[Semaine Girls with Guns] Jour 1 : Angel, de Teresa Woo

Titre : Angel / Angels / Iron Angels / Midnight Angels / 天使行動
Année : 1987
Durée : 1h35
Origine : Hong-Kong
Genre : Girls with Guns
Réalisateur : Teresa Woo, Raymond Leung

Acteurs : Moon Lee, Yukari Oshima, Elaine Lui, Hwang Jang Lee, Alex Fong, David Chiang, Saijo Hideki, Peter Yang, Wong Hap, Sin Ho-Ying, Chan Chi-Fai, Chan Dik-Hak, Garry Chan, Chu Tau, Andy Dai

Synopsis : La police organise une grosse opération pour mettre fin au trafic de drogue du Triangle D’or et brûle tout un champ où l’organisation cultivait de la drogue. Pour se venger, l’organisation décide d’éliminer tous les membres des forces spéciales ayant participés à l’opération.
La police, complètement impuissante et dépassée devant de telles pratiques, décide de s’approprier les services des Angel, des agents secrets habitués des infiltrations et coups d’éclats en tout genre. Une guerre va alors se déclarer entre l’organisation du Triangle D’or et les « anges ».

Avis de Ryo Saeba :
Au début du cinéma Chinois et Shanghaien, il est surprenant de voir que tous les rôles principaux étaient interprétés par des femmes et que les hommes n’étaient alors que de simples faire-valoir. Mais alors comment se fait-il que par la suite la tendance se soit inversée ? Et bien, tout ça est principalement dû à l’œuvre d’un homme : Chang Che qui inversa complètement cette tendance en mettant en avant des acteurs comme Ti Lung, David Chiang ou Wang Yu dans un univers cinématographique où la femme n’a pas sa place.
Mais parallèlement un cinéaste a la volonté ferme de changer ça, il s’agit de King Hu qui ose à l’époque donner les rôles principaux de ses films d’action à des actrices comme Cheng Pei Pei ou Polly Shang Kwan. Afin de bien voir la différence entre les 2 cinéastes, il suffit tout simplement de regarder Come Drink With Me réalisé par King Hu et Golden Swallow, sa suite, réalisé par Chang Che dans lequel Wang Yu passe sur le devant de la scène relayant Chang Pei Pei à l’état de second rôle. On retrouvera d’ailleurs un constat assez similaire plus tard entre 2 autres grands réalisateurs : John Woo et Tsui Hark.

La voix est ouverte, le film d’action n’est plus un univers de macho. Il faut attendre encore plus tard pour qu’après les Wu Xia Pian, les femmes aient des rôles principaux dans les films de Kung Fu. La femme qui incarna pour la première fois ce nouveau type de « Femme Fatale » à la perfection est la grande, mais malheureusement assez méconnue, Angela Mao. Samo Hung est déjà présent à cette époque à ses côtés en tant que chorégraphe et jouant des rôles secondaires dans ses films. C’est également lui, l’homme qui a lancé tant de genres, qui en 1985 produit Yes Madam! réalisé par son ami des « Seven Little Fortunes », Corey Yuen, qui propulsa au rang de superstar du cinéma d’action Michelle Yeoh. L’essence du girls with guns était née. Mais le film reste tout de même une grosse production et le genre tel qu’on le connaît aujourd’hui, ainsi que tel qu’il s’est décliné par la suite, a été engendré par un film : Angel.

Angel est véritablement LE film sur le lequel est calqué absolument tous les Girls with guns qui ont fleurit (hormis peut être les productions Samo Hung) dans les années 90. Le concept est simple, tout d’abord le budget étant limité il faut réduire les coûts de productions et le meilleur moyen de le faire est encore d’aller tourner dans un pays étranger afin de réduire les coûts de main d’œuvre. Les Kung Fu des années 70 utilisaient déjà cette technique et les destinations phares à l’époque étaient Taïwan et la Corée, alors que dans les années 90, les pays en vogue pour ce genre de production sont essentiellement la Thaïlande et les Philippines, ce qui permet en même temps pour les acteurs de prendre quelques vacances au passage même si le rythme des tournages est très élevé. Une autre composante récurrente est le scénario qui tourne toujours autour d’une histoire de vengeance (thème également dominant des films de Kung Fu) souvent multiple (la Loi du Talion : œil pour œil, dent pour dent) et mettant en scène des trafiquants de drogue. On retrouve toujours dans l’action un mélange de gunfights, combats sans oublier bien sur les fameuses poursuites en voitures accélérées.

La réussite du film est en grande partie due au casting et principalement à celles qu’on a surnommé par la suite les reines du girls with guns : Moon Lee Choi Fung et Yukari Oshima. Qui aurait cru que Moon Lee et son visage de poupée, qui à la base possède une formation de danseuse, contenait une telle rage et énergie enfouis au plus profond d’elle même. Et puis il y a Yukari Oshima, élève de Sonny Chiba, le plus célèbre artiste martial Japonais, qui elle aussi se donne à 200% et qui arrive toujours à faire vivre ses personnages de manière formidable pour peu qu’on lui accorde un rôle intéressant (Angel, Angel Terminator 2, Dreaming the reality) mais elle possède également un talent comique qui n’a été que très peu exploité (That’s money, Outlaw brothers, The Big Deal). Ces 2 petits bouts de femmes ont fait la gloire du genre et le bonheur des spectateurs, on regrettera seulement que par la suite Moon Lee, qui est une bonne actrice, a été victime d’un type casting sévère orientant sa carrière dans une direction 100 % film d’action.

