[Film] 8MM (1999)

Un snuff film en 8mm est retrouvé dans le coffre fort d’un milliardaire récemment décédé. Sa femme va embaucher le détective privé Tom Wells pour enquêter sur le film, retrouver qui l’a fait, qui l’a filmé et savoir si la mort de la jeune fille est réelle ou truquée. Tom Wells va alors plonger dans le monde de la pornographie, une descente aux enfers qui le changera…

Avis de Rick :
Joel Schumacher, on en attendait plus rien en 1998. Après quelques films surprenants en début de carrière et au début des années 90, avec par exemple le film de vampires Génération Perdue en 1987 où Chute Libre avec Michael Douglas, il perd toute crédibilité en réalisant à la suite Batman Forever et l’infâme Batman et Robin, en 1995 et 1997. Et pourtant, il signe un an après ce qui sera sans doute un de ses meilleurs films, et surtout son dernier bon film avec ce 8MM. Le thème du snuff ou l’exploration du monde de la pornographie est plutôt rare au cinéma, encore aujourd’hui. En 1996, on avait eu Tesis de Alejandro Amenàbar, qui nous parlait déjà d’une quête sur l’origine d’un snuff film. Au tour de Hollywood de s’emparer du sujet, avec un budget beaucoup plus confortable (moins d’un million pour Tesis, environ 40 millions pour 8mm). Encadré par Andrew Kevin Walker au scénario (Seven), Robert Elswit à la photographie (Boogie Nights, qui traitait déjà de la pornographie, The Town) et d’un prestigieux casting, Joel Schumacher peut se lancer dans l’aventure, avec un sérieux qu’on ne lui connaissait plus, et que l’on ne retrouvera plus par la suite (preuve, le récent Effraction, où il retrouve Nicolas Cage d’ailleurs). 8mm nous propose de suivre donc les aventures de Nicolas Cage, détective privé pour l’occasion, dans sa recherche des auteurs d’un film 8mm,  pour prouver que les images sont fictives, ou pas.

Et dés les premiers instants, on se rend compte que le père Schumacher est inspiré. L’histoire ne perd pas de temps, la mise en scène est efficace est rythmée, le montage va à l’essentiel, et surtout, l’ensemble est très sobre et sérieux. On est bien loin des couleurs fluos et des délires ineptes de Batman et Robin donc. Nicolas Cage, maintenant connu pour ces cabotinages et pour accepter tout et n’importe quoi, était alors en pleine période d’or, après The Rock pour Michael Bay, Volte/Face pour John Woo et Snake Eyes pour Brian De Palma. Pour autant, jusque là, malgré des rôles variés (flic incapable, bad guy, flic ripou), ces rôles ne lui permettaient pas d’aller au bout de son jeu. C’est avec 8mm, et A Tombeau Ouvert pour Scorsese l’année suivante que Cage trouve enfin des rôles torturés, intenses, qui ne lui ressemblent pas forcément. Avec 8mm (comme pour A Tombeau Ouvert donc), on est bien loin du simple film de divertissement un peu gentillet. 8mm, malgré son gros budget et son statut de film de studio, est bel et bien une descente aux enfers.

On est forcément bien loin des dérapages et du choc visuel que représente depuis A Serbian Film, mais le public visé et le but du métrage n’est pas le même. Tom Wells (Cage donc) va commencer son enquête de rien, avec juste un film, qui va le mener petit à petit à une date de fin de commercialisation de pellicule, puis à une personne disparue, avant de le mener dans l’univers de la pornographie, bien entendu, à Hollywood. A partir de là et au fur et à mesure de ses rencontres, le personnage va pouvoir changer, en pénétrant (pas de jeu de mots !) dans un univers sombre qui n’est absolument pas le sien et dont il ne veut pas faire parti non plus. Au départ mari et père de famille, Tom plonge dans cet univers de sexe et de violence, une facette moins connue du monde du cinéma, une facette dont il ne veut pas en savoir trop, et va se retrouver perdu.

Il embarquera avec lui Max, un jeune vendeur dans une boutique pornographique (Joaquin Phoenix), malheureusement, pour l’un comme pour l’autre, il n’y a pas de retour en arrière possible. Ce qu’ils vont vivre et découvrir vont les marquer à tout jamais. 8mm est une plongée dans cet univers, un film intéressant que l’on n’a pas forcément l’habitude de voir. Outre son aspect sombre et réaliste, la très bonne idée du film est de ne jamais verser dans un lot d’explications mielleuses pour justifier telle ou telle chose. Certaines choses se produisent tout simplement parce que certaines personnes le permettent, point barre. Le portrait dressé par le film des personnages et des différentes personnes œuvrant dans le milieu est loin d’être réjouissant, et les acteurs se donnent à fond pour faire ressortir cette impression. Ainsi, au niveau des pornographes, on retrouvera les excellents James Gandolfini (Get Shorty, True Romance), Peter Stormare (Fargo, Dancer in the Dark) et Anthony Heald (Le Silence des Agneaux), se donnant tous à fond dans leurs rôles.

Bien entendu, avec un tel sujet, on aurait pu attendre un métrage bien plus sombre, mais venant de la part de Schumacher, 8mm surprend. Le film est rondement mené et le rythme ne faiblit pas. Le métrage possède en plus quelques scènes vraiment marquantes au fur et à mesure de la progression de l’enquête. Il est juste dommage que tout le monde se laisse aller dans une dernière partie toujours aussi sombre et violente, mais bien plus simpliste et prévisible que ne l’était le reste du métrage. 8mm reste néanmoins un excellent métrage, nous montrant un univers différent, sans pour autant dépasser les limites et être réservé à un certain public. Encore aujourd’hui, le snuff et les meurtres filmés sont encore au cœur de métrages de plus en plus extrêmes ou versant carrément dans le genre horrifique, comme A Serbian Film ou dans une moindre mesure, Sinister.

Miracle, Schumacher remonte après Batman et Robin en nous proposant un mix sombre de violence et de sexe pour un film policier plus que convaincant et prenant.


Titre : 8MM
Année : 1999
Durée : 1h59
Origine : U.S.A
Genre : Thriller
Réalisateur : Joel Schumacher

Acteurs :  Nicolas Cage, Joaquin Phoenix, James Gondolfini, Peter Stomare, Anthony Heald et Chris Bauer


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Auteur : Rick

Grand fan de cinéma depuis son plus jeune âge et également réalisateur à ses heures perdues, Rick aime particulièrement le cinéma qui ose des choses, sort des sentiers battus, et se refuse la facilité. Gros fan de David Lynch, John Carpenter, David Cronenberg, Tsukamoto Shinya, Sono Sion, Nicolas Winding Refn, Denis Villeneuve, Shiraishi Kôji et tant d'autres. Est toujours hanté par la fin de Twin Peaks The Return.
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