[Film] Centurion (2010)

En 117 AP. J.C., la domination de l’empire Romain est mise à mal au nord de la Bretagne par les Pictes. Le centurion Quintus Dias, dont la garnison fut massacrée par les Pictes, est affecté à la Neuvième Légion qui est chargée de détruire cette tribu guerrière. L’expédition tourne au carnage et la Neuvième Légion est rapidement décimée. Quelques survivants, mené par Quintus, tentent de délivrer le commandant de la légion, Titus Flavius Virilus, retenu prisonnier dans le campement des Pictes. Cette mission sauvetage dans une terre inconnue va se transformer en chasse à l’homme sans merci.


Avis de Pti Denis :
A l’image de films concurrents sortis sur une période rapprochée (La Guerre des Boutons/La Nouvelle Guerre de Boutons en 2011 ou La Chute de la Maison Blanche/White House Down en 2013), la Neuvième Légion inspira deux films anglais sortis à quelques mois d’intervalles. Cette légion Romaine, apparue au Ier siècle avant Jésus Christ, était une des troupes armées les plus redoutées de l’empire romain. Elle est entrée dans la légende car elle aurait mystérieusement disparu lors d’une cuisante défaite. Les dates, les lieux et les noms des assaillants victorieux diffèrent selon les sources.

Curieusement, la Neuvième Légion (pourtant source possible de récits captivants) ne fut pas beaucoup abordée par le Péplum. La seule adaptation connue est la série télévisée The Eagle of the Ninth, produite par la BBC en 1977 et basée sur le roman éponyme de Rosemary Sutcliff publié en 1954.
Les succès de 300 au cinéma et des séries Rome et Spartacus durant la seconde moitié des années 2000 ont relancé l’intérêt du public pour le péplum. En 2010, deux films Anglais vont mettre en scène la Neuvième Légion. Partant du même postulat, les deux œuvres diffèrent totalement dans le traitement. Si le deuxième film, L’aigle de la Neuvième Légion de Kevin Macdonald (adaptation du roman de Rosemary Sutcliff) est autant une aventure épique qu’un drame initiatique, le premier est avant tout un survival hargneux.
Peu étonnant au regard de la filmographie du réalisateur et scénariste de Centurion : Neil Marshall.

Film de loups-garous avec Dog Soldiers, film de monstres avec The Descent, Post-nuke avec Doomsday. Quel que soit le genre ou sous-genre dans lequel évoluent les protagonistes de Neil Marshall, la survie est toujours au centre du récit. Passée la première partie de Centurion, le survival règne également en maître. Les pictes ont remplacé les loups-garous ou les punk cannibales, les légionnaires Romains ont pris la place des militaires surentraînés ou des spéléologues, l’enjeu est de rentrer vivant chez soi. Et force d’admettre que le spectacle est plaisant pour le spectateur venu voir un film bourrin dénué de finesse.

Bien que l’ouverture du film embrasse les codes de l’aventure épique (les paysages sauvages, les armures et épées des soldats magnifiés par la mise en scène), dès le premier assaut, en l’occurrence l’attaque par les Pictes de la garnison où officie Michael Fassbender, le film semble s’écarter du péplum traditionnel : le moindre coup d’épée tranche les membres dans des geysers de sang éclaboussant l’écran. Et ce n’est rien en comparaison du massacre de la Neuvième Légion, véritable boucherie (flèches transperçant les yeux, décapitations, égorgements) où les soldats Romains sont dépassés par des Pictes dépeints comme des sauvages à la limite de l’animalité.

L’action chez Marshall est toujours efficace, pour peu que l’on ne soit pas allergique à la Steadicam. Le réalisateur y a recours pour filmer le moindre morceau de bravoure. Il est vrai qu’une utilisation plus modérée aurait été la bienvenue (l’action n’est pas toujours lisible) mais le procédé rend le film dynamique, ce qui est le but affiché de Centurion : ne laisser pratiquement aucun répit aux spectateurs. Pari gagné.
Une fois les soldats rendus en territoire Picte, son péplum se transforme en chasse à l’homme implacable. Les uniques survivants de la Neuvième Légion sont les proies d’un escadron de Pictes, mené par Etain (Olga Kurylenko), guerrière muette particulièrement hostile aux Romains. Si l’actrice jouait la potiche de service dans Hitman ou Quantum of Solace, elle fait montre ici d’une réelle intensité, et contre toutes attentes, se révèle crédible dans ce rôle de chasseuse sans pitié, devenant même, au final, le personnage le plus marquant de Centurion avec Michael Fassbender.

Il faut bien l’avouer, excepté pour The descent, la psychologie et l’épaisseur des protagonistes n’est jamais la priorité de Neil Marshall. Centurion ne fait pas exception à la règle. Malgré son casting prometteur, ses personnages tiennent plus du stéréotype qu’autre chose. Mais dans la limite imposée par le film, ça fonctionne et voir ce commando musclé débiter des punch-line dignes d’Expendables est assez réjouissant. Même avec peu à défendre, Michael Fassbender (300, Eden Lake, X-Men le Commencement) confirme son indéniable charisme. On aurait aimé en voir plus de Dominic West (Punisher : Zone de Guerre) et de David Morrissey (le Gouverneur de The Walking Dead) dans les rôles respectifs du général Titus Flavius Virilus et du légionnaire Bothos, mais leurs personnages se réduisant au strict minimum, ils ne parviennent pas à se démarquer du reste du casting.

Pourtant, pendant 10-15 minutes, Neil Marshall octroie une pause à ses acteurs. Quintus et deux de ses hommes se cachent chez une Picte rejetée par son peuple. Le réalisateur noue une histoire d’amour entre le centurion et la jeune femme. Bien que plaisante, l’idylle n’est qu’esquissée et laisse place trop vite à la confrontation finale entre les Romains et leurs poursuivants. Même si la scène arrive de façon trop abrupte, elle est caractéristique du genre survival : l’agressé devient l’agresseur. En l’occurrence les soldats romains arrêtent de fuir, se replient dans un campement désert et tendent des pièges aux pictes. Classique mais efficace.

Les réfractaires au cinéma de Neil Marshal ne changeront pas d’opinion en voyant ce film tant Centurion est symptomatique de son style : personnages sans épaisseurs, récit simple, rythme soutenu et ultra violence complaisante. Il est vrai que l’histoire de la Neuvième Légion est évacuée pendant les ¾ du film pour laisser la place à une course-poursuite sans pitié (en revanche la fin, excellente, nous montre des dignitaires Romains gérer à leur manière la crise face au peuple que représente la défaite de la Neuvième Légion). Mais ce que Centurion perd en aventure historique, il le gagne en efficacité, en plaisir pur. Un plaisir primaire certes, mais toujours soucieux de remplir son contrat. La série B a trouvé en Neil Marshall un de ses plus fidèles piliers.

 


Titre : Centurion
Année : 2010
Durée : 1h38
Origine : Grande-Bretagne
Genre : Péplum / Survival
Réalisateur : Neil Marshall

Acteurs : Michael Fassbender, Dominic West, Olga Kurylenko, Noel Clarke, David Morrisey, J.J. Field


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  • Auteur : Pti denis

    Fan de cinéma de genre depuis tout gamin, le film d'arts martiaux HK est par-dessus tout le genre que j'affectionne le plus. Mais j'adore également l'horreur, le cinéma populaire Italien des années 60 aux 90's, le polar (d'où qu'il vienne), je prends autant de plaisir devant un gros blockbuster bien fait qu'un film de zombies fauché comme L'avion de l'apocalypse.
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