[Film] Color out of Space, de Richard Stanley (2019)

La famille Gardner vit dans une petite bourgade rurale à proximité d’Arkham. Une nuit, une météorite s’écrase dans leur jardin, dans un étrange halo de lumière. Petit à petit, la couleur qu’elle dégage contamine l’eau, les plantes, les animaux, mais aussi la famille elle-même, en proie à un mal indicible qui va rendre ses membres complètement fous…


Avis de Rick :
Color out of Space est un événement ! Parce qu’il signe le retour sur grand écran de Richard Stanley, lui qui après deux excellents films au début des années 90, Hardware et Le Souffle du Démon, avait quitté le monde du cinéma après deux jours sur le tournage de l’île du Docteur Moreau en 1996. Parce que Richard Stanley revient oui, en forme, et qu’il a su s’entourer d’une équipe au top, en plus d’adapter pour le coup une nouvelle du grand H.P. Lovecraft. Rien que ça, ça fait frétiller d’avance. Richard Stanley donc, à la mise en scène, mais également au scénario, qui s’entoure de Nicolas Cage dans le premier rôle, de Colin Stetson (Hereditary) pour la musique, le tout produit notamment par Elijah Woods et la boite XYZ Films (Mandy, Tusk, Artic, Apostle, The Raid, The Night Comes for Us, Brawl in Cell Block 99, dois-je continuer à parler de cette boite de production géniale ?). Et donc ici, après le robot qui pète un câble dans un monde post apocalyptique, et le film mystique au possible avec un tueur, Stanley s’attaque à du Lovecrtaft, avec La Couleur Tombée du Ciel. En l’adaptant, en y mettant quelques éléments venant clairement de son style, et en plaçant l’histoire de nos jours, ce qui limite un peu le budget (reconstitution d’époque, accessoires, tout ça, au bout d’un moment, ça peut chiffrer). Et pour donner vie à ses ambitions, on lui offre un budget de 6 millions ! Que demander de plus ? Une sortie française sur grand écran ? Ah ah ah… Non, Color out of Space sera probablement un énième DTV. Mais revenons à nos moutons. Ou plutôt, pour rester bien encré dans le film, à nos alpagas. Car nous faisons très rapidement la connaissance de la famille Gardner, dont le père, joué par le génial Nicolas Fucking Cage, a décidé d’élevé des alpacas. La ferme, c’est trop traditionnel pour lui que voulez-vous ! Il y vit avec sa femme Theressa, sa fille ado un peu rebelle et branchée occulte Lavinia et le plus jeune fils, Benny, plus occupé à fumer des joints dans la grange.

Une famille tout ce qu’il y a de plus normale, jusqu’à ce qu’une météorite atterrisse dans leur jardin. Jusque là, ça va, sauf que la météorite en question semble fondre dans la terre, et infecter tout ce qui la touche. Mais, infecter dans le sens Lovecraftien de la chose, c’est-à-dire à tous les niveaux, que ce soit physique ou même au niveau cosmique, de l’espace et du temps. Et cette force, inconnue, qui va clairement venir foutre la merde dans la famille et dans les environs se manifeste pas une couleur étrange, indéfinissable. Oui, car c’est du Lovecraft. Choix étrange du coup pour Stanley d’avoir tourné son métrage en couleurs, le forçant à donner une couleur à… cette couleur indescriptible. (si vous voulez du noir et blanc, il faut se tourner vers le film Allemand de 2010 adaptant la même nouvelle). Et pourtant, si l’on pourra dire suivant les plans « c’est du rose » ou « c’est du violet », il y a eu un très gros travail en post production pour que cette fameuse couleur change, puisse se mouvoir, et alterne les tons pour finalement être assez difficilement descriptible simplement, mais par contre, c’est toujours un plaisir pour les yeux. Et on comprend rapidement, autant dans son aspect fantastique avec cette couleur qui change les choses, voir tente d’en créer de nouvelles, mais aussi via cette famille, ou encore via Ezra, un homme étrange vivant dans une cabane dans la forêt, que le film veut avant tout nous parler de la communication, du partage. La famille tente de communiquer. Mais la couleur également. Quand à Ezra, il tente de dire la vérité à ce qui veulent bien l’écouter. Un personnage qui semble clairement venir des anciens métrages de Stanley, et donc qui fait plaisir, même si sa place dans l’univers de Lovecraft pose des soucis de cohérence. Comment un homme simple vivant seul dans la forêt et coupé de tout en sait autant sur les événements ? Un détail on me dira. Et oui, car malgré quelques petits défauts, et comme je pense cela s’en ressent depuis ma première phrase, Color out of Space m’a donné pile ce que j’attendais de lui.

