[Film] Et Maintenant, on l’Appelle El Magnifico, de Enzo Barboni (1972)


Tom Moore est un étudiant assidu d’une grande école britannique. Lorsque son père, Joe, un célèbre cow-boy de l’Ouest américain, décède, Tom retourne dans sa ville natale où il rencontre les amis de son père : Bull, Holy Joe et Monkey, des hommes rustres sans aucune notion de politesse. Déçu d’imaginer son père côtoyer de telles personnes, Tom entreprend de les remettre sur le droit chemin. Mais les hommes du Far Ouest ne se laissent pas faire et décident à la place d’apprendre au jeune anglais à devenir un véritable cow-boy.


Avis de Cherycok :
Je l’ai déjà dit sur mes chroniques de films de Bud Spencer et Terence Hill, j’ai grandi dans les années 80 avec le célèbre duo, au même titre qu’un Bruce Lee ou qu’un Jackie Chan, à voir et revoir des dizaines de fois les VHS de leurs films, et les revoir aujourd’hui me procure toujours autant de plaisir avec cette nostalgie qui caractérise le visionnage de films de notre enfance. J’ai été moins assidu sur leurs films en solo, n’ayant par exemple jamais vu les quatre films « Pied-Plat » avec Bud Spencer ou Et Maintenant on l’Appelle El Magnifico avec Terence Hill, sans doute parce que le paternel ne les avait pas en VHS, mais aussi parce que je n’ai jamais pris le temps de les découvrir, par peur que, ne les ayant pas vu jeunes, ils ne reproduisent pas cet effet « doudou » qu’on cherche parfois. La sortie dans sa version intégrale chez BubbelPop’ Edition de Et Maintenant on l’Appelle El Magnifico est l’occasion de combler ce manque d’autant plus que, même s’il ne fait pas partie des classiques du duo, il n’en reste pas moins une bobine des plus sympathiques qui prend à contrepied les amoureux de Trinita.

On L’Appelle Trinita (1970) est un énorme succès et une suite, On Continue à l’Appeler Trinita (1971) est mise en chantier. Mais alors que cette suite n’est pas encore sortie, son réalisateur Enzo Barboni réfléchit déjà à un troisième film. Bud Spencer s’écarte du projet, considérant qu’il n’a pas autant de place que Terence Hill dans le film, et part faire de son côté Amigo… Mon Colt a Deux Mots à te Dire (1972) dans lequel il a le rôle principal, Mais Terence Hill reste dans ce qui sera Et Maintenant, on l’Appelle El Magnifico. Lorsque le film sort, malgré l’absence de Bud Spencer, tout est réuni pour que le succès soit au rendez-vous. Le mélange Western / Comédie est toujours là, la belle gueule de Terence Hill est toujours aussi ravageuse, et les succès fous de On L’Appelle Trinita mais surtout de On Continue à l’Appeler Trinita ont ouvert toutes les portes. Pourtant, Et Maintenant, on l’Appelle El Magnifico, que certains considèrent malgré tout comme le 3ème volet de la saga Trinita, est un échec au box-office, au point de stopper nette l’envie du réalisateur Enzo Barboni d’insister dans le genre western. On l’Appelle Trinita avait énormément fonctionné sans doute parce qu’il avait détourné les codes du westerns spaghettis pour en faire une comédie. Et Maintenant, on l’Appelle El Magnifico continue pourtant lui aussi de détourner les codes du western. Est-ce à cause de l’absence du duo Hill / Spencer ? Est-ce parce qu’en plus de détourner les codes du western, il détourne sur bien des points de On L’appelle Trinita ? Parce que le personnage incarné par Terence Hill, Thomas Morre, est clairement à l’opposé de celui de Trinita, et c’est d’ailleurs ce qui va générer ici une bonne partie de l’aspect comique du film. El Magnifico utilise le schéma désormais connu de tous de l’étranger qui débarque dans un monde qui n’est pas le sien, à savoir ici un aristocrate anglais, incarné par Terence Hill donc, qui arrive dans un far-west certes en pleine mutation avec l’arrivée de la technologie (par exemple les chemins de fer), mais encore rude, bourrin et sans foi ni loi sur bien des aspects. C’est de ce contraste que vont naitre moult gags (l’incompréhension des codes de l’ouest, le vélo de Terence Hill face aux chevaux des cowboys, …).

