[Film] Coherence, de James Ward Byrkit (2013)


Un soir, alors qu’une comète s’apprête à passer au-dessus de Los Angeles, Em se rend à un dîner entre amis et s’aperçoit en route que son téléphone portable ne marche plus. Une fois arrivée, les personnes présentes évoquent des faits étranges qui se seraient produits dans des circonstances similaires. Brusquement, la maison se retrouve plongée dans le noir. Selon Em, les événements inexplicables qui s’ensuivent sont le fait de l’un des invités qui agirait avec la complicité de résidents malveillants et potentiellement dangereux d’une habitation voisine. Alors que la tension est à son comble, les convives font une découverte inattendue qui changera, pour chacun et à jamais, le cours de leur existence.


Avis de Cherycok :
Cohérence, disponible sur la plateforme de SVOD française Outbuster, c’est ce genre de petit film sans aucun budget (environ 50000$) qui, avec trois bouts de ficelles et une excellente idée de départ, met à l’amende une bonne partie de ce qui s’est fait en termes de science-fiction et de film à tiroirs depuis deux décennies. Non pas que le film soit parfait, loin de là, il a clairement ses tares et ses incohérences contrairement à ce que son titre annonce, mais il prouve qu’il n’y a pas besoin de dizaines voire de centaines de millions de dollars pour pondre quelque chose qui tient la route, qui tient en haleine, qui fait bouillonner le cerveau. Un film concept qui a certes ses limites, mais qui le temps de 1h29 propose une expérience à la fois étrange et intense de laquelle on ressort avec l’impression d’avoir assisté à quelque chose de vraiment accrocheur.

Mais tout d’abord, plantons le décor. Il s’agit ici du premier long métrage de James Ward Byrkit qui jusque-là n’avait réalisé que quelques courts métrages et écrit le scénario du film d’animation (et du jeu vidéo dérivé) Rango. Un soir qu’il était dans son salon avec son ami Alex Manugian, scénariste du film, ils eurent l’idée de tourner un film « sans équipe, sans scénario, sans effets spéciaux, sans argent » avec juste une caméra, avec pour quasi seul et unique lieu ce salon dans lequel ils se trouvaient. Venant du théâtre, ils avaient également envie que les acteurs viennent tous du milieu de l’improvisation, ne se connaissent pas, et que chaque jour, au lieu de recevoir le scénario de ce qui allait être fait la journée, ils aient une fiche avec les grandes lignes de leurs personnages, leurs motivations et quelques points principaux de l’intrigue, sans jamais savoir ce que les autres acteurs avaient reçu. Le but était qu’il y ait, grâce à leur talent d’improvisation, une certaine spontanéité, un certain naturel dans leurs échanges, comme si c’était de vieux amis qui se retrouvaient, évidemment guidés par un plan très précis que le réalisateur et son scénariste avaient bien en tête –il n’était pas question d’improviser au fur et à mesure du tournage- puisqu’ils allaient y plancher dessus de nombreux mois mais sans que les acteurs ne s’en rendent compte. Les acteurs n’étaient au courant de rien du tout avant de commencer les 5 jours de tournage puisque le réalisateur, qui les connaissait de son côté, avait simplement dit à chacun de venir chez lui pour tourner un film pendant une semaine et que ça allait être très amusant. Pendant un an, James Ward Byrkit et Alex Manugian s’évertuent à réfléchir à toutes les révélations, les arcs des personnages, les différentes pièces du puzzle, et comment ils allaient essayer d’emboiter tout ça sans que les acteurs ne sachent rien. Le résultat est une histoire qui aurait pu sortir de la série La 4ème Dimension et qui va prendre en quelques sortes pour point de départ l’expérience du Chat de Schrödinger imaginée en 1935 par le physicien du même nom, et partir sur la thématique des univers parallèles qui vont s’entremêler suite au passage d’une comète au-dessus des États-Unis.

