[Film] La Tanière de la Bête, de Shunya Ito (1973)


Suite à son évasion, Nami, surnommée Sasori, est activement recherchée par la police. Elle leur échappe dans le métro, après avoir coupé le bras d’un inspecteur, et trouve refuge dans un quartier sordide, chez une prostituée.


Avis de Yume :
Troisième volet de la saga Sasori, Beast Stable sera l’avant dernier interprété par Kaji Meiko, mais surtout le dernier réalisé par Shunya Ito, cet incroyable réalisateur à la filmographie trop courte, tant son talent explose dès son premier film, le premier volet des Sasori. Shunya Ito est un esthète qui n’a, qui plus est, pas peur d’expérimenter les choses les plus folles.

Il est évident que la période de l’exploitation japonaise était propice à toutes expérimentations visuelles et scénaristiques, mais Shunya Ito a réellement donné des lettres de noblesse à trois films purement exploitation. Il imprime sa marque visuelle sur chaque plan des trois films, et ce Beast Stable est la conclusion géniale offerte par un réalisateur mature. Car comparé à cet opus, les deux premiers volets de Sasori ne sont que des brouillons de débutant. Beast Stable est un violent coup à la face, ce genre d’expérience formelle quasi divine, comme a pu l’être La Marque du Tueur de Seijun Suzuki.

Le premier Sasori était un pur WIP (Women In Prison), tandis que le second s’en affranchissait légèrement. Evolution logique, Beast Stable se démarque par son ambiance délicieusement glauque proche du western urbain. Exit la folie destructrice des deux premiers opus, Beast Stable se veut plus posé. Ce qui ne veut pas dire moins violent. Il l’est même encore plus, dans son réalisme forcené, dans sa poésie lugubre. Fable urbaine sans concessions, Beast Stable conte la survie de Sasori, son réapprentissage de la vie sociale, sa peur de perdre ce à quoi elle goûte enfin. Sasori redevient même Nami, se fond parmi les autres humains, et trouve même un travail. Jusqu’à ce que la réalité policière la rattrape en même temps qu’une ancienne codétenue, et que Sasori renaisse. Le film nous plonge donc au plus profond du coeur de Sasori, tiraillée entre sa nature sauvage et son besoin d’humanité.

Mais le Scorpion pique quand il se sent en danger, et les événements vont amener Nami à se défendre. Sous ses dehors de western urbain, Beast Stable reste cependant comme son prédécesseur, un manifeste féministe assez fort, Sasori se présentant comme une défenseuse de la femme. Elle croisera les pires hommes qu’il soit, du yakusa violent au docteur pratiquant des avortements illégaux. Tous périront, piqués à mort par le Scorpion. Mais ce qui reste surtout après le visionnage de Beast Stable, c’est le lyrisme de l’ensemble. Shunya Ito a su en effet mettre en scène des scènes poignantes, à la beauté formelle évidente, comme celle des égouts ou celle où Nami se passe un couteau le long des yeux. Des yeux magnifiques, soit dit en passant, ceux d’une Kaji Meiko éblouissante de magnétisme comme à son habitude.

LES PLUS LES MOINS
♥ L’ambiance glauque
♥ Très réaliste
♥ Le message du film
⊗ …
Malgré un texte de quelques phrases (Terminator avant l’heure), elle réussit par son seul regard à faire vivre Sasori. Quand en plus le tout est emballé dans un scope parfait et que les lumières sont travaillées à l’extrême jusqu’à dans leur symbolique, on ne peut qu’applaudir ce chef d’œuvre, qui réussit à transcender le genre exploitation. S’il doit n’en rester qu’un de la série Sasori, que ce soit ce Beast Stable.



Titre : La Tanière de la Bête / Female Convict Scorpion : Beast Stable / 女囚さそり けもの部屋
Année : 1973
Durée : 1h27
Origine : Japon
Genre : Scorpion en Liberté
Réalisateur : Shunya Ito
Scénario : Hiro Matsuda

Acteurs : Meika Kaji, Mikio Narita, Reisen Lee, Yayoi Watanabe, Koji Nanbara, Takashi Fujiki, Tomoko Mayama

 La tanière de la bête (1973) on IMDb


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Auteur : yume

Un bon film doit comporter : sailor fuku, frange, grosses joues, tentacules, latex, culotte humide, et dépression. A partir de là, il n'hésite pas à mettre un 10/10. Membre fondateurs de deux clubs majeurs de la blogosphere fandom cinema asitique : « Le cinema coréen c’est nul » World Wide Association Corp (loi 1901) et le CADY (Club Anti Donnie Yen).
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