[Film] Anthropophagous, de Joe D’ Amato (1980)

Des touristes arrivent sur une petite île grecque, qu’ils trouvent complètement abandonnée. En explorant les lieux ils découvrent une chambre secrète. Ils sont par la suite poursuivis par un psychopathe cannibale bien décidé à les tuer un par un.


Avis de John Roch :
Aristide Massacceci, décédé en 1999, restera dans les annales en tant que Joe D’Amato. Non pas que les 199 films (dont au moins 179 pornos à la louche, j’ai pas compté) qu’il a dirigé sont tous crédités sur ce pseudonyme, mais c’est sous celui-ci que sa réputation s’est bâtie. Tout d’abord dans l’érotisme avec Black Emanuelle, sorte de spin off de Emmanuelle (comment éviter un procès ? Facile, il y a juste à enlever un M et le tour est joué) qui a fait profiter au monde des formes de l’Indonésienne Laura Gemser, et dans l’horreur avec deux films : Blue Holocaust, film sur le thème de la nécrophilie que je n’ai toujours pas vu, et cet Anthropophagous dont il est question ici. Je n’oublie pas le reste de sa filmographie, rassurez-vous, constituée de westerns, de nanars post-apo et une pseudo suite à Anthropophagous sur laquelle je reviendrai bientôt : Horrible (c’est le titre du film, pas la qualité de celui-ci, quoique…). Un pur artisan du cinéma d’exploitation donc, qui a même combiné les trois genres dans lesquels il est reconnu : horreur et érotisme avec Emanuelle chez les Cannibales, et horreur et porno avec Porno Holocaust. Pour les autres qui ne connaissent pas le bonhomme, sachez que si vous avez squatté les films de la seconde partie de soirée du dimanche soir de M6, ou ceux du premier samedi du mois sur Canal + dans les 90’s, vous avez forcement vu un film de Joe D’Amato, fidèle au poste pour entre autre filmer les ébats de Rocco Siffredi et avoir fait tourner des actrices qui ont rendu votre zizi tout dur (Selen, petit ange qui a mis un terme à sa carrière trop tôt).

Mais je m’égare, revenons à Anthropophagous. Le film est scénarisé et produit par Luigi Montefiori, plus connu sous son nom international de George Eastman, qui a collaboré avec D’Amato plusieurs fois, qui s’octroie également le rôle titre, un anthropophage qui surfe, comme toujours chez nos amis Transalpins, sur une vague. Plutôt plusieurs, car si on est pas dans une rencontre entre Zombie et Cannibales à l’image de Zombie Holocaust, Anthropophagous mélange également les deux genres, mais en un seul personnage. Celui de l’anthropophage donc, qui est à la fois un genre de zombie et un genre de cannibale, en plus d’être un boogeyman qui renvoie à autre sous-genre qui cartonne en 1980 : le slasher movie. Et cet anthropophage, il prend littéralement la vague dans ce qui semble être les Dents de la Mer qui arrive sur terre dès l’introduction du métrage qui montre un couple de touristes se faire massacrer. Pour la suite des festivités, il faudra patienter, car Anthropophagous est un film qui, il faut l’avouer, a pris un sacré coup de vieux au niveau du rythme, peu aidé par un scénario aux dialogues plats et à l’histoire tout de même invraisemblable. Quoique déjà à sa sortie il fallait la gober, cette histoire d’un homme qui bouffe la totalité de la population d’une île touristique qui heureusement pour elle (et pour le scénario) est hors-saison, ce qui n’empêche pas un groupe de personnes composé d’une pseudo médium, d’un chaud lapin, d’un futur médecin, d’une femme enceinte de son mari, et de Tisa Farow qui stoppera net sa carrière après ce film, de débarquer sur l’île. Une île loin d’être désagréable puisque Anthropophagous se permet une petite originalité, celle de déplacer son action en Grèce,  D’Amato et Eastman sortaient certainement d’une projection des Révoltés de l’an 2000 avant de commencer à écrire leur script. C’est tout con, mais le cadre Grec apporte beaucoup au métrage, c’est dépaysant et c’est joli. Pour le reste, en attendant qu’il se passe quelque chose, c’est à dire dans la dernière demi-heure, il faudra faire avec un triangle amoureux qui n’est pas nécessaire, des personnages creux et interchangeables. Puis il y a les seules survivantes du massacre : une jeune aveugle qui s’est réfugiée dans un tonneau de vin, et cette femme énigmatique qui traverse le film comme un fantôme, qui semble inutile mais a sa petite part d’importance dans l’intrigue. Le massacre ayant eu lieu un mois auparavant, on se demande bien comment elles sont encore vivantes tout comme l’anthropophage qui a tout le temps la dalle mais qui ne semble pas être impacté par la faim sur la longueur.

