[Film] Midnight Special, de Jeff Nichols (2016)

Fuyant d’abord des fanatiques religieux et des forces de police, Roy, père de famille et son fils Alton, se retrouvent bientôt les proies d’une chasse à l’homme à travers tout le pays, mobilisant même les plus hautes instances du gouvernement fédéral. En fin de compte, le père risque tout pour sauver son fils et lui permettre d’accomplir son destin. Un destin qui pourrait bien changer le monde pour toujours.


Avis de Iris :
Il était annoncé depuis un petit moment et le synopsis donnait envie, le cinquième film de Jeff Nichols (aux commandes de Take Shelter et de Mud – Sur les rives du Mississippi entre autres) est arrivé chez nous voici un petit mois. Accompagné de promesses entre intrigues et SF qui laissaient présager un bon moment de cinéma, ce petit film de 18 M$ de budget fut donc au programme de ce mardi orageux. En sommes-nous sortis aussi séduits que prévu ? Oui… et non.

La première partie du film est sincèrement une réussite. Une ambiance lourde, pesante, alternant entre road movie et chase movie avec une des premières scènes d’introduction qui reste mémorable où une Chevrolet file, tous phares éteints, sur les routes du Texas, pilotée de mains de maître par un conducteur armé de lunettes infrarouge, juste parfaite ! Ce ne sont pas les dialogues qui vont venir perturber le tout car le film, il faut le dire, est avare de mots inutiles. Donc nous suivons nos trois héros, ce père de famille qui amène son fils on ne sait pas encore trop où, aidé d’un second homme dont on ne sait pas encore ce qui le relie au premier et un enfant, sage comme on en rêverait, obéissant, qui ne râle pas, qui n’a pas envie de faire pipi au bout de dix minutes de trajet, qui lit sagement sans avoir envie de vomir en trois secondes, qui ne se plaint pas, ne soupire pas… Bref, un enfant-témoin ^^. On comprend que cet enfant a une importance capitale mais pour le moment nous n’en saurons pas plus. Et on entre bien dans l’ambiance avec une folle envie d’en savoir plus.
En parallèle la chasse se met en place et nous découvrons deux autres « organisations » qui vont poursuivre nos fuyards : la secte dont s’échappent Roy et son fils s’apprête à envoyer des hommes à leurs trousses tout comme le FBI qui décide d’enquêter sur ladite secte dont les membres auraient dernièrement acheter une grande quantité d’armes et accessoirement eu accès à des informations top secrètes du gouvernement américain (bah les gars faut pas trop jouer non plus) et qui va lancer au cul des évadés tout ce qu’ils ont à disposition : FBI, CIA, NSA, US Army, bref, la totale. Et tout ça pour quoi ?

Eh bien parce que le petit Alton, sous ses airs de parfait petit enfant (mais parfait à un point…) eh bien, il a de la lumière bleue qui sort des yeux au cours de sortes de crises, des mains aussi, fait trembler la terre et monter les compteurs Geiger, et par-dessus le marché, il (d’après ce que je comprends) capte des communications militaires et gouvernementales et les transmet via ses éclairs occulo-lumineux à d’autres personnes. Mais aussi étrange que ça puisse paraître jusque-là, ça passe vraiment bien. L’ambiance est excellente et on suit le tout très facilement. Les CGI sont moyens mais encore, on ne saigne pas des yeux donc tout va très bien. On a même la surprise de rencontrer un Kylo Ren-Adam Driver qui veut montrer qu’il peut faire autre chose que Star Wars et qui y parvient plutôt pas mal. Comme le reste du casting d’ailleurs, aussi bien Michael Shannon et sa gueule cassée, que Jaeden Lieberther très bon en « mini-robot », ou encore Joel Edgerton en ami fidèle prêt à exécuter ce qu’il est nécessaire de faire pour accomplir le destin d’un enfant dont il ne sait bien. Mention spéciale pour Kristen Dunst qui livre une excellente prestation tout au naturel.
On aura donc en sous-jacence le lien indéfectible entre un père pétri d’amour pour son fils et ce qu’il sera capable de faire pour lui offrir un destin. Beau et puissant. D’autant qu’il nous semble que ce qui motive le père sera à la fois d’offrir un avenir meilleur à son fils et à la fois de l’extraire du carcan fanatique d’une secte étrange. On a envie de les voir réussir, on le vit avec eux, on a peur avec eux.

