
A La Nouvelle-Orléans, Jane Baker délaisse ses deux enfants pour rejoindre son amant, Fred Kellerman. Lucy, la fille aînée de Jane, qui ne supporte pas le comportement de sa mère, tue son frère en le noyant dans la baignoire. Jane croit à un drame domestique. Elle demande à Fred de vite la raccompagner. Sur le trajet, ils sont victimes d’un tragique accident qui coûte la vie à son amant. Traumatisée, elle perd la raison. Après un an d’internement, Jane sort de l’hôpital psychiatrique. Elle s’installe dans l’appartement de son amant défunt. La femme entretient des rapports ambigus avec le jeune concierge aveugle, Robert Duval. Dès le premier soir, Jane se prête d’une façon morbide à honorer la mémoire de Fred sous la surveillance de Robert. Lucy reprend contact avec sa mère. La jeune fille n’a pas dit son dernier mot…
Avis de Cherycok :
Attention, le texte ci-dessous contient des spoilers. Si le film vous intéresse, revenez une fois que vous l’aurez vu. Les amateurs de cinéma horrifique connaissent surtout Lamberto Bava, fils du célèbre Mario Bava (La Baie Sanglante, Six Femmes pour l’Assassin), pour les très funs Demons (1985) et Demons 2 (1986), considéré par certains comme ses deux meilleurs films. On lui doit également des bobines telles que Blashfighter L’Exécuteur (1984), Sentences de Mort (1987), Body Puzzle (1992) ou encore le gros nanar (ou navet, c’est selon) Le Monstre de l’Océan Rouge (1984). Mais nous allons nous intéresser aujourd’hui à son premier film, après des années à être assistant réalisateur sur des films de Joe D’Amato, Ruggero Deodato ou encore de Mario Bava, son paternel, qu’il réalise tout seul en 1980, Baiser Macabre. Le film s’inspire d’un fait réel s’étant déroulé à la Nouvelle-Orléans, celui d’une femme qui a conservé la tête coupée de son mari dans un réfrigérateur. Tout un programme qui sera un succès en Italie puisqu’il rapportera 560 millions de lires de l’époque.
Lamberto Bava est un réalisateur souvent critiqué, souvent même raillé à cause d’une carrière lorgnant vers la série B pas toujours de très bonne qualité, surtout en comparaison de la filmographie de son père, mais pourtant son premier film prouve que, lorsqu’il le veut, il est capable de pondre une bobine des plus intéressantes, sur de nombreux points. Très rapidement, il règne dans Baiser Macabre une ambiance pesante et l’atmosphère devient relativement glauque, presque cauchemardesque, avec des scènes même malaisantes (la petite fille qui noie le jeune garçon par exemple). Bava ne cherche à aucun moment à jouer avec la peur ou la terreur, ni même le gore, à l’exception de quelques plans. Il préfère jouer avec la tension, avec la claustrophobie de cette maison lugubre, avec ces personnages un peu étranges, ambigus, s’appuyant sur les codes du giallo tout en les amenant dans d’autres directions. Lamberto Bava ne succombe pas aux sirènes du gore facile de cette époque et préfère mettre en scène un film quelque part assez froid, aux thématiques diamétralement opposées, mais qui pourtant se marient parfaitement ici, la passion et la nécrophilie, avec cette histoire d’amour entre une femme et l’homme qu’elle aime dont elle garde la tête au freezer. Pourtant, nous ne sommes pas ici dans quelque chose d’extrême à l’instar du Nekromantik de Buttgereit mais dans quelque chose de plus posé, mais pas forcément moins crade dans le fond et surtout en adéquation avec le mot « macabre » du titre.
Baiser Macabre est un film qui prend son temps. Son rythme est lent, parfois pour mieux installer cette atmosphère étrange, parfois pour mieux rentrer dans la psyché de ses personnages. Certes, certaines scènes s’étirent un peu trop et les plus impatients commenceront peut-être à tapoter du pied, même si l’attente en vaut la chandelle car permettant de renforcer le final bien plus choc, bien plus terrifiant que les 1h15 qui ont précédées. Mais il est vrai qu’il vaut mieux se lancer dans le film en étant bien réveillé sous peine de plonger irrémédiablement dans les bras de Morphée. On pourra reprocher au film sa mise en scène pas ou peu inventive, n’essayant que rarement de tenter des choses, restant très sage même sur des scènes qui auraient méritées un peu plus de folie. Mais cela renforce le côté malsain qui se dégage très rapidement et qui aurait pu être désacralisé si Baiser Macabre était tombé dans des excès gores ou des jumpscares et autres effets de peur faciles. Ici, on reste dans quelque chose d’assez réaliste, un réalisme qui va petit à petit se mélanger à la folie qui gagne le personnage central. On constatera également une direction d’acteurs parfois un peu étrange, en particulier l’actrice principale, Bernice Stegers, qui accentue justement parfois un peu trop la folie de son personnage (que de rires diaboliques !). Mais là aussi, ça renforce l’aspect malaisant du scénario et de certains moments du film, d’autant plus qu’aucun personnage ne rattrape les autres. Tous ont un pet au casque (comme on dit par chez moi), de la fillette à baffer à sa mère nécrophile en passant par le concierge aveugle voyeur (mais que par le son donc). On peut clairement y voir ici une certaine critique de la bourgeoisie, que Lamberto Bava pousse vers des territoires inhabituels, même si son scénario reste malgré tout assez prévisible et pas exempt d’incohérences.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Une mise en scène propre… ♥ L’ambiance lugubre ♥ Les personnages ♥ Le huis clos bien exploité |
⊗ … mais sans folie ⊗ Un rythme très lent ⊗ Une direction d’acteur en demi-teinte |
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Baiser Macabre est un film à ne pas mettre entre toutes les mains, explorant les thématiques de la passion et de la nécrophilie dans un huis clos souvent malaisant, parfois morbide, à la lenteur déroutante mais à l’ambiance impeccable. |
BAISER MACABRE est sorti chez The Ecstasy of Films en combo blu-ray / DVD au prix de 8€. Il est disponible à l’achat ici : https://the-ecstasy-of-films.com/ En plus du film, on y trouve : Entretien avec Lamberto Bava (23min), Entretien avec Pupi et Antonio Avati (21min), Entretien avec Roberto Gandus (23min, Bande annonce originale, Galerie photos, Livret de 20 pages écrit par Marc Toullec. |
Titre : Baiser Macabre / Macabro
Année : 1980
Durée : 1h31
Origine : Italie
Genre : Nec-romantique
Réalisateur : Lamberto Bava
Scénario : Pupi Avati, Lamberto Bava, Antonio Avati
Acteurs : Bernice Stegers, Stanko Molnar, Veronica Zinny, Roberto Posse, Ferdinando Orlandi, Fernando Pannullo, Elisa Kadigia Bove