Mais il ne faut pas oublier Hwang Jang Lee, un des meilleurs si ce n’est (de mon point de vue en tout cas) le meilleur kicker du cinéma, dont l’explosion et la notoriété soudaine de Jackie Chan lui doit beaucoup grâce à ses superbes performances dans Snake in the Eagle Shadow et Drunken Master. Malgré ses 43 ans à l’époque du film, il n’a rien perdu de ses capacités martiales et produit deux très bons (mais trop court) combats contre le japonais Hideki Saijo dont c’est apparemment le seul film à Hong Kong. On retrouve également Elaine Lui qui se bat un peu moins mais réalise tout de même quelques cascades et qui joue surtout avec des armes lourdes et autres gadgets en tout genre (somnifère et jet d’acide dissimulés dans un bracelet ou encore des boutons de chemise explosifs) ainsi que Alex Fong qui heureusement pour nous ne fait pas grand chose à part se faire torturer par Yukari Oshima, ce qui n’est pas pour nous déplaire quand on connaît sa médiocre performance affichée dans les 2 suites. C’est simple Angel 2 et Angel 3 à eux seuls ont réussi à me faire détester Alex Fong que j’avais découvert pourtant formidable dans le Till death do us Part de Daniel Lee. On notera aussi un petit rôle de David Chiang qui joue le patron des Angel, ce qu’est Charlie aux drôles de dames en quelque sorte.

Malgré un faible budget, le film se permet tout de même le luxe de tourner des scènes au Japon ainsi qu’en Thaïlande. Les scènes d’action sont très efficaces que ce soit au niveau des gunfights bien explosifs ou des combats très brutaux et violents, à l’image du combat final entre Yukari Oshima et Moon Lee qui est tout simplement leur meilleure prestation l’une contre l’autre. De plus le montage et les chorégraphies sont réglés à la perfection très loin des massacres visuels orchestrés par Philip Ko dans la plus part de ses films. Les stuntmans aussi sont bien au rendez-vous, d’un nombre assez conséquent lors des scènes d’actions, ils n’hésitent pas à se jeter des fenêtres pendant une explosion, aller se fracasser sur des vitres ou encore sauter dans le vide d’un toit d’une hauteur considérable avec des arbres en dessous.

Déjà que les films d’action de Hong Kong de l’époque sont réputés pour le risque encouru sur les cascades, mais cet élément est encore plus vrai sur les girls with guns puisque le rythme de travail intense et les faibles budgets entraînent un manque de sécurité évident, ce qui conduit à la catastrophe lors du tournage de Devil Hunters sur lequel Moon Lee, Sibelle Hu et Ray Lui se sont retrouvés littéralement happés par une boule de feu dû à la mauvaise coordination du technicien qui a déclenché l’explosion trop tôt. Cette scène de Devil Hunters est bien connue du fait que ce sont les acteurs principaux qui ont effectué la cascade et été gravement brûlés mais la scène de Angel dans laquelle les cascadeurs sautent par la fenêtre n’est pas loin d’être aussi dramatique et impressionnante.

Les personnages possèdent une certaine consistance et sont intéressants, comme celui interprété par Yukari Oshima qui arrive à apporter une touche de sadisme et de cruauté sans pareil à son personnage. Le scénario n’est pas d’une originalité débordante, sorte de mélange entre Charlie’s Angel et James Bond remodelé à la manière HK et puis comme je l’ai dit plus haut, avec une histoire de trafiquant de drogue et de vengeance en cascade qui ne sont que prétexte pour nous servir de bonnes scènes d’actions. L’important reste que l’ensemble forme un tout cohérent faisant un peu plus que de relier chaque scène entre elles et à ce niveau, on peut dire que le pari est réussi.

L’apport de Angel au cinéma de Hong Kong est donc indéniable, tout simplement la naissance d’un genre à part entière qu’est le girls with guns. Il engendra 2 suites officielles d’un niveau bien inférieur dans lequel le personnage de Moon Lee sera plus en retrait laissant place au pauvre Alex Fong qui fait son show mais qui n’est malheureusement pas fait pour le cinéma d’action.
Et puis comme tous les gros succès, il engendrera également tout un tas de films avec le mot Angel dans le titre mais n’ayant rien à voir avec l’original, si ce n’est que l’on retrouve très souvent Moon Lee ou Yukari Oshima dans le casting (Angel terminators 1 et 2, Angel force, Angel on fire, Angel enforcers, Angel’s project…).

Note : 8/10




Le Trailer :

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Auteur : Ryo Saeba

C’est véritablement Shaolin Soccer qui déclencha un élan de passion à partir duquel il se lança dans la vision de films sous titrés anglais. Et là ce fut le bonheur, il avait devant lui tout un pan du cinéma à découvrir, des genres propres au cinéma de Hong Kong comme le kung fu old school, les girls with guns ou encore le Wu Xia Pian...
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