[Film] Parents, de Bob Balaban (1989)


Dans les années 50, la famille Lamele s’installe dans son nouveau foyer, une maisonnette parfaite, tout comme les autres maisons du quartier, plus colorées et vivantes les unes que les autres. Nick et Lily, les parents, s’entendent gracieusement et nulle dispute ne vient troubler leur vie conjugale. Le problème subsiste en la personne de Michael, leur petit garçon, dérangé et silencieux et de plus en plus soupçonneux vis-à-vis de ses parents. Et il compte bien découvrir pourquoi les repas sont sans cesse composés de plats à base d’une viande bien rouge, bien tendre, et surtout en quantité abondante.


Avis de Cherycok :
Bob Balaban s’est fait connaître du grand public en jouant des seconds rôles dans des films tels que Rencontres du 3ème Type (1977), 2010 L’Année du Premier Contact (1984), Gosford Park (2001) ou encore Truman Capote (2005). Les fans de la série Friends le connaissent pour avoir interprété, le temps d’un épisode, le père de Phoebe Buffay dans la saison 5. Mais le bonhomme œuvre également au poste de réalisateur, principalement dans les séries télé et les téléfilms, mais pas que. Quelques longs métrages sont aussi à souligner dans sa filmographie comme ce Parents sorti en 1989 et qui est resté, pour une raison inconnue tant le film est intéressant, complètement inédit chez nous jusqu’en 2014. 25 ans pour voir arriver sur nos étals cette bobine mêlant avec pas mal de brio ironie, humour noir, cynisme, angoisse, perversité et mélancolie.

Parents commence comme une comédie légère centrée sur une famille modèle dans les années 50, fantasme des heures de gloire des Etats-Unis et du rêve américain. Un papa bosseur, plein de principes, autoritaire et protecteur. Une maman aimante, un peu cul-cul et protectrice. Un jeune garçon de 10 ans un peu perdu qui, après avoir déménagé, va devoir s’habituer à son nouveau lieu de vie et se faire de nouveaux copains à l’école. On se rend compte que l’enfant est très étrange, avec des côtés inquiétants. Toutes les nuits il fait des cauchemars très étranges et sanglants. A son école, il parle de sucer des os de chats pour devenir invincible, de se servir d’humains pendus, à qui on aurait coupé les mains, pour les brûler et avoir du chauffage illimité. Très rapidement, ce sont ses parents qui deviennent à leur tour très inquiétants, plus particulièrement le père, avec des plans insistants sur de la viande nous questionnant immédiatement sur un cannibalisme potentiel. Au fur et à mesure que le film avance, une perpétuelle question nous taraude : ce couple est-il réellement cannibale ou est-ce que le petit garçon a un problème psychologique qui fait qu’il prend ses cauchemars pour des réalités ? Et toute la première heure (sur les 1h22 générique compris), le film va jouer sur cette ambiguïté, provoquant parfois un malaise chez le spectateur qui se demande s’il est aussi raisonnable de penser qu’un si jeune enfant est un psychopathe en devenir, que de se dire que certains membres de cette famille sont des cannibales et que personne dans le voisinage ne se soit aperçu de quoi que ce soit. Bien entendu, il est assez facile de se faire sa propre idée, d’autant que le film est une critique assez grinçante de cette espèce d’idéologie de la société de consommation et des normes sociales que cela engendre. Parents lève enfin le mystère à 1h05, pour laisser place à un final qui risquera de diviser, avec d’un côté les contents à qui ont aura apporté quelques réponses, et de l’autre les déçus qui auraient préféré que le film laisse planer le doute même après le générique de fin.

Parents bénéficie d’une bonne mise en scène, certes classique mais présentant une très belle retranscription des années 50 et une jolie photographie. On pense parfois au cinéma de David Lynch pour le côté expérimental et artistiquement surréaliste de certaines scènes et la lenteur des mouvements de caméra, à Shining de Kubrick pour le traitement des angoisses du jeune garçon, et même au cinéma d’Alfred Hitchcock sur certains plans. Le rythme du film a beau être lent, jouant beaucoup sur les plongées / contre-plongées, il fourmille de très bonnes idées. Notons qu’on ne joue pas ici la carte de l’horreur. Pas d’effets gores à attendre, Parents joue essentiellement sur le non-dit, le hors-champ, permettant aux plus sensibles de regarder sans trop de souci mais donnant encore plus de force à l’impact psychologique et traumatique que les scènes peuvent avoir sur le jeune enfant. Le travail effectué sur la musique est à saluer. Tantôt inquiétante, tantôt préférant laisser des silences pesants pour plomber l’atmosphère, la bande son participe activement à cette montée en puissance de l’inquiétude ambiante qui règne. Ce qui est fort par-dessus tout, c’est que le réalisateur arrive à faire de l’inquiétant avec des situations tout à fait normales : un repas en famille, une nuit de sommeil, une journée de classe, … Tout passe par le très bon jeu des personnages. Randy Quaid (Brokeback Mountain, Kingpin) incarne un personnage qui fait peur rien qu’à son regard, et le très jeune Bryan Madorsky, dont c’est le seul et unique film, est convaincant à chacune de ses apparitions dans un rôle qu’on imagine assez compliqué. Ils portent clairement le film vers le haut.

LES PLUS LES MOINS
♥ Le bon casting
♥ La mise en scène réussie
♥ Une ambiance très particulière
⊗ Un poil lent
Parents est un film pas si facile d’accès. Lent dans sa construction, ne succombant pas à la facilité du gore, il traite avec brio le sujet vu et revu du cannibalisme mais du point de vue paranoïaque d’un enfant. Un plaisir nostalgique mêlant humour noir et suspens inquiétant.



Titre : Parents
Année : 1989
Durée : 1h22
Origine : U.S.A / Canada
Genre : Cauchemar éveillé
Réalisateur : Bob Balaban
Scénario : Christopher Hawthorne

Acteurs : Randy Quaid, Mary Beth Hurt, Bryan Madorsky, Sandy Dennis, London Juno, Kathryn Grody, Deborah Rush, Graham Jarvis, Helen Carscallen, Warren Van Evera

 Parents (1989) on IMDb


















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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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