[Film] Dolls, de Stuart Gordon (1987)


Sur la route des vacances, David Bower, sa future épouse Rosemary et sa fille Judy sont surpris par un violent orage, qui les contraint à s’arrêter sur le bord de la route. Ils trouvent refuge dans une maison aux murs décrépits où vit un couple de vieillards, collectionneurs de poupées. Pendant la nuit, les hôtes découvrent avec surprise que les poupées sont vivantes…


Avis de Cherycok :
Dolls, c’est un film devant lequel je suis passé de très nombreuses fois dans ma jeunesse durant mes errances en vidéoclub sans jamais avoir essayé de le louer. Pourtant, j’adorais déjà Stuart Gordon, ses Re-Animator, From Beyond et Fortress m’avaient énormément fait triper. Mais je trouvais cette jaquette ratée, dégueulasse, et je décidais à chaque fois de faire l’impasse. Puis avec la mort de Stuart Gordon en mars dernier, je me suis dit qu’il était peut-être temps de rattraper le retard que j’avais dans sa filmographie, à commencer par ce Dolls. Alors que vaut cette petite bobine horrifique produite par Brian Yuzna sous la houlette de Charles Band et sa célèbre boite de production Empire Pictures ? Et bien c’est une sympathique petite surprise et une chose est sûre, c’est que sa jaquette ne lui fait clairement pas honneur.

Au départ, Stuart Gordon a été envoyé en Italie afin de tourner From Beyond. Mais on lui a demandé d’y tourner un autre film en plus, à savoir Dolls, pour 2M$US. Gordon choisit de tourner ce dernier en premier car il nécessite un plus gros travail en post-production que From Beyond, mais très vite il y a un désaccord sur ce à quoi doit ressembler le film. Le scénariste Ed Naha a envie de rendre hommage avec Dolls aux films d’horreur d’antan. Charles Band de son côté avait envie de quelque chose de beaucoup plus gore (Re-Animator venait d’être un succès, ce qui explique peut-être cela). Stuart Gordon lui préférait que le film soit un conte pour adultes plus classique. Le résultat va être une sorte de fusion entre ces trois visions : une sorte de Toy’s Story avant l’heure, avec des jouets qui prennent vie, qui sont loyaux envers les enfants ou ceux qui ont un cœur d’enfant, mais qui deviennent un vrai danger pour les gens mauvais, cyniques ou nuisibles. En gros, nous sommes en face d’un conte pour adultes mais avec une morale propre aux contes pour enfants, le tout saupoudré d’humour noir façon Gremlins et ponctué de scène légèrement gores.
On y suit un couple, complètement pas assorti, avec une belle-mère imbuvable, une petite fille rêveuse, et un papa vampirisé par sa nouvelle femme, qui vont trouver refuge dans un manoir étrange lorsqu’un énorme orage éclate en embourbe leur voiture. Le manoir est tenu par un couple de personnes âgées très accueillantes mais qui semblent malgré tout pleines de secrets. Ils sont très vite rejoints par Ralph, ainsi que deux jeunes filles qu’il a prises en stop, à qui l’orage a également posé problème. Rapidement, il se passe des choses étranges dans cette maison pleine de poupées fabriquées par les propriétaires des lieux. En effet, ces dernières semblent prendre vie, et il se pourrait même qu’elles attaquent certains des occupants de la maison la nuit tombée. Sont-ils en train d’halluciner ou est-ce réellement ce qui est en train de se passer ? Un an avant le premier Chucky (1988) qui a rendu les poupées tueuses célèbres, Stuart Gordon va donc en mettre en scène non pas une, mais plein. Les poupées, ça a le don d’effrayer pas mal de monde, souvent justement à cause de Chucky, mais parfois juste parce qu’elles sont « creepy » comme le disent les ricains.