Mais, oui il y a un mais… deux gros MAIS même, la seconde partie du film va, à mon sens, légèrement partir en couille…
D’une part parce que ne remettant jamais en cause ou ne serait-ce qu’en doute, la puissance du gamin et la réalisation de sa « prophétie », le réalisateur n’insère jamais le moindre petit élément contradictoire et fait de cet enfant mi-messie mi-Kal El (oui je me la pète un peu en collant le nom Kryptonien de Super-Man) un être dont le destin ne fait aucunement place à l’incroyance. Et c’est légèrement gênant je dois admettre, de voir finalement tout ce petit monde n’avoir d’autre choix que d’embrasser les croyances sectaires venues du fin fond des contrées sudistes du Texas. Et de nous y amener par la même occasion tout comme Lucas (le troisième homme) va être amené à croire. Alors même si le parallèle avec Superman est capilotracté, les allusions y sont fortes tout de même avec le comics très présent et la fameuse question sur la Kryptonite mais également avec un enfant que l’on devine extraterrestre, un père tel le père kryptonien de Superman qui fera tout pour le soustraire aux pouvoirs en place, « l’enfant » aux rayons lumineux dans les yeux, presque robotisé tant il est sérieux, bref un vrai petit Clark Kent en puissance. [ATTENTION SPOILER] Et évidemment, tout va se réaliser comme c’était prévu, prévu par l’enfant lui-même et par la secte à laquelle finalement le père n’a jamais cessé de croire, et on va assister à ce moment-là à un petit n’importe quoi autant visuel que scénaristique. Parce que le gamin va en effet atteindre le point de rendez-vous et trouver le monde duquel il est issu. [FIN DE SPOILER].

Et c’est là que le deuxième MAIS intervient. Quand on n’a pas de budget faut savoir suggérer au lieu de vouloir montrer parce que les effets spéciaux sont assez foireux (rho c’est pas du grand mauvais mais tout de même ce n’est pas grandiose non plus) et surtout, surtout c’était inutile et vraiment scénaristiquement bancal. Parce que si on reste sur de la suggestion on peut encore laisser une place au doute, où chacun croit ce qu’il veut comme c’est le cas d’ailleurs un moment plus tôt dans le film. Là on va avoir un mélange de clin d’œil à rencontre du troisième type de Spielberg et d’allégorie de la foi (viens vers la lumière mon frère et abandonne ce monde de souffrance qui n’est pas le tien) et de, selon les sensibilités, l’allégorie de la mort (la lumière au fond du tunnel) de la renonciation et de l’abandon [ATTENTION SPOILER] inversée pour le coup puisque c’est le fils qui choisira d’abandonner ses parents pour vivre dans son monde. [FIN DE SPOILER] et je n’ai pas du tout adhéré. J’ai même pas du tout aimé cette partie-là. D’autant que cela crée un vrai décalage avec la suite, et notamment des interrogatoires assez bizarres, oui mais les gars, on a tous vu le même truc ! La fin en revanche retombe dans l’ambiance du départ et reprend donc ses racines dans ce que le film a su proposer de meilleur.

LES PLUS LES MOINS
♥ L’ambiance
♥ La BO
♥ La première partie
⊗ La seconde partie
⊗ Les évidences
Midnight Special n’est finalement pas le film excellent qui était attendu. Après une première partie très bonne à l’ambiance bien retranscrite, il se perd dans une seconde moitié bancale et intrusive sans que le spectateur n’ait d’autre choix que l’acceptation. Sauf que moi pour le coup c’est plutôt rejet. Dommage.



Titre : Midnight Special
Année : 2016
Durée : 1h46
Origine : U.S.A
Genre : Le messie est kryptonien !
Réalisateur : Jeff Nichols
Scénario : Jeff Nichols

Acteurs : Michael Shannon, Jaeden Lieberher, Joel Edgerton, Adam Driver, Kirsten Dunst, Sam Shepard, Paul Sparks, Sean Bridgers…

 Midnight Special (2016) on IMDb


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Auteur : Iris

Aime tout ce qui de près ou de loin fait appel à tout sauf au réalisme, fan de SF, tombée petite dans l’Heroïc Fantasy, amatrice de grandes sagas impliquant Elfes, nains et autres trolls, fan de vampirades en tous genres ou de délires Lycanthropiques. Peut se satisfaire de l’esthétique et relativement bon public dès lors que cela ne concerne pas les requins à trois têtes ou la nouvelle vague. Impressionnable en cas de scènes de torture ou d’esprit malfaisant, a parfois besoin de décompresser devant un gros blockbuster décérébrant.
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