[Film] Ring of Fury, de Tony Yeow et James Sebastian (1973)


On a tué son père, rendu sa mère aveugle, brûlé sa maison, violé son amie et kidnappé sa copine, maintenant Peter Chong n’a plus qu’une chose en tête : se venger.


Avis de Ryô Saeba :
Tourné en 1972-73, au moment même où l’industrie cinématographique singapourienne des premiers temps déclinait doucement, Ring of Fury, production indépendante, apportait un souffle nouveau. Peter Chong, champion de karaté alors au sommet de sa forme, allait être le cœur du film, incarnant un jeune homme tenant une petite échoppe alimentaire, qui refuse d’être racketté, mais n’a pas les moyens de se défendre. Jusqu’à ce qu’un parent, le prenant sous son aile, lui enseigne l’art du combat, lui permettant ainsi de chercher vengeance et d’affronter tout un gang. L’histoire est des plus simples et emprunte tant à Bruce Lee qu’à Charles Bronson, Peter Chong étant d’ailleurs, physiquement, un croisement des deux. Le film se distingue par l’absence de trucages, la violence réelle des coups portés, ainsi que par les images qu’il offre désormais d’un Singapour très largement disparu.

Une fois terminé, le film fut immédiatement interdit pour sa violence, sa description des triades, son éloge de l’autodéfense (à un moment où le gouvernement singapourien s’efforçait lui-même de mettre de l’ordre) et surtout une scène de viol dans la forêt, avec nudité à l’appui. La scène fut d’ailleurs coupée et détruite par les censeurs… Mais cela ne sauva pas le film pour autant, lequel n’a connu jusqu’à aujourd’hui, aucune distribution commerciale à Singapour. Autorisé à passer à la télévision en 1997 (25 ans après sa réalisation…), il a eu droit à une projection privée en 2001 à destination des membres de clubs d’arts martiaux singapouriens. Il fut en revanche distribué commercialement dans les années 1970 en Malaisie et d’autres pays du Sud-Est asiatique. Film surprise de cette première édition du Festival des Rencontres Asiatiques de Paris, la copie projetée est l’unique copie du film restante à ce jour et qui était en possession non pas du réalisateur du film présent au festival, mais elle a été retrouvé directement dans la cave de l’acteur principal : Peter Chong.

Présenté comme un nanar sympathique banni à Singapour, le film tient-il ses promesses ? Et bien pas vraiment, il faut avouer qu’il tend plus du côté du navet que du nanar. Les raisons de sa censure ont été surtout liées aux représentations des triades dans le film et à la scène de viol qui elle a carrément disparue du montage. Il faut dire que le gouvernement et les conditions de censure n’ont jamais été tendre envers le cinéma que ce soit à Singapour comme en Malaisie, le dernier exemple en date est celui du film Homerun de Jack Neo qui après un énorme succès au box-office s’est vu interdire de diffusion en Malaisie car selon le gouvernement, il comportait des scènes critiquant le gouvernement de manière sous-jacente. Il n’est donc pas étonnant qu’un film, où les triades rackettent de pauvres travailleurs et où le sexe est représenté, a été banni, spécialement dans les années 70.

Le film raconte l’histoire d’un homme dont le père a été tué, la mère rendue aveugle puis tuée à son tour, son amie violée, sa petite amie enlevée et sa maison brûlée. Sorte de mélange entre Fist of Fury et One Armed Boxer, réalisé avec zéro moyen, Ring of Fury s’inspire des films de Kung Fu de l’époque et reprend le thème de la vengeance. On a le droit bien sur également au fameux entraînement du héros qui ne connaît rien aux arts martiaux et qui grâce à un travail acharné va réussir à devenir le plus fort. C’est dans cet entraînement que réside une des parties les plus intéressantes, si l’on peut dire, du film, le héros s’attache les pieds sur un gros rondeau de bois qu’il traîne en marchant sur les mains, il fait s’éteindre des bougies par la vitesse de ses coups ou encore casse de multiples planches de bois. C’est ce genre de scènes qui éveille l’intérêt du spectateur car même dans un film réalisé avec des moyens ridicules, ça n’empêche pas de trouver des petits détails ou des petites choses qui rendront la vision du film plus sympathique. Ces détails justement qui peuvent transformer un navet en nanar même si encore une fois la différence entre les deux est totalement subjective et change d’une personne à une autre. On en retrouve quand même dont une scène absolument magnifique où le grand méchant affublé d’un masque de fer semblable à celui de Fantômas est filmé de dos assis dans son fauteuil avec à la main la laisse de son énorme chien blanc qui en est au premier plan en train de fixer la caméra durant toute la scène.

LES PLUS LES MOINS
♥ La violence des coups
♥ Les scènes d’entrainement
⊗ Le gros manque de budget se ressent
⊗ Vu et revu
⊗ Des acteurs pas toujours au top
C’est donc une semi-déception que ce film surprise qui s’avère au final pas très intéressant mais soulignons tout de même le travail effectué par l’équipe du festival des Rencontres du Cinema Asiatique de Paris pour retrouver l’unique copie du film ainsi que pour avoir fait venir le réalisateur qui est vraiment quelqu’un des très sympathique.



Titre : Ring of Fury / 血指環
Année : 1973
Durée : 1h40
Origine : Singapour
Genre : Arts Martiaux
Réalisateur : Tony Yeow, James Sebastian
Scénario : Tony Yeow, James Sebastian

Acteurs : Peter Chong, Dawn Tsao, Jiu Wai, Ho Li-Kuen, Ge Hua, Jin Na, Wu Chang-Ming, Wu Kun-Jiang, Huang Shang-Wu, Zhou Da-Wei, Zhen Rong-Yuan, Ye Yun-Hong

 Xue zhi huan (1973) on IMDb


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Auteur : Ryo Saeba

C’est véritablement Shaolin Soccer qui déclencha un élan de passion à partir duquel il se lança dans la vision de films sous titrés anglais. Et là ce fut le bonheur, il avait devant lui tout un pan du cinéma à découvrir, des genres propres au cinéma de Hong Kong comme le kung fu old school, les girls with guns ou encore le Wu Xia Pian...
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