[Film] Bela Luna, de McArthur C. Alejandre (2023)

Lorsque Luna, une femme battue, et Bela, une artiste autonome, se rencontrent pour la première fois, leurs cœurs seront libérés par les personnes et la société qui les enchaînent.


Avis de Rick :
Peu importe ce que l’on en pense, le streaming a encore de beaux jours devant lui. Enfin, la concurrence devient rude, les œuvres sortant chaque mois plus nombreuses et plus couteuses, tout comme les coûts pour tenir ses plateformes en ligne et à jour, et si le streaming tel qu’on le connait va devoir changer (ou alors les boites vont devoir se racheter les unes les autres afin de financièrement s’en sortir, mais aussi pour que le public ne lâche pas prise face à la multitude d’offres), au moins, cela permet à de nombreux réalisateurs de livrer parfois film sur film. Si en Amérique, certains grands ont trouvé refuge sur lesdites plateformes (Scorsese par exemple, Fincher aussi), et bien les pays Asiatiques ne sont pas en reste. Pas forcément les pays les plus exportateurs (non, ni la Corée, ni le Japon), mais la Chine et les Philippines sont clairement à fond là-dedans, chacun dans leur domaine. En Chine, les Wu Xia Pian et les films animaliers sortent par dizaine chaque mois si bien que l’on est perdu face à des pochettes interchangeables et surtout des films parfois interchangeables (et peu aidés par des castings que l’on retrouve parfois d’un film à l’autre), et bien aux Philippines, c’est la même chose, mais avec les thrillers et drames… érotiques. Si bien que là aussi, on trouve une poignée d’actrices qui, chaque année, se retrouvent dans 4 ou 5 films du genre, si ce n’est plus. Ayanna Misola par exemple, qui en seulement deux ans a déjà empilée plus de tournages que de vêtements devant la caméra, mais il y en a bien d’autres. Depuis 2021, il y a aussi Angeli Khang par exemple, tout juste 21 ans, mais déjà 10 films aux titres souvent évocateurs, comme Pusoy, Virgin Forest, Girl Friday ou Us X Her. Et en ce début 2023, deux nouveaux films sortent la même semaine sur la plateforme Vivamax, dont Bela Luna. Un film qui va tenter de beaucoup plus jouer la carte du drame que du thriller pour changer, et va avoir l’ambition de donner à la jeune femme non pas un, mais deux rôles principaux, Bela donc, mais aussi Luna. Bela, elle est scénariste, en couple avec son copain voulant devenir réalisateur, et comme on est chez Vivamax, ça se dénude sur fond de musique ringarde pour un oui ou pour un non. En voiture et il y a de l’orage, hop, on baise.

De l’autre côté, Luna a une vie opposée, mariée de force, battue, insatisfaite donc, et pas de bol, elle se retrouve rapidement prise en otage par un homme armé qui va la garder avec elle dans un bâtiment abandonné le temps que les choses se calment. Comme les différencier vu que les deux sont joué par Angeli Khang ? Facile, Bela a des faux ongles et boit sa bière comme une chienne en chaleur, tandis que Luna étant plus timide, elle porte des lunettes et passe la moitié du film en pleurs. Le problème, c’est qu’autant dans un film comme Bula, totalement con et tellement énorme dans son traitement qu’il en devenait aussi amusant que ringard, la formule Vivamax trouvait dans un sens une certaine légitimité, tout en permettant au public visé de se rincer l’œil, autant dans Bela Luna, la formule semble totalement forcée, insérée au marteau dans une double intrigue qui a bien du mal à fonctionner, et même, pire, à intéresser. On pourrait presque, en soupirant, deviner l’arrivée de la prochaine scène un peu chaude, tant la formule semble réglée comme une horloge un peu trop précise pour paraître spontanée, mais surtout, narrativement utile et fluide. Le résultat de ce probable cahier de charge, c’est qu’on s’ennuie clairement, et que le charme d’Angeli Khang, passant donc le film doublement nue, vu son double rôle, ne suffit pas à éveiller le spectateur. La jeune femme, à sa décharge, n’est pas aidée par le scénario et les dialogues, ni par ses camarades à l’écran. Le film veut jouer la carte du drame, et n’y va pas par quarante chemins pour ça. Luna est kidnappée, et après d’interminables scènes de pleurs et le classique « je dois faire pipi », la voilà assise à taper la discut avec son kidnappeur qui va parler de sa tendre jeunesse d’orphelin pour justifier ses actes. Et alors que la jeune femme était en pleurs quelques minutes avant, la voilà, bouche bée, sous le charme de son agresseur.