L’humour est, comme dans les Trinita, un des aspects principaux du film, mais il semblerait qu’Enzo BArboni, également scénariste, ait voulu faire un film plus léger, bien moins lourd en termes d’humour, toujours dans un ton parodique. Avec les paysages de la Yougoslavie bien plus verts que les déserts arides habituels du sud de l’Espagne, mais aussi une excellente bande son des frères De Angelis parfois bien plus douce et mélancolique que les westerns habituels (même comiques), il se dégage du film quelque chose de plus bucolique, de presque poétique par moments. Comme dans les trois quarts du film, le personnage fragile et naïf de Terence Hill ne sait ni se battre, ni tirer au pistolet, celui-ci jouera bien plus les cartes de l’ironie et de la ruse, comme si Thomas Moore était une réinterprétation pacifique du héros classique des westerns. Ou alors est-ce parce que le film met en scène un far-west à bout de souffle, jusque dans cette ultime scène où ces trois cowboy pur jus ne peuvent que constater que leur époque est finie et qu’il n’y a plus rien à l’ouest si ce n’est la mer. Un peu comme si Barboni voulait que son film soit une métaphore du genre western spaghettis qui était à bout de souffle à la fin des années 60 et que le sous-genre qu’il a lui-même créé avec On L’Appelle Trinita, à savoir le western comique / parodique, était lui aussi en fin de course et qu’il bouclait la boucle avec El Magnifico. Une chose est sûre, c’est que cet aspect-là du film ne le rend que plus intéressant, s’éloignant de ce qui avait fait le succès des Trinita, certes, mais en leur rendant sans cesse hommage tout le long, soit avec ce duo de personnages tout de noir vêtus qu’on avait déjà vu dans le premier Trinita et qui vont faire office de running gag, soit avec ces bastons qui feront leur succès et qu’on retrouve une fois de plus ici. Ces bagarres bon enfant sont chorégraphiées avec humour et précision, avec leurs lots de cascades exagérées et de bruitages cartoonesques leur donnant un aspect slapstick très prononcé. Elles sont néanmoins moins énergiques que les meilleures du duo Hill / Spencer malgré les cascadeurs habituels (comme Sal Borgese ou Riccardo Pizzuti), mais quel plaisir de les voir s’éclater des meubles entiers sur la tête et de les voir voltiger à la moindre baffe. Alors oui, on peut comprendre que Et Maintenant, on l’Appelle El Magnifico soit aujourd’hui considéré comme une comédie mineure de Terence Hill et même un film à part dans sa filmographie, mais il reste malgré tout un western comique des plus charmants aux propositions des plus intéressantes.

LES PLUS LES MOINS
♥ Bien mis en scène
♥ L’ambiance légère du film
♥ Terence Hill à contre-emploi
♥ Des scènes de baston funs
♥ La bande son
⊗ Des longueurs à cause de ses 2h02
⊗ L’absence de Bud Spencer se ressent
⊗ Des gags qui ne font pas toujours mouche
Avec Et Maintenant, on l’Appelle El Magnifico, Enzo Barboni signe un western comique des plus charmants, certes à part dans la filmographie de Terence Hill mais dans lequel ce dernier campe un anti-cowboy des plus attachants.


ET MAINTENANT, ON L’APPELLE EL MAGNIFICO est sorti en combo blu-ray / DVD chez BUBBELPOP’ EDITION prix de 25€. Il est disponible à l’achat ICI.

En plus du film, on trouve : Un livret de 28 pages, « On l’appelle El Magnifico » — par Jean-François Rauger (29 min), « Entre western et comédie, la signature terence Hill » — par Philippe Lombard (30 min).



Titre : Et Maintenant, on l’Appelle El Magnifico / E poi lo chiamarono il magnifico
Année : 1972
Durée : 2h02
Origine : Italie / France / Yougoslavie
Genre : Trinita 3 ?
Réalisateur : Enzo Barboni
Scénario : Enzo Barboni

Acteurs : Terence Hill, Gregory Walcott, Yanti Somer, Dominic Barto, Harry Carey Jr, Enzo Fiermonte, Danika La Loggia, Riccardo Pizzuti, Sal Borgese, Alessandro Sperli


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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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