[Film] Immigration Game, de Krystof Zlatnik (2017)

L’Europe a fermé ses frontières aux réfugiés. L’Allemagne reste le seul pays à offrir la citoyenneté, mais sous une condition. Les réfugiés sont accueillis si, et seulement si, ils survivent au jeu de téléréalité « Immigration Game ». Abandonnés dans la banlieue de Berlin et livrés à eux-mêmes, ils doivent rejoindre la tour de télévision qui se trouve dans le centre de Berlin le plus vite possible, sans se faire tuer par les citoyens allemands, autorisés à les persécuter. Joe, déjà citoyen, va être contraint malgré lui de participer à ce jeu mortel.


Avis de Cherycok :
Un film allemand, ça a tendance à faire fuir immédiatement le public. Il faut avouer que les préjugés ont la dent dure et que, dans la tête des gens, ce n’est ni glamour, ni funky. Pourtant, l’Allemagne nous a amené depuis quelques années des bobines très intéressantes comme par exemple le rafraichissant Soul Kitchen (2009) de Fatih Akin, l’attachant Paradis Express (1997) de Thomas Jahn, ou encore les très funs Un Prof pas Comme les Autres 1 (2013) et 2 (2015) de Bora Dagtekin. Et puis il y en a d’autres à l’ambiance plus lourde, avec par exemple l’étouffant Hell (2011) de Tim Fehlbaum ou l’excellent L’Expérience (2001) de Oliver Hirschbiegel, ou qui vont aligner un scénario un peu casse gueule, surtout compte tenu de l’état actuel de l’Europe, mais néanmoins assez alléchant pour qu’on s’y intéresse. C’est le cas d’Immigration Game qui par son pitch rappelle forcement à la fois des films tels que Battle Royale, Hunger Games, The Running Man mais aussi et surtout la désormais célèbre saga American Nightmare. A la question « Est-ce un bon film ? », on répondra clairement « Non. ». A la question « Est-ce un mauvais film ? », on répondra « Pas tout à fait… ».

Tourné quasi intégralement en anglais pour son exploitation internationale et sorti directement en DVD / Bluray et VOD à cause de son thème sujet à polémique, Immigration Game est un film d’anticipation à côté de la plaque, laissant pour l’occasion le spectateur le cul entre deux chaises. D’un côté, un film qui se veut être un brulot sur l’accueil et le traitement des migrants, un sujet d’actualité depuis quelques années, surtout en Allemagne où le gouvernement a ouvert les portes du pays à des millions réfugiés des pays en guerre du Moyen-Orient, ainsi qu’une critique de la télé-réalité qui profite de cette situation. Et d’un autre côté, lors de son final, le film part sur un nationalisme exacerbé, à la limite de la xénophobie. On se doute, du moins on l’espère, que cette dernière partie du film est volontairement outrageuse, volontairement grotesque, avec ce côté complètement no limit de la télé-réalité et de leurs jeux allant de plus en plus loin. Mais le propos des plus tendancieux pourra choquer s’il est pris au premier degré.
En fait, le réalisateur Krystof Zlatnik aurait dû choisir. Soit aller jusqu’au bout de son jeu de survie dans lequel se retrouve mêlé malgré lui un citoyen allemand bien sous tous rapports, en montant crescendo dans la tension et la violence. Soit pousser au bout la critique des médias et de leur dérive, en donnant par un exemple un côté Real-TV à son film, avec tout ce que cela comporte de bandes noires auréolés de messages défilants, d’interventions du présentateur du show, ou de plans vu façon caméra de surveillance. Mais non, Krystof Zlatnik a préféré choisir de faire les deux, malheureusement chacun à son strict minimum.

Malgré de bonnes intentions, le fond se prend les pieds dans le tapis donc, et c’est encore sur la forme. Il faut dire que dès le départ, les conditions n’étaient pas vraiment réunies. A peine 14 jours de tournage, le tout avec un budget plus que serré, le script n’était en plus pas complet, à tel point que certains dialogues, voire carrément certaines scènes entières, ont été improvisés sur le moment par les acteurs. En termes de manque de sérieux, ça se pose là. Ça aurait pu passer si le casting été composé d’acteurs confirmés sachant ce qu’ils font, mais en l’occurrence dans Immigration Game, ce n’est pas le cas. Les acteurs ont du mal à convaincre et leur jeu est souvent plus qu’approximatif, mention spéciale à certains « chasseurs » qui, même masqués, arrivent à faire preuve d’amateurisme.
Autre problème clairement gênant dans la forme, la mise en scène de Krystof Zlatnik est à la traine. L’ensemble a été tourné caméra à l’épaule, sans doute à la hâte. En résulte de nombreux plans flous, mal cadrés, et surtout une image sans cesse remuante et pour le coup, très fatigante pour nos pauvres yeux. On se pose la question de savoir si tout ceci est volontaire, pour donner un côté documentaire, plus intense, un côté au plus près de l’action au film, mais quoi qu’il en soit, cela finit par en devenir fatiguant tant le réalisateur n’a pas maitrisé son sujet.
Et c’est dommage car, malgré de très nombreuses incohérences (un seul drone, et encore lowcost, dans tout Berlin pour retransmettre tout ça ? C’est grand Berlin, comment les « chasseurs » arrivent toujours à tomber sur les fuyards ?, et bien d’autres…), le rythme est suffisamment bien dosé pour ne jamais ennuyer. Dommage que cela soit plombé par le reste.

LES PLUS LES MOINS
♥ On ne s’ennuie pas ⊗ La mise en scène
⊗ Les idées mal exploitées
⊗ Le jeu d’acteur
Un pitch intéressant, une envie de bien faire, Immigration Game est malheureusement raté aussi bien sur le fond que sur la forme. Le film arrive malgré tout à divertir, mais on est loin du brûlot qu’on aurait pu attendre à la lecture du pitch.



Titre : Immigration Game
Année : 2017
Durée : 1h36
Origine : Allemagne
Genre : Action / Drame
Réalisateur : Krystof Zlatnik
Scénario : Mark Wachholz, Krystof Zlatnik

Acteurs : Mathis Landwehr, Denise Ankel, Katharina Sporrer, Simson Bubbel, Eskindir Tesfay, Horst-Günter Marx, Robert Maaser, Ahmed Chear, Alois Knapps

 Immigration Game (2017) on IMDb










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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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