[Film] Braindead, de Peter Jackson (1992)

Lionel Cosgrove, un jeune homme timide flanqué d’une mère envahissante fait la connaissance de la belle Paquita, dont il tombe amoureux. Ce qui n’est pas du goût de sa chère maman, bien décidée à gâcher cette relation. Alors qu’elle espionne l’un de leurs rendez-vous galants au zoo, cette dernière est mordue par un singe-rat de Sumatra. Succombant à ses blessures, elle se transforme alors en zombie cannibale et contamine peu à peu la ville. Seul Lionel peut stopper l’invasion…


Avis de John Roch :

Avant de commencer, rappelons-nous tous en se tenant la main que Braindead n’a pas passé le stade de la VHS en France. Souvent annoncé en dvd puis en blu ray le 1er avril, ce poisson est devenu un running gag si lassant qu’il ne surprend plus. Et la soi-disant remasterisation en 4k par le réalisateur lui-même, on n’y croit plus. Tout ça pour dire que pour revoir Braindead, il faut passer par l’import ou par le téléchargement qui pour le coup n’est pas si illégal que ça vu que les droits du métrage en France semblent portés disparus. Dans les deux cas, le problème est le même, car commander ou télécharger le film de Peter Jackson, c’est se sentir comme Forrest Gump et sa boite de chocolat, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. Deux possibilités : soit vous tombez sur Braindead, le vrai, le seul, l’unique, soit sur le montage US : Dead Alive. Cette version est sortie dans deux montages, Rated et unrated, ce qui peut porter à confusion puisque la mention unrated laisse penser que c’est une version uncut. Ce qui n’est pas le cas, et plusieurs dialogues, plans gores et bouts de scènes manquent à l’appel. Laissez donc passer les premières minutes, et à l’apparition du titre, vous serez fixés.

Un titre pour les gouverner tous

 

Fuyez, pauvres fous!

Finalement, que Braindead ne se soit pas fait faute d’investissement quand Peter Jackson avait prévu de le faire avant de se rabattre sur les Feebles, ce n’est pas plus mal. Non pas que le film aurait été moins bon, ou meilleur, ce n’est pas la question, c’est juste qu’il est arrivé au bon moment. Remis dans le contexte de sa sortie, le début des années 90 dans lequel le cinéma d’ horreur est à bout de souffle, Braindead fait office de testament, un baroud d’honneur offert par un réalisateur qui par ailleurs ne reviendra jamais à l’horreur et au gore, tout juste au fantastique avec le superbe Fantômes contre Fantômes, une sorte de signe qui montre que le genre était bel et bien plongé dans le coma pendant près d’une décennie. À y réfléchir, en plus d’être le chef d’œuvre du film gore qu’il est, ce détail a son importance et fait que Braindead est si ancré dans la mémoire collective, puisqu’on peut résumer la chose ainsi : les années 80, Braindead, plus rien, avant le retour du genre fin 90, qui plus est un retour aseptisé. Après Bad Taste qui affichait ses limites et ne tenait pas sur la longueur du fait de son budget très limité, et les Feebles qui ne laissait aucun répit au spectateur, Peter Jackson trouve un équilibre avec Braindead, qui sait être toujours aussi généreux quand il s’agit d’étaler des atrocités dans tout les sens, mais prend également le temps de développer son histoire.

Celle de Lionel qui vit avec Vera, sa mère sur-protectrice qui contrôle les faits et gestes de sa progéniture. Tout change quand il rencontre Paquita, dont il tombe amoureux, ce qui n’est pas du goût de maman qui les file jusqu’au zoo, où elle se fait mordre par un singe-rat importé des îles Sumatra (plus précisément de Skull island, près de quinze ans avant que Jackson ne tourne King Kong). Le point de départ d’une mini-apocalypse zombie que Lionel aura de plus en plus de mal a dissimuler. De faire du patient zéro la mère de Lionel n’est pas anodin, car Peter Jackson amène un véritable fond à son métrage, celui d’un homme qui va devenir adulte en s’affranchissant de la figure maternelle, zombifiée ou non. Une mère castratrice avec ce que cela apporte de mensonges et de manipulations quand il s’agit de protéger son fils d’une présence féminine autre que la sienne. Un thème qui amène une autre dimension aux scènes mère/fils, car c’est bien l’amour maternel qui est au centre du récit, et ce même si elles sont parfois supposées être comiques ou gores, se révèlent par moments touchantes, notamment lorsque les événements font que Lionel doit se séparer de sa mère et commencer son deuil, qu’il le veuille ou non. Cet élément permet au film un autre niveau de lecture, mais si on aime autant Braindead, c’est pour son gore trash, comique, cartoonesque, jubilatoire.

