[Film] Hellraiser 3 : L’enfer sur Terre, de Anthony Hickox (1992)

Joanna, une jeune journaliste, assiste à la mort abominable d’un adolescent. Sa seule piste : Terry, la petite amie de la victime, dont elle retrouve la trace dans un night-club. Terry lui révèle que la clé du mystère se trouve dans une mystérieuse boîte…


Avis de Rick :
Après le succès de Hellraiser et de sa suite, en 1987 et 1988, les producteurs ne pouvaient pas en rester là. L’idée d’un troisième opus est rapidement là. Hellraiser gagne après tout en popularité, et surtout, Pinhead devient un icône du cinéma d’horreur. Mais quelques changements feront que le projet mettra plus de temps que prévu avant d’arriver, et surtout que l’équipe responsable du film sera bouleversée aussi. New World, qui avait produit les deux premiers films, fait faillite, et les droits sont rachetés en 1990 par Larry Kuppin, qui récupère dans la foulée également les droits des Enfants du Maïs. Trans Atlantic Entertainment est alors créé. Peter Atkins reste au scénario, mais pas mal de changements auront lieu. L’implication de Clive Barker est un peu moindre, tandis que la saga, jusque là typiquement anglaise, passe en Amérique. Une anecdote anodine en soit, sauf qu’en fait, absolument pas. Car qui récupère les droits de Hellraiser en 1992 ? Dimension Films, et donc, Miramax, et donc par extension, les frères Wenstein, qui récupèrent également dans la foulée les droits de la saga Halloween. Des problèmes surviennent immédiatement, la direction du film change, Pinhead est mit en avant. De petite production horrifique avec un univers bien à lui, Hellraiser change et devient dans un sens plus mainstream. Peter Atkins devait réaliser, mais Miramax trouve qu’il manque d’expérience (il n’a après tout jamais rien réalisé). La société demande à Peter Jackson qui s’est fait connaître avec Bad Taste puis Les Feebles, mais il refuse. Mais au départ, Tony Randel était partant pour continuer la saga. Sauf que… ben non ! C’est finalement Anthony Hickox qui récupère le film. Après tout, il avait prouvé son amour pour le genre et pour les monstres en signant les deux sympathiques Waxwork en 1988 et 1992.

Et si Hickox a des films plutôt sympathiques dans sa carrière (rajoutons le bancal mais sympathique Warlock 2), on peut le dire facilement, son style n’a rien à voir avec Hellraiser, et donc avec les styles plutôt sobres de Barker et Randel. Et s’il aime l’horreur, il reste beaucoup plus léger dans son approche que ce que la saga nous avait habitué. Résultat des courses ? Hellraiser 3 n’est en soit pas mauvais, sa mise en scène est plutôt soignée, on sent la patte du réalisateur et ça respire bon le début des années 90, avec quelques CGI couteux mais dégueulasses, des éclairages bleutés, un usage des demi bonnettes comme Hickox les adore. Un pur produit de son époque. Mais malheureusement, Hellraiser 3 est donc le troisième opus d’une saga, une suite, et en tant qu’Hellraiser, c’est une catastrophe absolue à tous les niveaux, un film qui n’a rien comprit à son univers et à pourquoi celui-ci fonctionnait. Et donc, par extension, un film de mauvais goût, un très mauvais film pour le fan. Surtout que j’avais beau être très jeune, mais désolé Hickox, quand ton Hellraiser 3 est arrivé sur Canal + à l’époque, la pauvre âme que j’étais avait déjà vu et adoré les deux premiers opus. Hellraiser 3 fut donc une expérience amère. Et reste une expérience extrêmement amère. Car Hellraiser 1 et 2, c’était avant tout un univers, une ambiance glauque, du gore qui faisait très mal. C’était l’histoire de cette boite, ces personnages qui voulaient dépasser les limites, et des créatures à la fois fascinantes et dérangeantes, qui parvenaient à marquer et qui, paradoxalement, étaient très en arrière plan. Hellraiser 3 fait l’exact opposé, jusqu’à dénaturer totalement l’univers. Oui, la boite est toujours là, oui les monstres également, l’univers également dans le fond. Mais échangez les éléments, et on obtient une ambiance en arrière plan, voir inexistante, des monstres au premier plan et donc plus du tout passionnants ni fascinants, et saupoudrez le tout d’explosions en tout genre et de carnages qui n’ont même pas de raisons d’être, et voilà Hellraiser 3.