Pourtant, passé un scénario pas trop logique et parfois très con, un rythme aux fraises, des acteurs pas très convaincants et une musique qui fait parfois saigner les oreilles, Anthropophagous conserve de beaux restes. Joe D’Amato soigne ses images, et réussit à poser une ambiance tour à tour pesante, glauque et poisseuse. Ainsi la partie dans la maison plongée dans l’obscurité, dont la lumière vient des éclairs d’un orage qui fait rage, est réussie, tout comme celle qui se déroule dans une crypte. Pour un produit du genre, la photographie est belle, les images aussi, tout comme la première apparition de l’anthropophage aussi sobre que flippante. L’anthropophage justement, il est dommage qu’il ne soit pas plus présent, le physique de Georges Eastman donne une présence imposante à cet homme devenu fou suite à un naufrage qui a mal tourné, devenu une créature à mi-chemin entre un zombie et un ogre échappé d’un conte. Pour ce qui est du gore, Anthropophagous a acquis un statut de film culte pour deux scènes que l’on connaît même sans les avoir vues : la scène du fœtus, et celle gentiment spoilé par les affiches de l’époque (dont un « l’ homme qui se mange lui-même ! » sur l’affiche Française) de l’anthropophage qui s’auto-dévore. Si pour le reste le film est au final assez sage, voire carrément cheap par moments (la tête en plastique dans le seau) les deux scènes valent le détour. Si la première est légèrement surcoté mais fait son effet, la seconde quant à elle a plus de sens que le reste du scénario, en se mangeant lui-même, l’anthropophage boucle la boucle de sa folie, tout en rappelant qu’il est un être humain dans une conclusion aussi dégueulasse que touchante.

LES PLUS LES MOINS
♥ Georges Eastman l’Anthropophage
♥ L’ambiance
♥ Des images soignées
♥ Quelques scènes gores réussies…
♥ Parfois la musique est pas mal…
⊗ Ça a vieilli
⊗ Le rythme
⊗ Ça met trop de temps à démarrer
⊗ … d’autres ratées
⊗ … mais la plupart du temps non.
⊗ Un scénario sans logique
Si Anthropophagous a mal vieilli sur pas mal de points et que ses deux scènes cultes ont perdu en impact, il reste tout de même à découvrir pour son ambiance, ses images soignées et Georges Eastman qui en impose dans son rôle d’anthropophage.

LE SAVIEZ VOUS ?
• Le fœtus est un lapin dépecé.
• Dans la version Anglaise, Tisa Farrow est redoublée par une autre actrice.
• Les ossements de la scène de la crypte étaient un mélange de vrais et de faux. Lors de la fin du tournage, de vrais ossements ont été embarqué par erreur. Joe D’Amato n’a jamais osé aller les redéposer.



Titre : Anthropophagous / Anthropophagus / The savage island / the grim reaper
Année : 1980
Durée : 1h32
Origine : Italie
Genre : Bon appétit
Réalisateur : Joe D’Amato
Scénario : George Eastman et Joe D’Amato

Acteurs : George Eastman, Tisa Farrow, Savero Vallone, Serena Grandi, Margaret Mazzantini, Mark Bodin, Bob Larson, Rubina Rey, Simone Baker

 Le manoir de la terreur (1981) on IMDb


 

 

 

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Auteur : John Roch

Amateur de cinéma de tous les horizons, de l'Asie aux États-Unis, du plus bourrin au plus intimiste. N'ayant appris de l'alphabet que les lettres B et Z, il a une nette préférence pour l'horreur, le trash et le gore, mais également la baston, les explosions, les monstres géants et les action heroes.
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