[Avis] Flower and snake, de Takashi Ishii

Titre : Flower and Snake / Hana To Hebi
Durée : 115 min
Origine : Japon
Année : 2004
Genre : Bondagement vôtre
Réalisateur : Takashi Ishii

Acteurs : Aya Sugimoto, Hironobu Nomura, Renji Ishibashi, Kenichi Endo, Mizaki Yazuburo, Terajima Suzumu

Synopsis : Takayoshi, un homme d’affaire véreux se retrouve dans une situation financière extrême qui lui impose de traiter avec les Yakuzas à qui il doit de l’argent. Le boss, Ippei, âgé de 95 ans, flashe sur Shizuko, la femme de Takayoshi, une superbe danseuse de Tango. Il propose à Takayoshi de régler sa dette en lui offrant sa femme. Seulement, après que celleci
soit un temps la propriété de Ippei, elle va également devenir l’instrument des pires dérives perverses et malsaines du boss Ippei et du gang yakuza. Takayoshi et Shizuko vont alors perdre tout contrôle de cette situation

Avis de Slimdods : Flower and snake est un pari audacieux pour Kubik ! Il fallait oser sortir un film de cet acabit, un film présentant autant de tabou en l’espace d’un peu moins de deux heures. L’accroche sur la pochette ne lésine pas sur les termes racoleurs qui définissent pourtant bien le film, je cite « … où une femme fatale se perd dans le monde du fétichisme, de la torture et du bondage sous l’emprise d’un yakuza aux fantasmes les plus pervers ». Au moins, chez Kubik, ils sont directs et ils ne mentent pas sur leurs marchandises car nous sommes bien en face d’un pur film déviant.

Le scénario, inspiré d’un roman écrit par Oniroku Dan ne s’étale que sur quelques lignes : pour régler une énorme dette aux yakuzas, Takayoshi, un patron véreux vend Shizuko, sa femme. Le chef du gang, âgé d’à peine 95 ans, en profite pour assouvir ses fantasmes les plus pervers. Shizuko devient ainsi le joujou des yakuzas et le premier rôle macabre d’un spectacle fabriqué pour la bourgeoisie déviante, ces derniers prenant un malin plaisir à voir souffrir cette pauvre Shizuko. Mais avant de subir tous ces supplices, elle vivait une histoire d’amour imparfaite mais cohérente avec son mari ! Deux métiers envahissants, une réussite qui se lit sur leurs visages, une situation sociale excellente, un couple bien fait pour s’entendre donc. Une fois kidnappé, ce bonheur parait bien loin, voir irréel, on passe du rêve au cauchemar, du paradis à l’enfer…

Et quel enfer ! Les Yakuzas n’y vont pas de main morte avec Shizuko qui sera rejoint par une copine un peu plus tard. Séance de torture, viol à répétition sous les feux des projecteurs, et le tout animé par un Yakuza en tutu ! Les ombres spectatrices ricanent, rigolent du spectacle qui leurs sont offerts et leurs jouissances atteindra le maximum quand deux nains arriveront avec chacun un masque au nez bien plus long et utile qu’a l’accoutumé, m’enfin bref je vous évite les détails. Une musique de fête foraine accompagne ces perversions rendant l’ambiance étrange voir un poil ironique, d’autant que la mise en scène fait passer cette torture pour un vrai show théâtrale ! En effet, Takashi Ishii nous gratifie d’une réalisation impeccable jouissant d’une photographie sublime. Les angles sont recherchés et privilégient la sensualité à la moindre occasion. De ce côté-là, il faut avouer que le début du film nous en met plein la vue, un bout de jambe par ci par une magnifique jupe fendue, une silhouette raffinée par là, d’autant que l’actrice Aya Sugimoto est d’une beauté sans équivoque. Mais une fois que l’on passe dans la salle des tortures, c’est plutôt l’inverse. On rejette toute cette sensualité de la même façon que Shizuko rejette et se dégoûte d’elle-même au fil de son malheur. La mise en scène nous pose ainsi en simple témoin des événements et privilégie cette fois ci le spectacle. Le réalisateur a pour but de nous faire prendre du plaisir tel ces spectateurs peu scrupuleux, mais même si il y arrive pendant un certain moment, il nous perd malheureusement en cours de route !