Hellraiser 3 donne l’impression que la saga cède à la facilité pour être dans l’ère du temps, pour devenir au final un banal slasher, où le monstre, Pinhead en l’occurrence, est en avant. Les personnages principaux sont au final en arrière plan, et c’est bien le monstre qui bouffe l’écran, qui est développé, et qui passe son temps à parler. Là où les cénobites ne s’en prenaient dans les premiers opus qu’aux personnages qui ouvraient la boite, le scénario nous sort ici une excuse plutôt bidon pour augmenter le nombre de morts, et ainsi, n’importe qui passant devant Pinhead sera tué. Et il va y en avoir du monde, comme le prouve la scène du carnage dans la boite de nuit. Scène en soit plutôt fun, MAIS… mais non, qui n’a rien à faire là. Surtout que le réalisateur s’est alors lâché pour créer de nouveaux cénobites (seul Pinhead des anciens films est présent) et innover dans les mises à mort. Le problème, c’est qu’en plus de dénaturer totalement l’univers, Hellraiser 3 ne fait pas dans la subtilité, et plonge dans le ridicule total. Le visage de Pinhead se matérialisera dans un glaçon pour ensuite venir s’empaler dans la bouche d’une femme… Des cd vont se mettre à voler pour tuer le DJ de la boite de nuit… Non mais non ! Si les mises à morts sont ridicules, le traitement des différents cénobites ne rattrape rien.

Pinhead, lui qui avait une présence si particulière dans les deux premiers films, est donc la vedette, et se permettra même quelques notes d’humour mal venues, ressemblant alors pour le coup beaucoup plus à Freddy Krueger. Quand aux autres cénobites, arrivant tardivement, ils sont à l’image de ce que le film devient dans sa dernière partie. Car non content d’avoir livré une première partie moyenne mais dans le fond convaincante (prenant son temps, essayant un minimum de continuer l’univers), Anthony Hickox se dit que maintenant, il faut sortir les grands moments, tout faire exploser. Le film se transforme alors en course poursuite, avec explosions de voitures, bouches d’égouts volantes et tout à la clé. Les autres cénobites donc iront du ridicule au peu convaincant. Le mot clé de cette dernière partie : il faut de l’horreur « fun ». On se retrouve avec un cénobite qui lance des cd, un autre qui crache du feu… Qu’est-il arrivé à Hellraiser ? Hellraiser 3 aurait du (et par moment, il l’est) être la prolongation d’un univers, et non un changement de direction radical qui renie presque ses racines. Oui, nous aurons bien quelques révélations sur Pinhead, par moment quelques idées intéressantes surnagent, et en soit, du moins pour le spectateur qui n’est pas fan, Hellraiser 3 peut être divertissant. Mais cela ne change pas à mes yeux qu’il s’agît d’un film non respectueux, qui se veut cool et fun, et donc se plante intégralement ou presque. Notons que le score musical de Randy Miller reprend pas mal de thèmes des deux premiers films, et semble être le seul élément qui cherche la continuité sans renier intégralement le passé. Bien avant les DTV de la saga, Miramax emmène déjà Hellraiser à la dérive.

LES PLUS LES MOINS
♥ Quelques rares idées
♥ Certaines scènes, prises hors contexte
⊗ Le ton plus cool et fun du film
⊗ Les nouveaux cénobites
⊗ Pas toujours intéressants
⊗ L’humour
note8
Hellraiser 3 est une incroyable douche froide. Pas mauvais techniquement, mais mauvais dans le fond et en tant que continuité du mythe, limite violé.



Titre : Hellraiser 3 : L’enfer sur terre – Hellraiser 3: Hell on Earth

Année : 1992
Durée :
1h33
Origine :
U.S.A.
Genre :
Horreur
Réalisation : 
Anthony Hickox
Scénario : 
Peter Atkins d’après Clive Barker
Avec :
Terry Farell, Paula Marshall, Doug Bradley, Kevin Bernhardt, Ken Carpenter et Lawrence Mortorff

 Hellraiser III: Hell on Earth (1992) on IMDb


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Auteur : Rick

Grand fan de cinéma depuis son plus jeune âge et également réalisateur à ses heures perdues, Rick aime particulièrement le cinéma qui ose des choses, sort des sentiers battus, et se refuse la facilité. Gros fan de David Lynch, John Carpenter, David Cronenberg, Tsukamoto Shinya, Sono Sion, Nicolas Winding Refn, Denis Villeneuve, Shiraishi Kôji et tant d'autres. Est toujours hanté par la fin de Twin Peaks The Return.
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