Pour ce faire, Jackson y va progressivement, plus le film passe, plus le rythme va augmenter, et le gore avec. La première partie de Braindead tache déjà beaucoup mais à intervalle régulier, et les premiers morts reviendront sous la forme de zombies qui sont des personnages à part entière : Void le loubard, l’infirmière et sa tête qui ne tient pas en place, le curé ex-arracheur de membres de morts vivants dans une scène inattendue et anthologique, qui donneront naissance à un bébé qui est l’élément comique principal et est à l’origine d’une ballade au parc inoubliable, et bien sur Vera qui a son importance pour les raisons sus-mentionnées. Mais c’est la dernière demi-heure qui fait entrer Braindead au panthéon des films gores, et une fois celle-ci démarrée, on ne peut que s’incliner devant tant d’inventivité et de moments tous aussi gores les uns que les autres, qui surprennent à chaque vision, et pour cause : le cerveau humain n’est pas capable d’enregistrer tout les moments gores de cette demi-heure, qui refuse la facilité (pas une seul arme à feu) mais redouble d’effort pour être d’une créativité constante et d’une générosité qui force le respect. Une dernière partie mythique donc, sans aucun temps mort, qui aligne les morceaux de bravoures, alterne les points de vue des survivants dans un déluge de gore sans jamais être un instant bordélique. Une dernière partie qui ne fait cependant aucunement ombre au reste du métrage, celui-ci étant rempli d’instants tout aussi jubilatoires ( la balade au parc, le curé qui botte des culs au nom du seigneur, l’oncle Leslie complètement déglingué), qui font pour certains partie de la vie à jamais (qui n’ a jamais balancé un « hmm quel bonheur cette crème anglaise » devant ce désert au moins une fois ?), tout comme le film dans son entièreté, dont on se souvient tous de son premier contact avec la chose comme on se souvient d’un événement historique. Un film qui n’a rien perdu de son rythme, de sa folie, de son inventivité, de son gore, de sa VF encore une fois claqué au sol qui en ajoute dans le délire. En un mot un chef d’œuvre intemporel qui ne mourra jamais.

LES PLUS LES MOINS
♥ Gore, gore, et gore
♥ Une inventivité de tous les instants
♥ Très drôle, surtout en VF
♥ Une galerie de personnages zombies ou non excellente
♥ Un rythme du tonnerre
♥ Plus profond qu’il n’y paraît
♥ La dernière demi heure qui surprend à chaque vision
⊗ Avoir 8 chances sur 10 de tomber sur Dead Alive, le montage US
Braindead a su avec le temps garder son statut de classique absolu sans prendre une ride. Toujours aussi gore, toujours aussi drôle, toujours aussi culte, à revoir toujours avec le même regard que lorsqu’il a été découvert.

LE SAVIEZ VOUS ?
• A sa sortie en Nouvelle Zélande, Braindead a eu plus de visibilité au cinéma que Batman : le Défi.
• Le film n’a subi aucune coupe de la censure anglaise, à la surprise générale des critiques de l’époque.
• A la fin du tournage, il restait à Peter Jackson 45000 Dollars Néo Zélandais. Cette fin de budget a servi à tourner la scène où Lionel emmène le bébé zombie au parc, non prévue dans le scénario initial.


Titre : Braindead / Dead alive
Année : 1992
Durée : 1h44
Origine : Nouvelle Zélande
Genre : Ultime
Réalisateur : Peter Jackson
Scénario : Peter Jackson, Fran Walsh, Stephen Sinclair

Acteurs : Timothy Balme, Diana Penalver, Elizabeth Moody, Ian Watkin, Brenda Kendall, Stuart Devenie, Jed Brophy, Harry Sinclair

 Braindead (1992) on IMDb


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Auteur : John Roch

Amateur de cinéma de tous les horizons, de l'Asie aux États-Unis, du plus bourrin au plus intimiste. N'ayant appris de l'alphabet que les lettres B et Z, il a une nette préférence pour l'horreur, le trash et le gore, mais également la baston, les explosions, les monstres géants et les action heroes.
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