A force de vouloir mettre toutes ses idées artistiques en image, Takashi Ishii rend sa torture beaucoup trop répétitive et ennuyeuse sur la longueur. Ainsi, durant cette longue période, il nous offre les uns après les autres des tableaux dignes des plus grands maîtres avec des ambiances qui changent au gré des lumières, passant d’une beauté nue au milieu d’un spot lumineux aveuglant à des femmes vêtues d’un cuir réfléchissant un rouge atomisant. Takeshi Ishii ose même incorporer un soupçon de poésie avec une neige artificielle tombant lentement alors que Shizuko est attaché par des cordes sur un morceau de bois dans une position peu agréable. Le film reste beau mais devient trop plat au fil du temps, malgré l’effort porté par l’actrice quant à l’évolution de sa personne. De la naissance d’un espoir au visage tuméfié par la peur en passant par une totale perte d’identité et de fierté, on n’échappe aucunement à ce voyage sordide vécu par la pauvre Shizuko. Mais c’est trop long, on passe d’une torture à une autre avec un intérêt sans cesse diminuant, le rythme du tout n’aidant pas non plus. Je dois bien avouer que je me suis forcé un minimum sur la dernière demi-heure, l’ennui prenant le pas sur le reste. Takashi Ishii n’a pas su insuffler au film un renouvellement que l’on était en droit d’attendre, même si ce n’était peut être pas le but premier de ce cinéma.

Le film pose tout de même problème, au même titre que les Guinea Pig à leurs époques. Ici, la femme est réduite à ce qu’elle a de pire. Elle est la soumise, elle est l’esclave et le jouet de l’homme, elle n’est rien à part un pantin de désir et de fantasme pour les riches, l’aristocratie scrupuleuse. Bien sûr, il faut savoir rester objectif et aller au-delà de cette troublante et scandaleuse vision de la femme pour « essayer » de prendre plaisir en face de ce genre de film. Il est même préférable d’en avertir les plus jeunes car le film va tout de même très loin dans le bondage et autres délires Sado-Maso sans toutefois dépasser la limite de la pornographie. Mais ne vous y trompez pas, Flower and snake ressemble à un vrai film, et il serait dommage de le définir d’une façon trop réductrice malgré la représentation horrible de la femme dans cette société. D’ailleurs, ne vous inquiétez pas, Shizuko aura son mot à dire sur la fin et aussi soumise soit elle, la vengeance n’en sera que plus grande, heureusement d’ailleurs. Girl Powa !

Flower and snake est donc un film dérangeant, assez audacieux, visuellement impeccable mais qui souffre d’une redondance bien trop élevée sur sa dernière partie. Il faut tout de même saluer la performance aussi bien physique (de naissance) qu’artistique de la magnifique Aya Sugimoto, qui valorise le film de son aura unique. On remarque d’ailleurs dans le making of du film qu’elle n’a aucunement souffert lors du tournage, l’ambiance du plateau étant relativement bonne enfant et présentant un staff technique au petit soin pour l’actrice. Personnellement, la vision globale de ce film m’a laissé assez perplexe mais dans son genre respectif, Flower and snake reste sans aucun doute un film réussi, car généreux dans son érotisme, ses délires SM, et ses comédiens réellement convaincants.

Pour les amateurs et les curieux quoi…

Note : 5/10

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Auteur : slimdods

Rejeton Hkmaniak-O-dépressif, je suis le vrai « Bouffe tout » de la famille : du polar urbain sérieux à la comédie kitsh, du Kaiju-eiga au Wu Xia Pian volant, aucun genre n’est épargné par ma faim. D’ailleurs, j’ai un faible pour l’anticonformisme assumé et mon Tsui Hark d’époque me manque énormément. Heureusement que mon Baby Godzilla est réconfortant !
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