Agresseur qui, pour la remercier, lui tendra une bouteille d’eau, que la jeune femme ne pourra s’empêcher de prendre de ses deux mains, nous rappelant la forme phallique de la bouteille… Un spectateur normal serait tenté d’exploser de rire devant la métaphore et le spectacle proposé, sauf que l’ensemble étant le plus sérieux du monde à l’écran, c’est plus une petite gêne que l’on ressent. Qui va s’accentuer quand quelques secondes après, voilà que nos tourtereaux s’embrassent et passent à l’acte. Rappelons que Luna a une vie sexuelle de merde en plus d’être maltraitée, et était traumatisée une dizaine de minutes plus tôt. Et le lien entre Bela et Luna dans tout ça ? Inutile de vous faire un dessin, puisque l’on voit le truc venir dés le début (Bela étant scénariste en même temps), et que le film y va avec la subtilité de… non, sans aucune subtilité. Ce qui est dans le fond un peu dommage, car même si bancale et allant beaucoup trop vite dans son traitement, Luna paraissait un personnage bien plus intéressant et à même d’évoluer que Bela, dont les seuls tourments sont de livrer son scénario à temps, et de trouver comment insérer de manière « subtile » du sexe dans son récit pour faire plaisir au producteur. Pour moi, tout cela s’explique sans doute par une production éclair pour lancer rapidement un nouveau film sur la plateforme. Car avec un CV de presque 140 œuvres pour le scénariste, on ne va pas me faire croire qu’il a pu autant travailler avec un tel niveau d’écriture. Désolé donc Angeli Khang, tu as beau avoir un joli petit corps, ça ne suffit pas à maintenir l’intérêt pendant presque deux heures.

LES PLUS LES MOINS
♥ Angeli Khang est fort charmante
♥ On peut apercevoir quelques pistes intéressantes parfois
⊗ La formule habituelle Vivamax qui ne marche pas
⊗ Un film peu intéressant
⊗ La subtilité de l’ensemble
⊗ Ça manque de rythme, et d’enjeux
note6
La formule souvent érotique de la plateforme Vivamax se retrouve dans ce Bela Luna, qui prend des allures de drame sans réels enjeux, et du coup assez ennuyeux sur toute la durée.


Titre : Bela Luna
Année : 2023
Durée :
1h49
Origine :
Philippines
Genre :
Drame, mais surtout du cul
Réalisation :
McArthur C. Alejandre
Scénario :
Ricky Lee
Avec :
Angeli Khang, Mark Anthony Fernandez, Kiko Estrada, Julio Diaz, Francis Mata, Nicco Manalo, Raul Morit, Joel Saracho et Millen Gal

Bela Luna (2023) on IMDb


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Auteur : Rick

Grand fan de cinéma depuis son plus jeune âge et également réalisateur à ses heures perdues, Rick aime particulièrement le cinéma qui ose des choses, sort des sentiers battus, et se refuse la facilité. Gros fan de David Lynch, John Carpenter, David Cronenberg, Tsukamoto Shinya, Sono Sion, Nicolas Winding Refn, Denis Villeneuve, Shiraishi Kôji et tant d'autres. Est toujours hanté par la fin de Twin Peaks The Return.
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