[Film] La Proie (2011)

Franck Adrien (Albert Dupontel) ancien braqueur détenu en prison, decide de s’évader le jour où son ancien co-détenu, Jean-Louis Maurel (Stéphane Debac), présumé violeur, s’en prend à sa femme et sa fille. Franck Adrien engage une course contre la montre pour sauver sa famille avec à ses trousses une escouade de flics menées par une inspectrice de choc (Alice Taglioni).


Pti Denis :
Eric Valette fait parti de cette génération de cinéphiles élevés dans les vidéos-clubs aux Evil Dead, Fulci, polars Italiens, kung fu et autres westerns qui, en devenant réalisateurs, ont décidé de faire à tout prix du cinéma de genre en France.
Commençant sa carrière au grand écran par un petit film d’horreur bien accueilli par la critique (Maléfique en 2003), l’homme est parti travailler en Amérique après avoir tenté de monter sans succès son projet de western horrifique Européen (Dark Guns). Après deux films d’horreur sans intérêt (le remake de La mort en ligne et Hybrid), il revient en France en 2009 avec un polar de haute volée (Une affaire d’état) contenant de multiples références aux westerns et polars Italiens. Il enchaîne ensuite avec La proie, pure commande qu’il va réaliser avec brio.

Il est intéressant de comparer la structure de La proie avec celle d’un autre polar Français sorti quelques mois plus-tôt (le musclé A bout portant de Fred Cavayé). Ce dernier suit une course contre la montre d’un homme pendant 80 mn. Totalement dépouillé d’intrigues secondaires, réduit à son simple pitch de départ, le film est une petite bombe qui va droit au but.
La proie, au contraire, multiplie les personnages secondaires et fait cohabiter différents genres (film de prison, polar, action, suspense, horreur). Les deux auteurs du scénario, Laurent Turner et Luc Bossi, ont voulu un film dense, généreux, peut-trop généreux car il est vrai que tout ne fonctionne pas dans cette fusion des genres. Mais c’était sans compter sur Eric Valette pour donner vie à ce script surchargé. L’artiste fonce tête baissée avec une conviction pour son histoire, une énergie dynamitant l’ensemble que l’on pardonne aisément les défauts de l’œuvre.

Pour incarner Franck Adrien, il fallait un comédien physique, crédible en « Action Hero ». Le choix d’Albert Dupontel s’avère fort judicieux. Déjà rompu aux tournages de films de genre (L’ennemi intime, Chrysalis), l’acteur a effectué lui-même toutes ses cascades. Et au vu du film, autant dire que nous tenons l’héritier direct du Jean-Paul Belmondo période Le casse – Peur sur la ville !
Chutes, saut sur un train, accroché à une rambarde de fenêtre au-dessus du vide, renversé par une voiture… Dupontel multiplie les exploits physiques pour notre plus grand bonheur. La prestance et la forme olympique de l’acteur permet à Valette de ménager des séquences d’action de haute volée : Bagarre ultra-violente réglée par Olivier Schneider (coordinateur des combats sur Taken et Sécurité rapprochée), poursuite à pied au milieu d’une route, partie de cache-cache dans un lotissement avec une escouade de gendarmes…
Le résultat est explosif et surtout toujours bien mis en images par le réalisateur.
En plus de se dépenser sans compter, Dupontel apporte au personnage une réelle densité (beaucoup de ses émotions passe par son regard). Il nous offre une excellente performance d’acteur qui laisse peu de place aux autres personnages pour exister.

Le premier à en pâtir est Stéphane Debac qui joue le tueur du film, l’homme après qui court Dupontel. L’acteur incarne un sérial-killer tout en douceur, parfaitement conscient des atrocités qu’il commet. Le problème n’est pas tant sa prestation, plutôt convaincante d’ailleurs, mais l’écriture de son personnage. Trop d’incohérences et de zones d’ombre tournent autour de lui, finalement on a du mal à croire que ce type peut avoir autant de coups d’avance sur Dupontel ou la police.
Néanmoins son côté froid et monstrueux explose lors d’une scène où tentant d’abuser d’une adolescente, il la course dans la campagne, tuant au passage un malheureux se trouvant sur son passage. On bascule brusquement dans un slasher type avec cette séquence. Réalisée assez sèchement, elle détonne au sein d’un univers de polar-action mais de tout le film, c’est le passage caractérisant le mieux le tueur que campe Stéphane Debac.
L’autre gros défaut à toute cette course poursuite vient essentiellement d’un trop plein de personnages secondaires, en particulier les policiers. D’un côté un Sergi Lopez incarnant un ancien flic menant une croisade contre le serial killer, Jean-Louis Maurel de l’autre une escouade commandée par Zinedine Soualem avec en tête une Alice Taglioni s’acharnant à stopper Franck Adrien.
Si Valette accorde une certaine importance au personnage d’Alice Taglioni (l’actrice en impose dans ce rôle de femme forte), lui consacrant même une excellente scène d’action, en revanche il ne s’attarde que trop brièvement sur les autres, préférant concentrer toute son attention sur Dupontel. Au milieu d’un rythme devant enchaîner les morceaux de bravoure, les personnages de Sergi Lopez ou Zinedine Soualem n’ont pas le temps de s’imposer à l’intérieur du récit. Au final, ils ne sont que des stéréotypes (le privé obsessionnel qui n’a plus de vie, le chef qui réprimande constamment ses gars) qui mettent à mal la cohérence du récit (Sergi Lopez se met à aider Dupontel au péril de sa vie, Soualem se trouve au bon moment et au bon endroit lors du final).

Pour être aussi maîtrisé qu’A bout portant, La proie aurait dû se cantonner à un film de course-poursuite. La partie dans la prison ainsi que les premières échappées de Dupontel représentent le meilleur du métrage. Musclées, mises en scène avec un punch trop rare dans le cinéma Français, elles permettent au film de marquer immédiatement des points.
La deuxième moitié (plus axé polar) pâtit d’incohérences scénaristiques et d’un grand nombre de personnages ayant du mal à exister au sein d’un récit alerte. Néanmoins, le spectacle reste total du début à la fin, orchestré par un Valette en mode turbo magnifiant à chaque plan un Dupontel impérial.

 


Titre : La Proie
Année : 2011
Durée : 1h40
Origine : France
Genre : Polar / Action
Réalisateur : Eric Valette

Acteurs : Albert Dupontel, Stéphane Debac, Alice Taglioni, Sergi López, Caterina Murino, Natacha Régnier, Zinedine Soualem, Serge Hazanavicius


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Auteur : Pti denis

Fan de cinéma de genre depuis tout gamin, le film d'arts martiaux HK est par-dessus tout le genre que j'affectionne le plus. Mais j'adore également l'horreur, le cinéma populaire Italien des années 60 aux 90's, le polar (d'où qu'il vienne), je prends autant de plaisir devant un gros blockbuster bien fait qu'un film de zombies fauché comme L'avion de l'apocalypse.
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