[Avis] Tokyo-jima, de Shinozaki Makoto

Titre : Tokyo-jima / Tôkyô-jima / Tokyo Island / 東京島
Année : 2010
Origine : Japon
Genre : la folie des glandeurs
Réalisation : Shinozaki Makoto
Avec : Kimura Tae, Kubozuka Yôsuke, Emoto Tasuku, Fukushi Seiji, Kimura Ryo, Someya Shôta, Tei Ryushin, Tsurumi Shingo

Kiyoko, la quarantaine, va s’échouer sur une île déserte et perdue en compagnie de seize jeunes japonais. Après la disparition pas si tragique de son mari, Kiyoko va s’éprendre du plus costaud de tous les survivants. Les choses vont commencer à se compliquer lorsque des naufragés chinois vont faire irruption sur l’île…




Tout ça pour ça ? Un best-seller, une adaptation en grandes pompes avec de vrais décors naturels, quelques bons acteurs, un trailer alléchant, des salles de ciné bondées…tout ça pour ça ? Oui vous l’aurez compris, TOKYO-JIMA constitue bien pour moi la grosse déception de l’été 2010, au Japon.

Tout commence plutôt bien…et très vite ! Le réalisateur ne s’attarde qu’une seule seconde sur le naufrage et nous place directement au cœur de la communauté japonaise ayant survécu aux terribles flots. On fait ainsi immédiatement connaissance avec Kiyoko, femme à la quarantaine bien tassée, qui va assassiner son mari dès le début du récit, parce que ce dernier était trop vieux et ennuyeux. Sympa, et politiquement incorrect. J’aime. Par la suite on pourra également saluer le comique de répétition qui voudra que d’autres personnes viennent s’échouer sur l’îlot paradisiaque (en particulier un groupe de chinois), et une progression dramatique de l’histoire qui prendra parfois des directions certes pas toujours très intéressantes mais assez inattendues.

TOKYO-JIMA n’est donc certainement pas un mauvais film, mais il n’a pas fonctionné avec moi. L’absence de personnages vraiment attachants et/ou intéressants m’a littéralement bouté hors de l’intrigue, et la belle Kiyoko (bien interprétée par Kimura Tae) m’a rapidement tapé sur le système. Que penser de Kiyoko, en effet ? Elle tue son mari (dont le seul crime était d’être vieux et inutile), et va plus ou moins profiter des jeunes garçons habitant à ses cotés, s’autoproclamant quasiment reine de l’île parce qu’elle en est la seule femme. Kiyoko sera alors adorée (en raison de son sexe) ou repoussée (en raison de son âge : c’est une mise en quarantaine), mais son attitude attentiste (elle ne prendra quasiment aucune décision constructive pour la communauté et se révélera donc tout aussi inutile que son mari) donnera envie de l’étrangler à plus d’un spectateur ! On pourra d’ailleurs se poser une question : l’histoire de TOKYO-JIMA se veut-elle plutôt féministe ou machiste ? Un début de réponse nous vient du nom de l’auteure du livre : Natsuo Kirino, qui est donc une femme. Mais si TOKYO-JIMA est une œuvre féministe, que penser du message ainsi distillé ? Qu’une femme, pour survivre parmi les hommes, doit en réalité se contenter de ne rien faire ? Par suffisance, calcul ou bien par peur de choquer l’égo masculin surdimensionné ? Chacun d’entre nous verra, peut-être, une signification différente à TOKYO-JIMA. Pour ma part, j’ai trouvé que tout le monde en prenait un peu pour son grade. Malgré tout, et compte tenu de la réputation noire et dérangeante de l’écrivaine Natsuo Kirino, je n’ai pas trouvé que le film TOKYO-JIMA allait très loin…bien au contraire. D’ailleurs, j’aimerais bien connaitre le contenu exact du livre original afin de constater la réelle étendue des dégâts…

Un certain public devrait néanmoins apprécier le long métrage de Shinozaki Makoto pour son originalité, sa critique assassine des jeunes japonais (ils ne foutent rien, dans la difficulté ils baissent les bras –au contraire des chinois, travailleurs), son joli pied de nez à cette pratique japonaise qui voudrait qu’une femme après 35 ans n’ait plus vraiment d’attrait, ses jolis décors ou encore pour les prestations de Kimura Tae et Kubozuka Yôsuke. Les autres, qui comme moi ne seront jamais entrés dans le film ou n’auront pas adhéré à son message (in a bottle), trouveront sans doute le temps long à mourir d’ennui.

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Auteur : Oli

Amateur de cinéma japonais mais de cinéma avant tout, de Robert Aldrich en passant par Hitchcock, Tsukamoto, Eastwood, Sam Firstenberg, Misumi, Ozu, Claude Lelouch, Kubrick, Oshii Mamoru, Sergio Leone ou encore Ringo Lam (un intrus s'est glissé dans cette liste, sauras-tu mettre la main dessus - attention il y a un piège).
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