Gordon va poser cette ambiance un peu étrange dès le générique d’introduction. Très vite, on constate que Dolls a ce côté désuet du cinéma des années 80, avec des tenues vestimentaires improbables (le pyjama jaune et noir), les coupes de cheveux hideuses ou encore le maquillage à outrance façon Like a Virgin de Madonna. Le réalisateur va nous présenter toute une galerie de personnages bien antipathiques au point qu’on va être content de les voir décéder. Il va aller à fond dans le manichéisme en les opposant à d’autres qui vont soit représenter l’innocence, soit qui ont encore cette âme d’enfant en eux. Le film va d’ailleurs beaucoup jouer sur les oppositions. Celle des personnages donc, mais également celle de l’ancien et du moderne en ce qui concerne les jouets (et donc les poupées). Un peu comme on continue à le faire de nos jours avec le cinéma (le « c’était mieux avant » par exemple). On retrouvera également tout le long du film l’opposition de la lumière (les éclairs qui ne cessent d’éclairer à travers les fenêtres) et de l’ombre (tous les éclairages intérieurs sont très faibles). La mise en scène de Stuart Gordon est d’ailleurs souvent très astucieuse, et ce dernier va utiliser à merveille tout l’espace que lui offre ce manoir afin de pallier au maigre budget qui lui aura été alloué (à peine 2M$US). L’ambiance est des plus réussies, virant parfois au glauque mais toujours ponctué d’un humour noir savamment bien dosé. Les poupées sont animées soit en animatronics, soit en stop-motion. Mais même si les SFX ont vieilli, ils gardent malgré tout encore aujourd’hui un certain cachet, un certain charme. Nos poupées attaquent avec des mini couteaux, des mini haches, des ciseaux, des petites scies à métaux, mais au final Dolls reste assez léger en termes de gore. Ça ne tombe jamais dans le grand-guignolesque car le film veut rester léger, avec son surjeu des acteurs, ses petites musiques rigolotes et ses bruitages façon cartoon.

LES PLUS LES MOINS
♥ Bien rythmé
♥ L’ambiance générale
♥ Les SFX kitchs mais funs
♥ Le ton léger
⊗ Pas mal d’incohérences
⊗ Ça a quand même beaucoup vieilli
Dolls n’est certainement pas le meilleur film de Stuart Gordon, mais il n’en demeure pas moins des plus sympathiques. Ce conte de fées pour adultes possède ce charme inimitable des années 80 et devrait ravir tous les amateurs de bobines horrifiques de cette époque.

LE SAVIEZ VOUS ?
• Par souci d’économie, Charles Band, roi de la débrouille, a utilisé les décors de From beyond, en Italie, autre film mis en scène parallèlement par Stuart Gordon, mais qui sortira quelques mois plus tôt.
• Si Gordon envisagea une suite, dans laquelle la jeune héroïne allait recevoir un colis contenant 2 poupées à l’effigie des propriétaires de la maison du premier film, c’est sous la forme de la série des Puppet Master, toujours produit par Charles Band, que l’exploitation des poupées animées se poursuivit.
• La jeune actrice Carrie Lorraine, qui avait auparavant jouée dans Poltergesit 2, s’est retirée du cinéma après avoir joué dans Dolls. Elle ne voyait aucun intérêt à poursuivre une carrière d’actrice. Elle est aujourd’hui avocate dans des affaires criminelles.
• Durant la production, Il a été estimée que le film était trop light en gore. Certains plans bien sanglants ont été tournés après coup afin d’être intégrés dans le montage final. Lors des premières projections tests, ils ont constaté que ces gores dénotaient trop avec le reste du film et les ont finalement retirées.
• L’actrice qui incarne la belle-mère de la jeune héroïne, Carolyn Purdy-Gordon, n’était autre que la femme de Stuart Gordon à l’époque. Stuart Gordon a dit dans une interview : « Je suis heureux que vous ayez apprécié le meurtre de ma femme – c’est pareil pour moi. Carolyn était très irritée qu’un cascadeur italien souhaite la doubler dans le plan où elle doit passer par la fenêtre, et elle a insisté pour réaliser cette cascade elle-même. Ça l’a énervée que quelqu’un puisse penser qu’un homme allait prendre sa place. Parce qu’elle n’a peur de rien. Et il fallait bien ça pour rester mariée avec moi. »


Titre : Dolls / Dolls – Les Poupées
Année : 1987
Durée : 1h17
Origine : U.S.A / Italie
Genre : Poupée de cire, poupée de sang
Réalisateur : Stuart Gordon
Scénario : Ed Naha

Acteurs : Ian Patrick Williams, Carolyn Purdy-Gordon, Carrie Lorraine, Guy Rolfe, Hilary Mason, Bunty Bailey, Cassie Stuart, Stephen Lee

 Dolls - Les Poupées (1987) on IMDb


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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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