caricatural n’est pas évité. Alors que la hiérarchie chinoise passe pour être exemplaire et compréhensive à la douleur de son peuple (avec un vrai sens du sacrifice), les gradés japonais se comportent en bêtes sanguinaires, exécutant le déserteur potentiel ne comprenant pas le sens de cette guerre. Sinon le manichéisme primaire de Tai Hang Shan Shang se traduira par une succession de défaites japonaises (ils ont même oublié d’insérer un soupçon de suspense) et le dénouement final est prévisible au possible.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Ambitieux et spectaculaire ♥ Action bien bourrine ♥ La mise en scène |
⊗ A fond dans la propagande ⊗ Les effets numériques ⊗ Entre les scènes de guerre |
En définitive, on ne boudera pas Tai Hang Shan Shang car le spectacle en vaut vraiment la peine et le traitement de son message propagandiste lui apporte un intérêt particulier. Cependant, l’ennui remplacera bien souvent l’euphorie et il ne restera qu’une petite démonstration de ce que serait capable de produire la Chine dans les jours à venir … c’est pourquoi Tai Hang Shan Shang marquera probablement l’histoire cinématographique de son pays. |
Titre : On The Mountain of Tai Hang / 太行山上
Année : 2005
Durée : 1h57
Origine : Chine
Genre : Guerre
Réalisateur : Chen Jian, Shen Dong, Wei Lian
Scénario : Lu Zhuguo
Acteurs : Wang Wufu, Zong Liqun, Li Shusheng, Zhang Lin, Lu Qi, Li Youbin, Tony Leung Ka-Fai, Liu Dekai, Kudô Shunsaku, Wu Yue, Anna