
Alors qu’ils cherchent à s’affranchir d’un lourd passé, des frères jumeaux reviennent dans leur ville natale pour repartir à zéro. Mais ils comprennent qu’une puissance maléfique bien plus redoutable guette leur retour avec impatience… « À force de danser avec le diable, un beau jour, il viendra te chercher chez toi. »
Avis de Cherycok :
Ceux qui me suivent savent que je me méfie des blockbusters américains actuels comme de la peste tant ils ne font preuve d’aucune originalité, se contentant souvent d’être des reboots, des suites, des prequels, des requels et autres produits de recyclage du passé, quand ce n’est pas un énième film de super-heros du MCU ou du DCU qui, à chaque film, creusent de plus en plus profond leur propre tombe. Et puis parfois, y’a quelque chose qui titille la curiosité, comme Sinners de Ryan Coogler (Black Panther, Creed), non pas que le film est plus original que ses petits copains puisque, de l’aveu même du réalisateur, il s’est grandement inspiré d’Une Nuit en Enfer et The Faculty de Robert Rodriguez, mais il y avait ce petit quelque chose qui inspirait confiance. Déjà, bien qu’il s’inspire du passé, il y avait quand même un petit souffle de fraicheur, avec quelque chose qui ne sortait pas d’une franchise existante, qui n’est pas une énième bobine produite à la chaine d’un gros studio, avec un réalisateur également producteur et scénariste qui pouvait donc avoir un bon contrôle sur ce qu’il avait envie de faire. Et puis les avis dithyrambiques un peu partout sur la toile, aussi bien de la presse que des spectateurs, donnaient un certain espoir. Enfin certains réalisateurs essaient quelque chose d’autre ? Oui. Mais la sauce n’a fonctionné qu’à moitié sur moi…
Sinners nous présente des jumeaux, Elijah et Elias, qui, en pleine prohibition dans les années 30, ont quitté Chicago pour revenir dans leur petite ville natale dans le Mississipi avec un gros paquet d’argent. Voulant se poser, ils rachètent à des blancs du Ku Klux Klan une vieille scierie pour la transformer en club de blues dans lequel leur jeune cousin, un surdoué de la guitare, pourra se produire. Seulement, ce dernier a une musique telle pure que, lorsqu’il joue, la frontière entre la vie et la mort se brouille et sa musique pourrait faire revenir sur Terre des créatures maléfique, en l’occurrence ici des vampires. Lorsque Ryan Coogler explique s’être inspiré d’Une Nuit en Enfer de Robert Rodriguez, il n’y a pas à chercher bien loin pour le comprendre. Pour The Faculty, c’est plus ponctuel, avec par exemple la scène du gobage d’ail qui fait référence à celle du test de la drogue dans le film de Rodriguez, qui faisait lui-même référence au test sanguin du The Thing de Carpenter. Oui, le cinéma est un éternel recyclage au final. Sauf que, contrairement à beaucoup de ses petits copains, Ryan Coogler ne tombe dans la facilité et va faire un vrai bel enrobage à ces inspirations en traitant des thématiques de la ségrégation raciale, la culture noire et la musique qui l’accompagne, l’asservissement des populations, pour un résultat clairement plus intelligent que la moyenne des blockbusters hollywoodiens doublé d’une forme impeccable. Visuellement, Sinners est vraiment réussi. Coogler soigne ses plans, nous fait des cadrages au millimètre et se lâche même le temps d’une scène à mi-film sur un plan séquence assez dantesque dans lequel les époques vont s’entremêler sur fond de blues music. La musique est également une autre des grandes forces du film et, qu’on aime ou pas ce style musical, on finit par tapoter du pied tant certaines mélodies sont tout simplement entrainantes. Malgré une exposition un peu trop longue, toute la première moitié du film est un régal à suivre. Mais vient malheureusement la deuxième moitié, et plus particulièrement la dernière demi-heure…
A partir de là, comme l’avait fait Une Nuit en Enfer, le film va basculer dans l’horreur, fun dans le film de Rodriguez, sérieuse dans Sinners, avec l’arrivée réelle des vampires qui jusque-là n’avaient été qu’évoqués, et le film va prendre un coup dans l’aile. Non pas que mixer un film sur la ségrégation raciale et l’horreur avec des vampires soit une mauvaise idée, mais c’est ici assez bancal car cette idée est très mal amenée et, au final, relativement vaine car faisant perdre une bonne puissance du propos qui avait été présenté jusque-là. Ce final est en grande partie raté, la faute tout d’abord à cette longue scène d’action qui manque énormément de punch, de fun, en plus d’être bien trop gentillette en termes de violence et de gore. Ensuite, autant le visuel et la mise en scène posée de la première moitié était remarquable, autant Coogler montre ici qu’il a bien plus de mal à mettre en scène l’action avec un montage parfois aux fraises et un manque d’intensité dans les attaques, les coups, les impacts. On a parfois l’impression que Coogler ne sait pas quoi faire avec ces vampires, qu’il les a rajoutés pour essayer d’attirer un certain public, et ce mélange des genres a un côté artificiel. Sinners aurait été possiblement plus puissant s’il n’était pas allé dans le domaine du fantastique, l’horreur pouvant venir de l’homme qui reste un loup pour l’homme, où s’il avait su faire un mélange plus homogène entre les deux genres, en assumant à 200% tout l’arc vampirique. Ajoutez à cela un Michael B. Jordan (Creed, Black Panther), incarnant les deux frères, qui pourra rapidement être crispant, aussi bien dans sa diction et son accent un peu forcés que simplement dans sa façon de doublement errer dans les plans et vous obtiendrez un film certes plein de qualité, avec une esthétique assumée, un propos de fond intéressant, mais finalement bien trop bancal. En ce qui me concerne, ça sera un « Mouais ».
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Visuellement réussi ♥ Les thématiques abordées ♥ Excellente bande son |
⊗ Le fantastique mal intégré ⊗ Une scène d’action finale molle ⊗ Trop gentillet |
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Jouant sur le même terrain qu’Une Nuit en Enfer de Robert Rodriguez, Sinners ose sortir du moule des blockbusters hollywoodiens actuels mais la tentative n’est pas complètement réussie avec un résultat en demi-teinte. Les attentes étaient peut-être trop élevées… |
LE SAVIEZ VOUS ?
• Yao a suggéré que son personnage Bo Chow, qui a des racines chinoises, porte une amulette taoïste en or pour lui porter chance. Bo porte le collier dans le film, mais on ne le voit que partiellement.
Titre : Sinners
Année : 2025
Durée : 2h17
Origine : U.S.A / Argentine
Genre : En demi-teinte
Réalisateur : Ryan Coogler
Scénario : Ryan Coogler
Acteurs : Michael B. Jordan, Miles Caton, Saul Williams, Andrese Ward-Hammond, Jack O’Connell, Tenaj L. Jackson, Davee Maldonado, Aadyn Encalarde, Yao