Alors on pourra lui reprocher quelques petites longueurs dans sa première heure, servant à mettre doucement en place les enjeux avant que tout ne décolle. Car mine de rien, le film dure presque deux heures. Deux heures très plaisantes mais avec quelques petites longueurs, sans que le métrage ne paraisse néanmoins long. Mais lorsque débarque la seconde heure, Stanley se fait clairement plaisir, multiplie les retournements, les scènes parfois dérangeantes, et verse parfois dans une horreur que le Carpenter période The Thing n’aurait pas renié. Je n’en dirais pas plus pour ne pas gâcher une des scènes marquantes du métrage, mais ça a clairement de la gueule. Nicolas Cage lui aussi se fait plaisir, jouant plutôt sobrement au début avant lui aussi d’être infecté par cette couleur et de pouvoir verser dans le jeu habituel de la folie qui lui aura valût ses lettres de noblesses. Ou la risée de nombreux spectateurs, au choix. Mais dans le cas présent, comme dans Mandy, ça fonctionne, son jeu allant avec le film et son ambiance si particulière. Et si je n’ai pas vu toutes les adaptations de cette nouvelle (la première datant de 1965, avant deux adaptations dans les années 80 avec La Couleur de l’Abîme et The Curse, puis l’opus de Ivan Zuccon en 2008 Colour from the Dark, et le film Allemand déjà cité plus haut), on peut aisément dire que Richard Stanley parvient à mettre son propre style et ses obsessions dans l’univers de Lovecraft, sans pour autant dénaturer l’univers de l’auteur. Je dirais même qu’il livre ce qu’il faut faire en adaptant une œuvre existante. Se l’approprier, sans la dénaturer, pour livrer une vision personnelle, qui sera forcément différente de celle des autres lecteurs, mais thématiquement intéressante. Alors quand en plus ça tient la route.

LES PLUS LES MOINS
♥ Le grand retour de Richard Stanley
♥ Une adaptation intéressante de Lovecraft
♥ Des scènes fortes
♥ La gestion de la couleur
♥ Nicolas Cage
⊗ Quelques petites longueurs
⊗ L’ermite qui sait tout, étrange
note8
Color out of Space est un bon film, un bon Richard Stanley, et une bonne adaptation de Lovecraft. Intéressant, visuellement très joli et porté par Nicolas Cage, l’ensemble n’est pas parfait mais passionne malgré tout.



Titre : Color out of Space

Année : 2019
Durée :
1h51
Origine :
U.S.A. / Portugal / Malaisie
Genre :
Fantastique
Réalisation : 
Richard Stanley
Scénario : 
Richard Stanley et Scarlett Amaris d’après H.P. Lovecraft
Avec :
Nicolas Cage, Joely Richardson, Madeline Arthur, elliot Knight, Tommy Chong et Brandan Meyer

 Color Out of Space (2019) on IMDb


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Auteur : Rick

Grand fan de cinéma depuis son plus jeune âge et également réalisateur à ses heures perdues, Rick aime particulièrement le cinéma qui ose des choses, sort des sentiers battus, et se refuse la facilité. Gros fan de David Lynch, John Carpenter, David Cronenberg, Tsukamoto Shinya, Sono Sion, Nicolas Winding Refn, Denis Villeneuve, Shiraishi Kôji et tant d'autres. Est toujours hanté par la fin de Twin Peaks The Return.
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