[Film] Kamen Rider ZO, de Keita Amemiya (1993)

Plusieurs années après avoir subi des expériences inhumaines, Masaru Asou se réveille dans le cœur d’une montagne, entendant les cris d’une voix inconnue lui demandant de protéger Hiroshi Mochizuki, le fils du scientifique responsable des expériences. Hiroshi est poursuivi par un monstre, mais est finalement sauvé par Masaru qui devient le cyborg Kamen Rider ZO. Masaru apprend alors que le professeur Mochizuki est porté disparu depuis deux ans et que l’organisme sur lequel il travaillait est à l’origine du monstre qui a attaqué Hiroshi…

Avis de Cherycok :
Kamen Rider est l’une des franchises tokusatsu les plus importantes et populaires du japon. Créée par Shôtarô Ishinomori, produite par la Toei, avec des monstres s’inspirant très fortement de l’univers des insectes, Kamen Rider nait en 1971 sous forme de séries et le succès est immédiat avec près de 100 épisodes. A partir de là, tout va s’enchainer, allant jusqu’à créer un univers dans lequel coexistent plusieurs Riders. Kamen Rider V3, X, Amazon, Stronger, Skyrider, et au début des années 80, la franchise se met en pause télévision après Kamen Rider Super-1 (1980/81). A part un spécial TV de 45 minutes, Kamen Rider ZX (1984) et une participation des Riders dans des crossovers, le succès des Super Sentai et autres Metal Heroes met à mal celui de Kamen Rider jusque dans la moitié des années 80. En 87, c’est la renaissance de la franchise avec Kamen Rider Black et sa suite Kamen Rider Black RX l’année suivante, avec un ton plus sombre et une esthétique organique. Dans les années 90, la télévision évolue, Kamen Rider également, et la Toei expérimente de nouvelles approches avec tout d’abord Shin Kamen Rider : Prologue, mais surtout Kamen Rider ZO (1993) et Kamen Rider J (1994). Ça tombe bien parce que ces 2 derniers viennent de sortir en coffret blu-ray chez l’éditeur Roboto Films. Alors aujourd’hui, concentrons-nous sur Kamen Rider ZO.

Shin Kamen Rider : Prologue est un gros succès commercial en vidéo et un nouveau film est immédiatement mis en chantier. La Toei s’associe à Bandai, espérant que le succès du film booste les ventes de jouets et inversement. Au départ prévu comme un film de 90min, il est décidé de produire quelque chose de bien plus court, d’environ 50 minutes, pour réduire les risques au box-office, qui sera projeté dans le cadre du Toei Super Hero Fair, un évènement cinématographique qui s’est déroulé de 1993 à 1995 durant lequel trois films Toei Tokusatsu, issus de différentes franchises, étaient présentés en triple programme chaque année. Parmi ceux-là, Kamen Rider ZO de Keita Amemiya qui avait jusque-là réalisé Mirai Ninja (1988), Zeiram (1991) ou encore des épisodes de Jetman (1991) et Kyōryū Sentai Zyuranger (1992), en plus de travailler sur le character design de plusieurs tokusatsu (Spielvan, Metalder, Winspector). Amemiya va clairement amener son style et toute sa folie visuelle se ressent ici, aussi bien dans les décors que dans les costumes, les effets spéciaux, le look global de la chose. Il teste ici tout ce qu’il est possible de tester en termes d’effets spéciaux : CGI, animatronics, marionnettes, latex, stop-motion, incrustations, superpositions d’images, morphing, matte painting, … Amemiya y trouve ici un énorme terrain de jeu et ce Kamen Rider ZO est un régal même pour les plus allergiques au genre, ici bien plus adulte que Bioman ou Power Rangers qui sont souvent la première approche du public à ce genre de divertissement.

L’univers visuel est souvent assez fou, très audacieux, et ce dès la scène d’introduction dans cette espèce de caverne étrange. On est ici dans quelque chose de plus dark qu’à l’accoutumée, avec des créatures très organiques, et même une ambiance qui se rapproche parfois du body horror lors de certains effets. On sent réellement l’inspiration de Shin’ya Tsukamoto et de ses deux premiers Tetsuo, mais pas que puisqu’un des monstres au visuel assez horrible est une sorte de mix entre l’alien de Giger et d’un Freezer destroy de l’animé Dragon Ball Z. Ce n’est pas tout puisqu’on aura même droit à une araignée humanoïde qui donnera des cauchemars à tous les arachnophobes et une chauve-souris humanoïde bien creepy, kidnappeuse d’enfant, clairement source d’inspiration pour le Labyrinthe de Pan de Guillermo Del Toro. L’expérimentation, Keita Amemiya ne la fait pas seulement sur le visuel d’une noirceur parfois presque poétique, mais aussi dans sa mise en scène, empruntant des effets de caméra à droite à gauche (coucou Evil Dead) qu’il refait à sa sauce, mais aussi dans les scènes d’action. Ces scènes d’action, bien que souvent courtes, sont très aériennes, à grands renforts de câbles (parfois malencontreusement voyants), remplies de cascades souvent impressionnantes, pour un résultat réellement fun pour qui a un tant soit peu aimé Bioman et autres X-Or dans sa jeunesse, ici en bien plus adulte, plus organiques, et plus violent malgré tout (le liquide visqueux sortant de membres coupés). Le rider attaque comme un prédateur et Amemiya aime le filmer sous tous les angles pour bien le maitre en valeur, avec des ralentis bien placés et des bruitages soignés. Malgré des moments de silence presque contemplatifs qui semblent être là pour accentuer la mélancolie du Rider, ce Kamen Rider ZO se fait très rythmée et bien qu’il ne fasse que 48 minutes génériques compris, il semble en durer à peine 20. Est-ce signe qu’on a passé un très bon moment ? Très certainement.

Titre : Kamen Rider ZO / Kamen Raidâ Zetto Ô / 仮面ライダーZO
Année : 1993
Durée : 0h48
Origine : Japon
Genre : Tokusatsu
Réalisateur : Keita Amemiya
Scénario : Noboru Sugimura

Acteurs : Hiroshi Tsuchikado, Shoei Shibata, Isao Sasaki, Naomi Morinaga, Kenji Ohba, Hiroshi Inuzuka, Masaru Yamashita