Dans les années 1920, Pocky Zhang, chef d’un groupe de bandits, attaque le convoi de Ma Bangde, nouveau gouverneur de la Ville des Oies. Celui-ci prétend qu’il n’est que le conseiller Tang, tué dans l’attaque et qu’il va aider le bandit à prendre la place de Ma Bangde. Arrivé à la Ville des Oies, la troupe se heurte au chef de la mafia locale, maître Huang.
Avis de Cherycok :
Il y a des films comme ça où, lorsque le visionnage se termine, le seul mot qui nous vient à la bouche est « Mouais ». On sait qu’on n’a pas aimé, mais on ne peut pas dire qu’on a trouvé ça pourri non plus. On ne sait pas si on est passé à côté de quelque chose ou si c’est le film qui est à côté de la plaque. C’est exactement ce qu’il s’est passé avec Let The Bullets Fly (2010) de Jiang Wen. Pourtant, je voulais l’aimer ce film, car le trailer était sympathique, l’univers me plaisait (western à la sauce chinoise), et en plus il y avait le toujours excellent Chow Yun Fat, interprétant pour une fois un bad guy. Une chose est sûre, c’est que Let The Bullets Fly est un film étrange, qui va mélanger les genres de manière parfois bizarre, au point d’arriver à créer des malaises, ce qui ne l’a pas empêché d’être un énorme succès en Chine, au point d’engendrer deux suites.
Pour son premier film commercial, Jiang Wen va jouer la carte de la comédie d’action aux relents de western spaghettis. Il s’agit d’une adaptation d’un récit de Ma Shitu qui fait partie de son recueil Ye Tan Shi (Dix Récits Nocturnes). Le succès en Chine est immédiat, le film rapportant pas moins de 140M$US au box-office pour un budget estimé à 15M$US. Let The Bullets Fly est d’ailleurs encensé par la critique. Le film commence d’ailleurs plutôt bien, avec une attaque de train ne nous laissant aucun doute sur l’aspect Action / Comédie du film, où les coups de feu vont côtoyer le burlesque. Mais très rapidement, on a cette impression que quelque chose cloche, un peu comme si rien de ce à quoi on est en train d’assister ne faisait naturel. Les ruptures de ton sont souvent trop brutales, et certaines scènes improbables arrivent comme un cheveu sur la soupe. Pire encore, on se demande le pourquoi de certaines scènes, comme ce moment où un des personnages s’éventre (gerbes de sang à l’appui) pour prouver qu’il n’avait mangé qu’une seule gelée et pas deux comme on l’accusait. Alors que le gag aurait pu être fun, il est à l’inverse ici complètement malaisant. Ce phénomène se produira d’ailleurs à d’autres reprises. En fait, on a l’impression que Let The Bullets Fly a le cul entre deux chaises. Lorsqu’il y a de l’action, un gag arrive de manière maladroite ; lorsqu’il y a une scène dramatique, par exemple lorsqu’un personnage meurt, une réplique de très mauvais goût est balancée ; lorsque le film veut insister sur un point précis, il va le faire 5, 6, voire 7 fois d’affilée (le lancement de la scène d’attaque finale). On a souvent cette impression de lourdeur, comme si certaines idées/lignes de dialogue arrivaient avec d’énormes sabots. Le résultat a souvent quelque chose de dérangeant, d’irritant même, au point que son visionnage n’est régulièrement pas agréable.
Même chose en ce qui concerne le jeu des acteurs qui, pour la plupart, vire au cabotinage le plus total. Seul Jiang Wen et quelques seconds rôles restent « sobres », les autres, à commencer par Chow Yun-Fat, partent dans le surjeu à outrance. Je suis un habitué du cinéma de Hong Kong, spécialiste comédie cabotinantes, mais là, ça ne colle pas avec le reste du récit qui se veut malgré tout une critique sociétale dénonçant les riches qui s’en mettent plein les poches pendant que les pauvres ramassent des clopinettes, le tout sur fond d’histoire à la Robin des Bois. De plus, le film est excessivement bavard, non pas que ça soit un problème en soi mais (d’après ce que j’ai pu lire ci et là), les dialogues sont tellement truffés de références, de métaphores, et autres subtilités de langage, qu’il est difficile de bien en saisir tous les sens cachés pour qui ne maitrise pas parfaitement le mandarin (les sous titrages ayant souvent tendance à simplifier les choses). On a cette désagréable impression de passer à côté de quelque chose à ce niveau-là également. Du coup, on ressent un gros ventre mou d’une heure, durant laquelle l’intrigue semble se mettre en place, avec tout ce que cela comporte de manigances et autres coups fourrés agrémentés de gags pas toujours très heureux, et on attend patiemment que le final, durant la dernière demi-heure, vienne faire décoller un récit qui, pour le moment, et à part les 15 premières minutes, n’avait rien de passionnant. Alors oui, la mise en scène de Jiang Wen a de la gueule, avec ses beaux décors, ses plans audacieux et sa musique parfois épique, mais on ne peut pas s’empêcher de penser au sortir du film qu’on n’a pas passé un très agréable moment malgré un final qui relève un peu l’ensemble.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Visuellement joli ♥ Quelques gags réussis ♥ Jolie bande son |
⊗ Gros ventre mou ⊗ Trop de références culturelles ⊗ Un côté très forcé ⊗ CGI parfois moyens |
Alors que le mélange action / comédie fait souvent bon ménage, il n’est clairement pas des plus homogènes dans Let The Bullets Fly. Le visionnage est assez pénible, et le film est heureusement sauvé de la catastrophe totale par sa dernière demi-heure. |
LE SAVIEZ VOUS ?
• Une première « suite » voit le jour en 2014, intitulée Gone With The Bullets, rencontrant un succès public et critique bien moindre, suivie d’une deuxième en 2018, intitulée Hidden Man, qui elle aussi fonctionna moins bien que le premier opus.
• Suite au succès du film, Hollywood aurait rapidement acheté les droits du film (très chers) et préparerait un remake. Mais dix ans après la sortie de l’original, aucune nouvelle de ce projet.
• La musique du film « The Sun also Rise », utilisée dans le film, a été composée par le célèbre Joe Hisaishi qui a par exemple participé aux bandes originales de films tels que A Scene at the Sea, Sonatine, Kids Return, Aniki Mon Frère, Porco Rosso, Mon Voisin Totoro ou encore Le Château Ambulant.
• Le film a remporté pas moins de 28 prix dans les nombreux festivals où il a été présenté : Asian Film Awards, Chinese Film Media Awards, Golden Horse Film Festival, Hong Kong Directors Guild Awards, Hong Kong Film Awards, …
Titre : Let the Bullets Fly / 讓子彈飛
Année : 2010
Durée : 2h12
Origine : Chine
Genre : Le cul entre deux chaises
Réalisateur : Jiang Wen
Scénario : Zhu Su-Jin, Shu Ping, Jiang Wen
Acteurs : Jiang Wen, Chow Yun-Fat, Ge You, Shao Bing, Carina Lau, Liao Fan, Du Yi-Heng, Li Jing, Zhang Mo, Wei Xiao, Zhou Yun, Yao Lu, Chen Kun, Jiang Wu