Il est vrai que Coherence est un film intéressant à plus d’un titre. Déjà, c’est assez hallucinant de voir comment avec ces 3 bouts de ficelle, James Ward Byrkit arrive à faire monter la tension tout du long. Après un premier quart d’heure un peu longuet mais nécessaire pour présenter les différents personnages et planter le décor, va arriver l’élément déclencheur de tout l’imbroglio qui va nous être présenté pendant l’heure qui va suivre. James Ward Byrkit et Alex Manugian sont des malins et ont très bien compris qu’un concept fort couplé à une bonne idée de départ, ça permet de s’affranchir de beaucoup de choses. Nous sommes donc ici dans un huis clos pendant lequel les huit personnages vont errer dans ce salon, mais également en extérieur par une nuit étrangement noire qui sera le point de départ du retournement de cerveau qui va se lancer. Sans trop spoiler, il va donc être question ici d’une nuit qui va être vécue en même temps dans une infinité de mondes parallèles par les mêmes personnages avec une comète qui va venir dérégler tout cela et donc des personnages d’une réalité qui vont se retrouver dans une autre et ainsi de suite. Coherence est vraiment un film très malin mais malheureusement, il ne porte pas bien son nom puisque les incohérences sont nombreuses jusque dans le tout dernier plan. C’est toujours un jeu dangereux de jouer avec ce genre de thématique, tout comme celle des voyages dans le temps car il est impossible d’avoir un résultat cohérent de bout en bout. Mais pourtant, Coherence fonctionne car le naturel qui découle de ce qui a été mis en place avec les acteurs, avec ce naturel qui découle de cette caméra à l’épaule certes parfois énervante puisque sans cesse en mouvement (avec pas mal de tremblements) mais qui nous met au plus près de ces personnages au point que le spectateur en devient un à part entière, on croit à ce qu’on voit. Assembler les pièces du puzzle, essayer de comprendre qui est réellement qui dans tout ce bazar, s’apercevoir que rien n’a été laissé au hasard et que chaque détail compte (certains moments bizarres prennent tout leur sens plus tard), tout devient vite un amusement pour le spectateur qui se prendra au jeu. D’autant plus que le casting, malgré toutes les contraintes exposées plus haut, s’en sort très bien et que ce lieu quasi unique est très bien exploité. Alors non, tout n’est pas parfait, mais oui, Coherence reste un bon film.

LES PLUS LES MOINS
♥ Le concept
♥ La tension très bien gérée
♥ Un bon casting
♥ Très bien rythmé
⊗ Une caméra qui peut fatiguer les yeux
⊗ Des incohérences

Expérience cinématographique aussi bien dans sa conception que dans le spectacle qu’il propose, Coherence est une vraie proposition de cinéma qui, malgré des défauts évidents, vaut clairement le coup d’œil.

LE SAVIEZ VOUS ?
• L’acteur qui joue le rôle d’Amir, Alex Manugian, est également coscénariste. Il était essentiellement la « taupe » qui aidait à guider les scènes si les acteurs s’égaraient.

• Le réalisateur, James Ward Byrkit, voulait utiliser sa propre maison comme décor du film. Comme sa femme était enceinte de 8 mois et demi et qu’elle souhaitait un accouchement à domicile, elle a accepté qu’il le fasse à condition qu’il puisse le faire en 5 jours.

• Le plateau ne comptait que 5 membres d’équipe : 2 preneurs de son, le directeur de la photographie, le réalisateur et la productrice Lene Bausager.



Titre : Coherence
Année : 2013
Durée : 1h29
Origine : U.S.A / Angleterre
Genre : Univers parallèles
Réalisateur : James Ward Byrkit
Scénario : James Ward Byrkit, Alex Manugian

Acteurs : Emily Baldoni, Maury Sterling, Nicholas Brendon, Elizabeth Gracen, Lorene Scarafia, Hugo Armstrong, Alex Manugian, Lauren Maher, Aqueela Zoll

Coherence (2013) on IMDb


5 1 vote
Article Rating

Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
S’abonner
Notifier de
guest

0 Commentaires
Inline Feedbacks
View all comments